logo

Première greffe presque totale de visage aux États-Unis

Une équipe de chirurgiens basée à Cleveland, dans l'Ohio, a réussi à greffer le visage d'une femme à 80 %. Cette opération sur le visage, délicate et controversée, a connu une première avec une greffe partielle réalisée en 2005 en France.

AFP - Les responsables de la clinique où a été réalisée une greffe presque totale de visage sur une patiente anonyme, pour la première fois aux Etats-Unis, s'apprêtaient à dévoiler mercredi des détails sur cette opération controversée.

Cette greffe, qui concerne 80% du visage, est considérée comme une première mondiale, selon la clinique de Cleveland (Ohio, nord) où s'est déroulée il y a quelques semaines l'opération qui n'a été révélée que mardi.     

La clinique a prévu une conférence de presse à 18H00 GMT sur la greffe, à propos de laquelle peu d'informations ont filtré. La patiente n'a pas souhaité révéler son identité.

Il s'agit de la quatrième greffe réussie du visage réalisée dans le monde, après deux en France et une en Chine.

Ces opérations sont controversées car elles comportent des risques vitaux pour les patients bien qu'elles soient réalisées davantage pour améliorer leur vie que pour des raisons impérieuses de santé.

Parmi les risques figurent la dégénérescence des tissus implantés et les complications dues aux médicaments anti-rejet que le patient est censé prendre toute sa vie.

Pour le docteur en bioéthique Arthur Caplan, interrogé par CNN, "c'est une chose de passer sa vie avec un visage terriblement défiguré, mutilé, blessé. C'en est une autre de le voir se transformer en expérience ratée".

"Personne n'espère avoir à affronter cette possibilité avec cette greffe de visage", a-t-il ajouté, laissant entendre qu'en cas d'échec, la patiente se retrouverait dans une situation de grande détresse.

"Elle serait alors presque incapable de manger ou boire et devrait être nourrie artificiellement", a-t-il souligné.

"Je pense qu'il ne faut pas hésiter à dire à la personne qui veut tenter cela: 'si vous vous retrouvez dans cette situation, nous sommes prêts à arrêter de vous donner le traitement qui vous maintient en vie ou à vous administrer suffisamment de morphine pour vous aider à mourir", a-t-il ajouté.

Carson Strong, professeur d'éthique au Collège de médecine de l'université du Tennessee (sud) partage ses inquiétudes sur les dangers potentiels liés au rejet d'une greffe.

"Un cas isolé, c'est purement anecdotique. Cela ne crée pas de base scientifique pour dire qu'un patient peut le faire sans danger", dit-il dans une interview au Washington Post.

Si l'opération échoue, "on peut alors raisonnablement considérer que le patient se trouve dans une situation bien pire qu'il ne l'était avant la tentative de greffe", souligne-t-il.

La première greffe partielle du visage a été réalisée en 2005 à Amiens en France, sur Isabelle Dinoire, 38 ans, qui avait été défigurée par son chien.

Aujourd'hui, trois ans plus tard, elle explique avoir "fait beaucoup de kiné pour réactiver tous les muscles" et que "tout est redevenu normal question sensibilité", affirmant en parlant de cette seconde peau: "c’est comme moi, comme ma peau".

En 2006, un berger chinois de 30 ans qui avait été attaqué par un ours a subi une greffe du visage incluant une connexion avec des veines et des artères, la réfection du nez, des sinus et des lèvres.

En 2007, un autre Français de 29 ans a subi également une greffe partielle après le retrait d'une tumeur faciale massive qui l'empêchait de se nourrir ou de parler normalement.

La clinique de Cleveland est le premier hôpital américain à avoir approuvé la procédure il y a quatre ans.

Le docteur Maria Siemionow, directrice de la recherche en chirurgie plastique dans cette clinique, a réalisé l'opération avec sept autres médecins, selon des responsables de l'hôpital.

Le docteur Siemionow s'était exercée longuement en pratiquant des greffes faciales et de membres sur des rats de laboratoire.