Chroniqueur sportif au "International Herald Tribune", Peter Berlin est un observateur attentif de la Coupe du monde. De la "main de Dieu" de Maradona à celle de Thierry Henry, l'histoire du Mondial est jalonnée d'erreurs d'arbitrage.
Le "coup de main" de Thierry Henry à Gallas - auteur du but français contre l’Irlande - vient rallonger la liste des contentieux dans le monde du foot. Dans l’histoire de la Coupe du monde, la Fifa a-t-elle été amenée, un jour, à désavouer l’arbitre et faire rejouer un match ?
Peter Berlin : Qu’il s’agisse des phases finales ou des qualifications, l’histoire de la Coupe du monde est jalonnée d’erreurs et de contentieux liés à l’arbitrage, à l’image de la ‘"main de Dieu"’ de Maradona lors du match Argentine-Angleterre lors du Mondial de 1986. Autre cas polémique : le but anglais contre l’Allemagne fédérale en finale de la Coupe du monde de 1966 à Wembley (1). Or, depuis l’édition inaugurale en 1930 en Uruguay, chaque Mondial connait son lot d’erreurs.
En tout état de cause, la Fifa ne s’est jamais résignée à faire rejouer un match quand elle a été confronté à des fautes similaires à celle de Thierry Henry. Disqualifier ses arbitres dans la plus prestigieuse compétition sportive du monde est assurément une décision lourde de sens.
En revanche, en 2005, elle avait décidé de faire rejouer le match Ouzbékistan-Bahreïn comptant pour les éliminatoires du Mondial 2006. Lors de ce match, le pénalty réussi par un joueur ouzbek avait été transformé en coup franc pour le Bahreïn. Motif invoqué par le directeur du jeu : un autre joueur ouzbek avait pénétré dans la surface de réparation au moment de la transformation du pénalty. Le capitaine de l’équipe d’Asie centrale avait fait immédiatement des réserves sur cette ‘’erreur technique’’ auprès du commissaire de match. Ce dernier l’a confirmée dans son rapport à la Fédération internationale.
La Fifa a validé le résultat de France-Irlande, en rappellant l’esprit de la Loi du jeu : "Les décisions de l’arbitre sur des faits en relation avec le jeu sont sans appel. "
P.B. : Il aurait été impensable que la Fédération agisse autrement. Sinon, cela aurait été la porte ouverte à des contestations en cascade. Rejouer France-Irlande, c’est se résoudre à traiter de manière similaire les contentieux antérieurs.
Le Premier ministre irlandais a profité de sa présence au Conseil européen de Bruxelles pour demander à Nicolas Sarkozy de rejouer le match. Dublin s’efforce de régler un contentieux footballistique au moyen de la politique et de la diplomatie. Est-ce une première dans l’histoire de la Coupe du monde ?
P.B. : C’est loin d’être une première. Lors des éliminatoires du Mondial de 1970 au Mexique, un match très tendu entre le Honduras et le Salvador a failli déclencher les hostilités entre les deux voisins. D’autres cas "politiques" meublent l'histoire du football. Au Sud comme au Nord de l’hémisphère, foot et politique sont, depuis toujours, liés. Phénomène de société, le football est une caisse de résonance. Les hommes politiques s’en saisissent pour attirer l’attention.
(1) Le ballon de l’anglais Geoffrey Hurst percute la transversale des buts allemands et touche la ligne. Le but est validé malgré les protestations allemandes.