
Promulguée en 2004, la loi Justice et Paix promet de faibles peines de prison aux paramilitaires qui rendent les armes. Ces miliciens d'extrême droite sont pourtant responsables de milliers de morts dans le pays...
L'invité de ce Focus est Roméo Langlois, correspondant de FRANCE 24 à Bogota, en Colombie.
En Colombie, tous les jours, deux à trois personnes sont victimes de la ‘’disparition forcée’’. Cette pratique, considérée par le droit international comme un crime de guerre consiste à assassiner des personnes et à faire disparaître les corps. Ces 20 dernières années, en Colombie, elle a surtout été pratiquée par certains secteurs des forces de sécurité et les groupes paramilitaires.
Au nom de la lutte antiguérilla, des groupes paramilitaires, ces escadrons de la mort liés à la mafia, à l'armée ainsi qu’aux pouvoirs politiques et économiques, ont fait régner la terreur dans tout le pays. Syndicalistes, leaders sociaux, opposants, juges, journalistes et surtout paysans ou simples citoyens : les victimes des paramilitaires se comptent par dizaines de milliers. Une bonne partie des corps, jetés dans les fleuves ou enterrés dans la jungle, n'a jamais été retrouvée. Un véritable calvaire, pour les familles des victimes qui, sans corps, ne peuvent faire leur deuil et retrouver la paix.
Bilan mitigé
Mais depuis 2004, la très controversée loi Justice et Paix promet de faibles peines de prisons (de cinq à huit ans de réclusion) aux membres des groupes armés qui rendent les armes, confessent leurs crimes et aident à localiser les corps de leurs victimes afin qu'ils puissent, enfin, être rendus aux familles.
Arrivé au pouvoir en 2002, le président colombien, Alvaro Uribe, accusé de liens avec les paramilitaires, a ouvert des négociations avec ces milices d'extrême droite. C'est ainsi qu'entre 2003 et 2006, plus de 20 000 paramilitaires ont rendu les armes pour pouvoir bénéficier de la loi.
Mais le bilan de ce processus de paix est mitigé. Souvent, ces combattants repentis ne jouent pas le jeu, n’avouent qu'une petite partie de leurs crimes et rechignent à dénoncer leurs complices au sein de la classe politique. Le programme gouvernemental de réinsertion à la vie civile laisse à désirer, et de nombreux ex-paramilitaires ont déjà repris les armes. Surtout, pour l'heure, aucune condamnation n'a été prononcée. Reste que tous les jours, grâce aux confessions des repentis, les unités de Justice et Paix du parquet découvrent de nouveaux corps dans les jungles et les montagnes colombiennes.