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Libye : le gouvernement de l'Est se retire de Tripoli quelques heures après son entrée

Le gouvernement libyen de Fathi Bachagha, désigné par le Parlement et soutenu par le maréchal Haftar a annoncé, mardi, se retirer de Tripoli, quelques heures après son entrée. Des affrontements avaient alors éclaté entre groupes armés. Tripoli est le siège du pouvoir exécutif rival, gouvernement d'Abdelhamid Dbeibah qui a plusieurs fois affirmé ne vouloir remettre le pouvoir qu'à un gouvernement élu.

Quelques heures après une entrée qui a provoqué des affrontements, mardi 17 mai à Tripoli, le gouvernement libyen désigné par le Parlement et soutenu par le maréchal Khalifa Haftar a annoncé son retrait de la capitale, siège du pouvoir exécutif rival.

Le service de presse de ce gouvernement a indiqué dans un communiqué que son Premier ministre, Fathi Bachagha, ainsi que plusieurs de ses ministres, avaient "quitté Tripoli pour préserver la sécurité […] des citoyens", après que des affrontements entre groupes armés ont éclaté dès l'aube en pleine ville. 

Plus tôt dans la journée, ce même service de presse avait annoncé "l'arrivée du Premier ministre du gouvernement libyen, Fathi Bachagha, accompagné de plusieurs ministres, dans la capitale Tripoli, pour y débuter ses travaux".

Bras de fer avec l'exécutif en place

Des affrontements entre groupes armés ont éclaté à Tripoli peu après l'entrée du gouvernement de Fathi Bachagha. Des tirs nourris se poursuivaient en pleine ville vers 7 heures, heure locale.

En février, le Parlement siégeant dans l'Est avait désigné Fathi Bachagha, ancien ministre de l'Intérieur, comme nouveau Premier ministre. Cette instance est soutenue par le puissant maréchal Khalifa Haftar, dont les forces avaient tenté de conquérir la capitale en 2019.

Mais Fathi Bachagha n'avait jusque-là pas réussi à évincer l'exécutif en place à Tripoli, dirigé par l'homme d'affaires Abdelhamid Dbeibah, qui a affirmé à maintes reprises qu'il ne remettrait le pouvoir qu'à un gouvernement élu.

Le gouvernement d'Abdelhamid Dbeibah est né début 2020 d'un processus politique parrainé par l'ONU, avec comme principale mission l'organisation d'élections législatives et présidentielle, initialement prévue en décembre dernier, mais reportée sine die. Ses rivaux politiques estiment que son mandat a pris fin avec ce report.

"Quand il y a deux gouvernements, ils s'affrontent"

Selon des médias libyens, le départ de Fathi Bachagha de la capitale a été décidé lors d'une médiation menée par une brigade de l'armée loyale au gouvernement de Tripoli pour mettre fin aux combats. 

La conseillère spéciale du secrétaire général de l'ONU pour la Libye, Stephanie Williams, a appelé sur Twitter à la "retenue", en insistant "sur la nécessité absolue de s'abstenir de toute action provocatrice".

"Les États-Unis sont très préoccupés par les informations faisant état d'affrontements armés à Tripoli. Nous demandons instamment à tous les groupes armés de s'abstenir de recourir à la violence et aux dirigeants politiques de reconnaître que prendre ou conserver le pouvoir par la violence ne fera que nuire au peuple libyen", a déclaré de son côté l'ambassade américaine à Tripoli.

Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a lui évoqué une situation "devenue très grave ces dernières heures".

"Nous nous attendions à ce que quelque chose comme ça se produise, parce qu'en Libye nous n'avons pas eu d'élections mais nous avons deux gouvernements […]. Et, tôt ou tard, quand il y a deux gouvernements, ils s'affrontent", a-t-il déclaré à Bruxelles.

Dans une vidéo diffusée par des médias locaux, Fathi Bachagha, ancien ministre de l'Intérieur, avait affirmé tôt mardi avoir été "très bien accueilli" à Tripoli, et annoncé la tenue d'une conférence de presse en soirée durant laquelle il ferait "un discours d'unité au peuple libyen".

Minée par les divisions entre institutions concurrentes dans l'Est et l'Ouest, la Libye peine à s'extirper de plus d'une décennie de chaos politique et de conflits consécutifs à la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011, dans le sillage du Printemps arabe.

La production pétrolière, principale source de revenus du pays, est de nouveau otage des divisions politiques, avec une vague de fermetures forcées de sites pétroliers.

Fin avril, le Conseil de sécurité de l'ONU, divisé, a adopté une résolution du Royaume-Uni prolongeant de seulement trois mois sa mission politique en Libye, la Russie refusant toute durée plus longue tant qu'un nouvel émissaire onusien ne sera pas nommé.

Avec AFP