Soucieuse d'anéantir le mouvement des Taliban du Pakistan (TTP), l’armée a noué des liens avec d’autres groupes rebelles du Waziristan. Au risque d'entretenir des liaisons qui peuvent se révéler dangereuses.
Depuis deux semaines, l'armée pakistanaise mène un combat sans relâche dans les zones tribales du Sud-Waziristan. Objectif : anéantir le fief d'Hakimullah Mehsud, leader du mouvement des Taliban du Pakistan (TTP), tenu responsable de la montée du terrorisme dans le pays.
Le TTP n’est pourtant pas le seul groupe à sévir dans la région. Il existe également des groupes de Taliban indépendants, qui compteraient dans leurs rangs environ 30 000 combattants. Aujourd’hui, la majorité de ces Taliban font alliance avec le gouvernement car eux aussi s’opposent au TTP.
Qari Nasir Mehsud fait partie de ces chefs qui ont pactisé avec le pouvoir. Il est à la tête d’environ 10 000 hommes qui se battent chez le voisin afghan contre les forces de l'Otan. Mais la région où le gouvernement pakistanais a lancé une offensive empiète également sur la zone d’influence de Qari Zainuddin, sa tribu.
"Nous restons quand même des Taliban"
Notre correspondante Anne-Isabelle Tollet a rencontré Qari Nasir Mehsud qui se fait d’habitude très discret. "On est 10 000 en tout. Mais on a 3 000 hommes planqués dans le Sud-Waziristan qui renseignent les services secrets pakistanais sur les activités du clan d'Hakimullah Mehsud", explique le chef de guerre au sujet de sa collaboration avec l’armée.
Mais Qari Nasir Meshud promet que cette alliance de circonstance ne durera pas. "Après cette guerre, nous ne soutiendrons plus le gouvernement car nous estimons que les dirigeants politiques torturent notre pays. Même si nous ne soutenons pas les Taliban qui posent des bombes au Pakistan, nous ne les affrontons pas non plus. Nous restons quand même des Taliban".
De leur côté, les responsables pakistanais ne s'inquiètent pas de l'avenir. Ils espèrent que la défaite du clan d'Hakimullah Mehsud leur suffira pour s'imposer dans la région. "Si Dieu nous aide, nous l’emporterons. Nous espérons que cela aura alors des répercussions positives sur tous les autres groupes d’insurgés du Waziristan et du reste du pays", veut croire le général pakistanais Abbas.
Pourtant, le projet des Taliban est clair : après l'Afghanistan, ils ont bien l'intention d’imposer la loi islamique au Pakistan. Si les politiques y trouvent un intérêt aujourdhui, ils coopèrent certainement avec leurs ennemis de demain.