![Agnès Buzyn sur la défensive devant la commission d'enquête sur le coronavirus Agnès Buzyn sur la défensive devant la commission d'enquête sur le coronavirus](/data/posts/2022/07/25/1658747279_Agnes-Buzyn-sur-la-defensive-devant-la-commission-d-enquete-sur-le-coronavirus.jpg)
L'"anticipation" en France de l'épidémie de Covid-19 a été "sans commune mesure avec les autres pays européens" et "toujours en avance" par rapport aux alertes des organisations internationales, s'est défendue, mardi, l'ancienne ministre de la Santé Agnès Buzyn, devant la commission d'enquête de l'Assemblée nationale.
Durant la crise sanitaire provoquée par la pandémie de coronavirus, cette question a été posée par beaucoup de Français : le pays était-il préparé à faire face à une telle crise ? Il s'agit donc de l'une des questions qui seront posées, cette semaine, par la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la gestion de la crise du Covid-19.
Alors que quatre anciens ministres de la Santé vont être entendus par les députés au sujet de la possible impréparation de la France à la pandémie, c'est Agnès Buzyn qui a été auditionnée la première, mardi 30 juin.
Très attendue, après avoir quitté précipitamment son poste mi-février pour se lancer dans la course des municipales à Paris, Agnès Buzyn avait elle-même dit son impatience de s'exprimer sur ce dossier.
"Je n'ai à aucun moment sous-estimé le risque"
"Vous ne pouvez pas dire qu'on n'a pas été réactifs", s'est-elle défendue devant la commission d'enquête, tout en assurant que l'"anticipation" en France a été "sans commune mesure avec les autres pays européens" et "toujours en avance" par rapport aux alertes des organisations internationales face à l'épidémie de coronavirus.
La ministre a assuré avoir également demandé à Santé publique France "trois scénarios d'évolution de l'épidémie", demandé aux structures de recherche "un protocole de recherche" avec les médicaments déjà disponibles.
Deux jours avant son départ du ministère, le 16 février, le Centre européen de prévention et contrôle des maladies évaluait encore le risque pour la capacité des systèmes de santé européen comme "faible à modéré", a-t-elle souligné.
"Je n'ai à aucun moment sous-estimé le risque et j'ai préparé notre système de santé" avant de quitter le ministère, a-t-elle encore affirmé, ajoutant "assume(r) totalement les décisions prises par (ses) services et (son) ministère".
Agnès Buzyn a également dit qu'en quittant le ministère elle avait le sentiment d'avoir fait son "travail de préparation".
"J'estime que j'ai fait mon travail de préparation au ministère de la Santé. Tout le système est mis en préparation et en tension", a-t-elle déclaré aux députés.
"Arrêtez de dire que je n'ai rien vu, j'ai tout vu"
Dans une interview accordée au Monde le 16 mars, au lendemain du premier tour des municipales, elle avait provoqué une polémique en disant regretter la "mascarade" des élections municipales et fait part des doutes qui l'avaient assaillie au moment de se jeter dans la bataille, finalement perdue, pour la mairie de Paris.
"Quand j'ai quitté le ministère, je pleurais parce que je savais que la vague du tsunami était devant nous. Je suis partie en sachant que les élections [municipales] n'auraient pas lieu", déclarait-elle dans cet entretien.
"J'avais passé une journée épouvantable, j'étais fatiguée, on m'accusait sur les réseaux sociaux de ne rien avoir préparé, a-t-elle plaidé en réponse à une question sur cet entretien. C'est tout le contraire, je me suis battue durant un mois (...). Ce que je voulais dire, c'est 'arrêtez de dire que je n'ai rien vu', j'ai tout vu".
La question centrale du manque de masques
L'ancienne ministre a également été interrogée sur le manque de masques, qui aura fait couler beaucoup d'encre pendant le confinement, alors qu'un courrier de l'agence sanitaire Santé publique France recommandait en 2018 de reconstituer le stock de masques à hauteur d'un milliard d'unités.
Agnès Buzyn a expliqué avoir immédiatement demandé un état de lieux de tous les stocks d'équipements de protection, et notamment de masques, ainsi que du nombre de lits de réanimation et de respirateurs. Elle a assuré avoir lancé une première commande d'un million de masques FFP2, absents des stocks stratégiques d'État.
En avril 2010, ce stock se montait à 1 milliard de masques chirurgicaux et 700 millions de masques FFP2, plus protecteurs, a indiqué le 24 juin à la commission d'enquête Didier Houssin, directeur général de la Santé (DGS) de 2005 à 2011.
Mais début 2020, ce stock s'était réduit à 117 millions de masques chirurgicaux pour adultes, 40 millions de masques pédiatriques, et plus aucune réserve de FFP2.
"Cette gestion de stocks de masque de protection, elle ne revient pas au niveau du ministre. (…) La vigilance que je dois avoir, c'est sur des dizaines de produits", a-t-elle répliqué devant la commission.
"On ne peut pas me reprocher le 23 janvier, quand il n'y a pas d'épidémie en Europe, de dire aux Français qu'il ne faut pas porter de masque, alors qu'en plus, la doctrine des recommandations internationales dit que les masques sont pour les gens malades", a-t-elle insisté.
Commission d'enquête au Sénat
Mercredi, c'est Marisol Touraine (ministre de 2012 à 2017), qui sera interrogée par les membres de la commission, puis Roselyne Bachelot (2007-2010), avant que Xavier Bertrand (2005-2007 puis 2010-2012) ne ferme le bal jeudi.
En parallèle, le Sénat, dominé par l'opposition de droite, a voté à l'unanimité, mardi, la création d'une commission d'enquête sur la gestion de la crise sanitaire du coronavirus demandée par son président Gérard Larcher (LR).
Mise en place pour six mois, la commission aura un format élargi à 36 membres et entamera ses auditions dès juillet, alors que selon un bilan établi par l'AFP, à partir de sources officielles mardi, la pandémie a fait 29 813 morts en France.
Avec AFP et Reuters