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Japon : élections sénatoriales deux jours après l'assassinat de Shinzo Abe

Deux jours après l'assassinat par balles de l'ex-Premier ministre Shinzo Abe, en plein meeting électoral à Nara, les Japonais sont appelés aux urnes, dimanche, pour renouveler la moitié de leur Sénat. Le Parti libéral-démocrate, auquel appartenait la victime, est donné largement en tête. 

Un scrutin sous le signe du deuil. Les Japonais ont sans surprise plébiscité la coalition au pouvoir dimanche 10 juillet lors des élections sénatoriales, selon des résultats partiels, un scrutin qui a été éclipsé par l'assassinat deux jours plus tôt de l'ancien Premier ministre Shinzo Abe au cours d'un meeting électoral.

Le Parti libéral-démocrate (PLD, droite nationaliste) auquel appartenait Shinzo Abe, et son allié le Komeito, remporteraient entre 70 et 83 sièges sur les 125 à pourvoir, selon les projections de la chaîne publique NHK - le Sénat compte 248 sièges, renouvelés pour moitié tous les trois ans.

Reconnaissant sa défaite, Kenta Izumi, leader du Parti démocrate constitutionnel (opposition), qui devrait perdre un certain nombre de sièges, a déclaré qu'il était clair que "les électeurs n'avaient pas voulu changer et nous confier le gouvernement", selon Kyodo News. Le taux de participation a été de seulement 52 %, selon les données disponibles à ce stade.

"Je pense qu'il est important que les élections aient pu se tenir normalement", a commenté l'actuel Premier ministre, Fumio Kishida, ajoutant qu'il allait s'atteler aux importants sujets en cours : le Covid, l'Ukraine et l'inflation.

Deux jours auparavant, Fumio Kishida avait dénoncé l'attaque "barbare" contre son ancien mentor, insistant sur l'importance de "défendre les élections libres et équitables, qui sont le fondement de la démocratie". "Nous ne céderons jamais à la violence", a-t-il ajouté.

L'assassinat par balles de Shinzo Abe, l'un des hommes politiques les plus connus de l'archipel, a profondément meurtri et ému au Japon comme à l'étranger, et les messages de condoléances ont afflué du monde entier, y compris de Chine et de Corée du Sud, avec lesquelles le Japon entretient des relations souvent houleuses.

Le secrétaire d'État américain, Antony Blinken, actuellement en déplacement en Asie, fera par ailleurs étape à Tokyo, lundi, pour présenter ses condoléances en personne, a annoncé le département d'État.

Le bureau de Shinzo Abe a déclaré à l'AFP qu'une veillée funèbre se tiendrait lundi soir, et les obsèques mardi, en présence de la famille et des proches de Shinzo Abe. Elles auront lieu au temple Zojoji à Tokyo, selon les médias locaux.

L'auteur présumé de l'attaque, arrêté sur les lieux, a avoué avoir délibérément visé Shinzo Abe, expliquant à la police en vouloir à une organisation à laquelle il croyait que celui-ci était affilié. Certains médias japonais ont évoqué un groupe religieux.

Cet homme de 41 ans nommé Tetsuya Yamagami serait un ancien membre de la Force d'autodéfense maritime (la marine japonaise), et a déclaré aux forces de l'ordre avoir utilisé une arme artisanale.

Selon plusieurs médias, il aurait déclaré aux enquêteurs s'être rendu jeudi à Okayama (ouest) dans l'intention d'assassiner Shinzo Abe qui participait à un événement sur place, mais y aurait finalement renoncé car les participants devaient communiquer leurs nom et adresse.

L'inflation au cœur des préoccupations

Après avoir été brièvement suspendue par les différents partis à la nouvelle de l'attaque de l'ancien Premier ministre, la campagne électorale avait repris samedi avec des mesures de sécurité accrues, alors que la police de Nara a reconnu des failles "indéniables" dans celles qui entouraient le meeting de Shinzo Abe.

Elle a été dominée par des préoccupations locales, notamment les hausses de prix et les risques concernant l'approvisionnement en électricité, alors que la canicule qui touche le Japon depuis fin juin fait craindre une pénurie.

"L'économie mondiale stagne et le Japon est également en crise économique à bien des égards, avec des salaires qui n'augmentent pas", a commenté Shigeru Kato, 75 ans, interrogé par l'AFP à la sortie d'un bureau de vote à Tokyo. Si on ne fait rien, "le Japon va s'enfoncer encore plus", a-t-il ajouté.

Dans un pays souvent critiqué pour le manque de représentation féminine dans ses institutions et la direction de ses entreprises, une proportion record de 33 % de femmes figurent parmi les 545 candidats.

La large victoire qui se profile aux sénatoriales consoliderait le pouvoir de Fumio Kishida, qui s'est fait le chantre d'une politique économique plus redistributive baptisée "nouveau capitalisme", avant une période de trois ans sans élections prévues.

Sa coopération étroite avec les alliés occidentaux du Japon pour faire pression sur la Russie a aussi été saluée dans l'archipel, et son projet d'accroître "considérablement" le budget de la défense est également populaire, alors que la Chine ne cesse d'affirmer ses ambitions territoriales en Asie-Pacifique.

La tendance à l'augmentation des dépenses en matière de défense pourrait encore se renforcer après l'élection, selon Yu Uchiyama, professeur de sciences politiques à l'Université de Tokyo, qui pense que la "position de fermeté (du Japon) à l'égard de la Chine va probablement être maintenue".

Avec AFP