Trois semaines après la présidentielle gabonaise remportée par Ali Bongo, fils du défunt président Omar Bongo et ex-ministre de l'Intérieur, l'opposant André Mba Obame a déposé un recours en annulation du scrutin pour "fraude massive".
AFP - Près de trois semaines après la présidentielle au Gabon remportée par Ali Bongo, l'ex-ministre de l'Intérieur, André Mba Obame, classé 2e, a déposé jeudi un recours en annulation du scrutin, "faussé" selon lui par une "fraude massive".
"Après une dizaine de jours d'investigation et d'analyse des opérations électorales, je suis parvenu à la conclusion incontestable que le scrutin (...) a été faussé par une fraude massive, orchestrée de manière experte par la Cénap (Commission électorale nationale autonome et permanente) au profit du candidat du PDG" (Parti démocratique gabonais), Ali Bongo, a déclaré à la presse M. Mba Obame.
"De manière préméditée, planifiée et organisée, les procès verbaux de plusieurs centaines de bureaux de vote ont été falsifiés avec la complicité des présidents des bureaux de vote", a affirmé le candidat qui a annoncé avoir déposé jeudi un recours en annulation du scrutin devant la Cour constitutionnelle.
Selon lui, "la constatation dans l'urne d'un nombre de lots d’enveloppes accolées supérieur au nombre d'émargements constitue une cause d'annulation totale ou partielle des élections".
Outre M. Mba Obame, trois autres candidats battus ont également annoncé avoir déposé un recours en annulation pour les mêmes motifs, et d'autres le feront d'ici la date limite fixée à samedi, a annoncé jeudi un Collectif de candidats, dont fait partie M. Mba Obame.
A compter de samedi, la Cour dispose d'un mois maximum pour statuer.
Selon les résultats officiels, Ali Bongo, fils du président Omar Bongo décédé en juin, a été élu avec 41,73% des voix, devant M. Mba Obame (25,88%) et l'opposant historique Pierre Mamboundou (25,22%), qui revendiquent depuis tous deux la victoire.
A l'annonce des résultats le 3 septembre, des émeutes avaient secoué Port-Gentil (ouest) pendant trois jours, faisant officiellement trois morts, au moins 15 selon l'opposition.
"La simple confrontation des procès verbaux et des listes d’émargement (...) est édifiante. Les présidents des bureaux de vote, nommés par la Cénap, ont systématiquement produit des faux en écriture publique au profit du candidat du PDG", a poursuivi M. Mba Obame, ministre de l'Intérieur de 2005 à juin 2009.
Il demande donc à la Cour Constitutionnelle de "remettre sur la table les 2815 procès verbaux, les 2815 fiches d'émargement et les 2815 feuilles de dépouillement qui seuls permettent d’établir la réalité de ce qui s’est passé".
M. Mba Obame, qui craint pour sa vie et se trouve depuis le 3 septembre dans "un lieu sûr", a par ailleurs dénoncé "une régression démocratique jamais observée jusqu’à ce jour", au Gabon.
Selon l'ancien ministre de l'Intérieur, "les forces de sécurité et de défense (...) procèdent à une répression systématique. Les arrestations arbitraires sont devenues légion au point de créer une véritable psychose dans le pays".
Le Collectif des candidats a également dénoncé les "atteintes aux libertés publiques", affirmant notamment que "plusieurs officiers des forces de défense dont un haut responsable du Conseil national de sécurité", ont été "mis récemment aux arrêts pour des raisons non élucidées".
"Lorsque s'installe un régime politique arbitraire et coercitif dans lequel tous les pouvoirs sont (...) concentrés entre les mains d'un seul homme et que les libertés individuelles ne sont plus garanties, nous devons alors constater que nous sommes en présence d'une dictature", a déclaré l'ancien ministre de l'Intérieur, en allusion à Ali Bongo, sans toutefois le citer nommément.