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L’UE se fixe de nouveaux objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre

Les 27 pays de l’Union européenne ont fixé, vendredi, de nouveaux objectifs pour réduire les émissions de gaz à effet de serre avec, en ligne de mire, la neutralité carbone à l’horizon 2050. Un engagement jugé insuffisant par les ONG environnementales. 

"Une proposition ambitieuse pour un nouvel objectif climatique". C'est en ces termes élogieux que la présidente de la Commission européene, Ursula von der Leyen, a salué l'accord conclu, vendredi 11 décembre, par les 27 pays membres pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du continent. 

À la veille du cinquième anniversaire de l'Accord de Paris, les Européens ont donné leur feu vert à une baisse nette de leurs émissions d'"au moins 55 %" d'ici à 2030 par rapport au niveau de 1990, contre - 40 % précédemment, afin d'atteindre en 2050 la neutralité carbone.  

Dans le cadre de l'Accord de Paris, l'UE "actualisera" l'objectif juridiquement contraignant qu'elle doit soumettre aux Nations unies d'ici à la fin de l'année. Eurodéputés et États membres devront intégrer la nouvelle cible dans la législation européenne. 

Des garanties pour la Pologne 

La Pologne, très dépendante du charbon, s'inquiétait des conséquences pour son économie et exigeait des garanties sur les futures aides financières pour débloquer l'accord. 

Les conclusions finales adoptent des formulations propres à rassurer Varsovie : "L'objectif sera atteint collectivement par l'UE […]. Les États participent à l'effort en tenant compte de l'équité et de la solidarité, sans laisser aucun d'entre eux en arrière". 

La Pologne s'alarmait aussi de ne pas toucher sa juste part des futurs revenus générés par la révision du marché du carbone européen : de possibles "déséquilibres […] seront examinés dans une législation à venir", assure le texte. Des financements spécifiques, comme le fond de transition juste, seront consacrés à la transition énergétique.  

"On est très loin de ce qu'il faudrait" 

Le chiffre de 55 %, en deçà de l'objectif que réclamait le Parlement européen (- 60 %), est jugé insuffisant par les experts et ONG environnementales. 

"Les dirigeants peuvent se congratuler, mais on est très loin de ce qu'il faudrait pour le climat […]. Si ce chiffre signifie vraiment quelque chose, il faut sabrer les investissements déjà programmés dans les énergies fossiles", commente Colin Roche, coordinateur pour Friends of the Earth Europe. 

Une baisse d'au moins 65 % serait nécessaire pour respecter l'Accord de Paris, selon les dernières données scientifiques, rappellent les organisations WWF et Greenpeace, ainsi que la coordination Climate Action Network (CAN). 

Le Réseau Action Climat dénonce une "ambition en trompe-l'œil" : la réduction de 55 % est "nette", c'est-à-dire qu'elle inclut les "puits de carbone" naturels, comme les forêts et les sols, dans le calcul des émissions absorbées. 

Ce qui signifierait une réduction de seulement 50 % à 52 % des émissions "réelles" des secteurs polluants (énergie, transports, agriculture...) en misant sur les forêts pour assurer le reste de la baisse. 

Inquiétude autour du gaz fossile 

L'accord des Vingt-Sept "respecte le droit des États membres à choisir le mix énergétique qui leur convient et les technologies les plus appropriées, […] y compris des technologies de transition comme le gaz", selon le texte du Conseil européen. 

L'objectif de - 55 % "ne représente qu'une faible amélioration par rapport aux réductions d'émissions d'ores et déjà attendues. Sans mesure supplémentaire, il permettra aux groupes pétroliers et gaziers de poursuivre leurs activités", déplore Sebastian Mang, de Greenpeace. 

Les "technologies de transition" laissées au choix des États sont une formulation "dangereuse [qui] ouvre la porte des financements verts au gaz ou au nucléaire", estime l'ONG.  

"En défendant les intérêts du nucléaire, la France a pris […] le risque de semer la division. Cette posture inacceptable soutenue par la Pologne et par la République tchèque a ouvert la boîte de Pandore à toutes les fausses solutions, comme le gaz fossile qui se voit reconnaître un rôle dans la transition", au risque de rendre les objectifs climatiques "complètement inatteignables", abonde Réseau Action Climat.  

De l'avis général, la crise climatique pourrait cependant forcer la main aux Vingt-Sept : "Étant donné la profonde menace existentielle à laquelle nous sommes confrontés, il faudra que les dirigeants européens aillent au-delà de l'objectif fixé", veut croire Wendel Trio, directeur de CAN Europe. 

Avec AFP