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Stocker nos données numériques sur ADN

La nature a inventé son propre système de stockage : l’ADN. Aujourd’hui, c’est la base de données du vivant. Les scientifiques se penchent sur ses superpouvoirs, qui pourraient permettre demain le stockage de données numériques.

L’inévitable crise des données

Envoyer un e-mail, regarder une série sur Netflix ou poster une photo sur Instagram : toutes ces activités produisent des données. Pour les stocker, les data centers gourmands en énergie se multiplient partout dans le monde. Ils consomment déjà 10 % de l’électricité sur Terre et sont responsables de 4 % des émissions de gaz à effet de serre, soit plus que l’aviation.

Avec notre production exponentielle de données numériques, va-t-on vers une crise de stockage des données ? Pour Hugues Ferreboeuf, chef de projet au think tank The Shift Project, le scénario est probable "à moyen terme". "Nous avons pris l’habitude de stocker énormément de données comme si nous étions dans un monde infini et nous sommes dans un monde fini", souligne-t-il.

Le monde entier sur une tablette de chocolat

Stéphane Lemaire a peut-être trouvé la solution miracle. Directeur de recherche au Laboratoire de biologie computationnelle et quantitative (Sorbonne Université / CNRS), il est également directeur scientifique de Biomemory, une société spécialisée dans le stockage de données sur ADN. Dans nos ordinateurs, les données numériques sont codées en écriture binaire, des suites de 0 et de 1. Biomemory traduit ces données en langage ADN, une combinaison des lettres A, T, C et G. Cette suite permet d’obtenir une séquence ADN, multipliée en laboratoire grâce à des bactéries. Les informations sont simplement stockées sur une molécule.

Biomemory a ainsi permis d’encoder la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 en langage ADN. Microscopique, l’ADN offre des possibilités de stockage presque infinies. Une simple petite capsule de métal permettrait ainsi de contenir 100 milliards de Déclarations des droits de l’Homme ! Plus incroyable encore, toutes les informations du monde pourraient être stockées sur seulement 100 grammes d’ADN, l’équivalent d’une tablette de chocolat. Alors, adieu les data centers énergivores ? "L’ADN est considéré comme la meilleure solution dont on dispose pour remplacer nos supports de stockage de manière écoresponsable", souligne Stéphane Lemaire. La technologie, qui coûte encore cher et ne permet pas pour l'instant de stocker de façon massive des données à récupérer rapidement, intéresse les géants du secteur, dont Microsoft. Mais elle est d’ores et déjà fonctionnelle.