Le gouvernement français a détaillé jeudi son plan de relance économique de 100 milliards d'euros lors d'une conférence de presse. Le Premier ministre, Jean Castex, entend préparer la France de 2030 et aller au-delà du seul rebond de l'économie durement frappée par la crise provoquée par la pandémie de Covid-19, même si sa priorité reste l'emploi.
Pour relancer l'économie française, réindustrialiser le pays, créer des emplois et accélérer la transition écologique, le Premier ministre, Jean Castex, le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, la ministre du Travail, Élisabeth Borne, et le secrétaire d'État aux Affaires européennes, Clément Beaune, ont détaillé, jeudi 3 septembre, lors d'une conférence de presse, un plan à 100 milliards d'euros sur deux ans.
"C'est en proportion de la richesse nationale le plan le plus massif annoncé par les pays européens, a affirmé Jean Castex. C'est surtout le montant dont notre économie a besoin pour retrouver en 2022 son niveau d'avant la crise."
Autour de trois volets, ce plan, baptisé "France Relance", déploie des mesures tous azimuts en faveur de nombreux secteurs. Le Premier ministre espère ainsi créer 160 000 emplois en 2021.
Compétitivité — 35 milliards d'euros
- Baisse pérenne de 10 milliards d'euros des impôts de production (soit 20 milliards sur les deux ans du plan de relance), à travers notamment une réduction de moitié de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (soit 7 milliards) et la baisse de moitié des impôts fonciers pesant sur les sites industriels. Cette baisse des impôts de production bénéficiera à 42 % aux entreprises de taille intermédiaire (ETI), à 32 % aux PME et à 26 % aux grandes entreprises, selon le gouvernement.
- 3 milliards d'euros de soutien aux fonds propres des entreprises, par une garantie publique associée aux prêts participatifs accordés par les banques ou à des fonds qui seraient labellisés par l'État. Le gouvernement espère ainsi créer un effet de levier et mobiliser le secteur bancaire à hauteur de 10 à 15 milliards d'euros.
- L'État subventionnera à hauteur d'un milliard d'euros le développement industriel sur les territoires, soit 400 millions d'euros pour le dispositif existant des territoires d'industrie et 600 millions pour un appel à projet sur la relocalisation de productions en France.
- 11 milliards d'euros prévus dans le prochain Programme d'investissements d'avenir (PIA) seront fléchés vers le plan de relance et concerneront notamment des aides à l'innovation de Bpifrance.
- 385 millions d'euros seront alloués à la transition numérique des TPE et PME.
- Le gouvernement a également évoqué ces dernières semaines des aides à l'export et des simplifications administratives pour accélérer la reprise de l'activité.
#FranceRelance, c'est une ambition et une ampleur historique.
100 milliards, c’est quatre fois plus que le plan de relance de 2008.
C’est, en proportion de la richesse nationale, le plan de relance le plus massif annoncé à ce jour parmi les grands pays européens. pic.twitter.com/q1JaJoI3rl
Transition écologique — 30 milliards d'euros
Le plan #Francerelance est un pas de géant pour la transition écologique de la France. Par son ambition, par sa cohérence et par sa solidité, il nous fait basculer dans l’économie de demain, décarbonée et économe en ressources. pic.twitter.com/HvORZCAvMg
— Barbara Pompili (@barbarapompili) September 3, 2020- Les transports bénéficieront de 11 milliards d'euros, dont 4,7 milliards d'euros affectés à la SNCF afin de redévelopper le fret ferroviaire, en particulier la ligne Perpignan-Rungis, les petites lignes et deux lignes de trains de nuit. Le reste ira à un plan vélo et aux transports publics.
- Près de 7 milliards d'euros sont mobilisés pour la rénovation énergétique des bâtiments : 4 milliards pour les bâtiments publics (écoles, université, etc.) et 2 milliards pour les ménages avec la prime Maprimerénov', qui sera accessible à tous les ménages, sans plafond de revenus, à partir du 1er janvier 2021. Le gouvernement veut notamment viser les rénovations globales, plus efficaces en terme d'économie d'énergie, ainsi que les bailleurs et les copropriétés, là où les travaux sont les plus difficiles à déclencher.
- 9 milliards seront affectés à l'accompagnement des entreprises dans leur transition énergétique, notamment via la recherche et l'innovation, dont 2 milliards pour développer l'hydrogène "vert", c'est-à-dire non issu des hydrocarbures.
- Le développement d'une agriculture plus durable et d'une alimentation plus saine bénéficiera d'aides à hauteur de 1,2 milliard d'euros.
- 300 millions d'euros iront à l'accélération de la rénovation des réseaux d'eau, en particulier outre-mer.
Cohésion sociale et territoriale — 35 milliards d'euros
- Un plan pour l'emploi des jeunes, doté de 6,5 milliards d'euros déjà votés cet été, comprend notamment l'aide de 4 000 euros pour toute embauche d'un jeune de moins de 26 ans pour un contrat de trois mois minimum, les primes pour l'embauche de jeunes en alternance, les contrats d'insertion ou le service civique étendu.
- Un "bouclier antichômage" sera déployé à travers l'activité partielle de longue durée (6,6 milliards) et un renforcement des moyens du dispositif FNE-Formation, axé notamment sur les secteurs d'avenir (1 milliard).
- 5,2 milliards d'euros iront soutenir l'investissement des collectivités.
- Environ 6 milliards d'euros doivent aller au soutien à l'investissement des hôpitaux.
- Environ 500 millions d’euros sont prévus pour l’augmentation de 100 euros de l'allocation de rentrée scolaire.
- Le plan pauvreté et anti-exclusion sera doté de 200 millions d'euros supplémentaires.
- 350 millions iront financer la rénovation de ponts en danger sur les territoires.
"Plan néolibéral"
"Ce n'est pas un cadeau aux entreprises", a assuré Jean Castex pendant la présentation du plan. "C'est un cadeau à la France pour relancer l'économie et lutter contre le chômage."
L'absence de contreparties demandées aux entreprises est néanmoins au cœur des critiques, qui ont été virulentes dès jeudi matin.
Pour le Premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, "le plan de relance ne prépare pas le pays à l’avenir (…), mais Macron s’en sert pour dérouler son plan néolibéral", a-t-il lancé lors d’une interview à FranceInfo.
Le plan de relance ne prépare pas le pays à l’avenir. On aide les entreprises carbonées sans conditions écologique ni d’emploi, sans reconnaissance des 1ers de corvée. La crise du #COVID nous invite à changer de logiciel, mais Macron s’en sert pour dérouler son plan néo-libéral. pic.twitter.com/FWbWZn37d9
— Parti socialiste (@partisocialiste) September 3, 2020"Nous sommes inquiets concernant les 20 milliards de baisse d'impôts de production, qui auraient dû selon nous être liées à des contreparties sociales, écologiques, fiscales et de relocalisation, au moins pour les 100 premières grandes entreprises", a ainsi déclaré à Reuters Matthieu Orphelin, coprésident du groupe Écologie Démocratie Solidarité à l'Assemblée nationale et proche de l'ancien ministre Nicolas Hulot.
Avec AFP et Reuters