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Les manifestations se sont poursuivies, jeudi, à Almaty, la principale ville du Kazakhstan, où l'armée était déployée. Selon des journalistes, des coups de feu ont été entendus. Les autorités, qui ont arrêté près 2 000 personnes, rapportent des "dizaines" de manifestants tués lors de l'assaut de bâtiments administratifs et plus d'un millier de blessés.

La pression de la rue ne retombe pas au Kazakhstan et la crainte d'une répression sanglante s'accentue. Plusieurs véhicules blindés et des dizaines de soldats se sont déployés, jeudi 6 janvier, sur la principale place d'Almaty, la plus grande ville du pays et capitale économique, où plusieurs centaines de personnes ont de nouveau manifesté contre le gouvernement, ont constaté des journalistes de Reuters, qui ont entendu des coups de feu.

Un correspondant de l'AFP a lui aussi entendu plusieurs coups de feu dans le centre de cette ville qui portait les stigmates des affrontements de la veille, avec des façades d'immeubles noircies par les flammes, des carcasses de véhicules calcinées et des flaques de sang au sol.

Des médias locaux ont affirmé, jeudi soir, que les forces de l'ordre avaient chassé les manifestants de la principale place d'Almaty et repris le contrôle des bâtiments officiels, ce que l'AFP n'a pas pu vérifier. 

Washington met en garde Moscou

Jeudi, Moscou avait annoncé l'arrivée au Kazakhstan de militaires russes dans le cadre du déploiement d'une "force collective de maintien de la paix" de l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), un groupe sous contrôle russe, à l'appel du gouvernement kazakhstanais.

Les États-Unis ont mis en garde les troupes russes contre toute violation des droits humains ou velléité de "prise de contrôle" des institutions du pays.

"Les États-Unis, et franchement le monde entier, surveillent toute éventuelle violation des droits humains. Et nous surveillons aussi tout acte qui puisse jeter les bases pour une prise de contrôle des institutions du Kazakhstan", a déclaré le porte-parole de la diplomatie américaine Ned Price. "Nous espérons que le gouvernement du Kazakhstan sera en mesure de répondre aux problèmes qui sont fondamentalement de nature économique et politique."

Une nuit de violents affrontements à Almaty

Selon la police, des "dizaines" de manifestants ont été tués, dans la nuit de mercredi à jeudi, alors qu'ils tentaient de s'emparer de bâtiments administratifs. Les affrontements ont également fait plus d'un millier de blessés, dont 62 grièvement, d'après les autorités qui ont procédé à environ 2 000 arrestations à Almaty.

"La nuit dernière, les forces extrémistes ont tenté de prendre d'assaut les bâtiments administratifs, le département de la police de la ville d'Almaty, ainsi que les départements locaux et les commissariats de police. Des dizaines d'assaillants ont été éliminés", a déclaré le porte-parole de la police Saltanat Azirbek, cité par les agences Interfax-Kazakhstan, TASS et Ria Novosti. "Des dizaines d'assaillants ont été éliminés et leurs identités sont en cours d'identification", a-t-il ajouté.

Dix-huit membres des forces de sécurité ont également été tués et 748 blessés, ont par ailleurs rapporté les agences de presse, citant les autorités.

Les images diffusées dans les médias et sur les réseaux sociaux ont montré des magasins pillés et certains bâtiments administratifs investis et incendiés à Almaty, tandis que des tirs d'arme automatique pouvaient être entendus.

La Russie vole au secours du pouvoir kazakhstanais

D'après la télévision publique, la banque centrale du pays a décidé de suspendre l'activité de toutes les institutions financières.

Résultat du chaos, l'uranium, dont le Kazakhstan est l'un des principaux producteurs mondiaux, a vu son prix fortement augmenter, tandis que le cours des actions des entreprises nationales s'est effondré à la Bourse de Londres. Le pays est une place forte du "minage" de Bitcoin, qui connaît également une forte chute.

Au Kazakhstan, "des dizaines" de manifestants tués et plus de 2 000 arrestations

L'accès à Internet semble par ailleurs hors-service rendant la situation difficile à évaluer, journalistes et témoins ne pouvant plus être joints par Internet ou par téléphone.

Provoqué par la hausse des prix du carburant le 1er janvier, le vaste mouvement de contestation à travers le pays a basculé dans la violence quelques jours plus tard, faisant 12 morts dans les rangs des forces de sécurité et 353 blessés selon les autorités locales. "Le corps de l'un d'entre eux a été retrouvé avec la tête coupée", a affirmé la chaîne Khabar-24, citée par les agences TASS, Interfax-Kazakhstan et Ria Novosti.

Le président kazakhstanais, Kassym-Jomart Tokaïev, a jusque-là échoué à calmer les protestations, malgré une concession sur le prix du gaz, la démission du gouvernement et l'instauration de l'état d'urgence et d'un couvre-feu nocturne dans le pays. Le gouvernement a également annoncé, jeudi, avoir plafonné pour six mois le prix de vente des carburants.

Kassim-Jomart Tokaïev a assuré, mercredi, que des "gangs terroristes" ayant "reçu un entraînement approfondi à l'étranger" dirigent les manifestations.

Pour rétablir l'ordre, les autorités ont demandé l'aide d'une alliance sécuritaire régionale menée par la Russie, qui a proposé l'envoi de soldats de "maintien de la paix".

"Une force collective de maintien de la paix de l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) a été envoyée au Kazakhstan pour une période limitée afin de stabiliser et de normaliser la situation", a indiqué cette alliance militaire dans un communiqué diffusé jeudi sur Telegram par la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova.

Avec Reuters et AFP