À deux semaines des élections anticipées, le chef des travaillistes britanniques Jeremy Corbyn est à nouveau accusé d’antisémitisme. L’attaque est venue, mardi, du grand rabbin Ephraïm Mirvis qui estime que le "poison" s’est enraciné au sein du Labour.
Ce n’est pas la première fois que Jeremy Corbyn est accusé d’antisémitisme. Mais cette fois, la charge est venue du grand rabbin Ephraïm Mivris lui-même. "La manière dont la direction [du Labour] a traité le racisme anti-juif est incompatible avec les valeurs britanniques dont nous sommes si fiers - celles de dignité et respect pour tous", a écrit le religieux dans une tribune publiée, mardi 26 novembre, par le quotidien The Times.
"Un nouveau poison - approuvé par le haut - s'est enraciné dans le Parti travailliste", a-t-il poursuivi. "Quand le 12 décembre arrivera, je demande à tout le monde de voter en conscience. N'en doutez pas, l'âme même de notre nation est en jeu", a-t-il ajouté, suggérant que Jeremy Corbyn était "inapte" à gouverner.
En pleine campagne électorale, l’accusation est un coup dur pour Jeremy Corbyn qui s’est défendu, assurant que le grand rabbin "avait tort". "Nous ne permettrons pas l'antisémitisme sous quelque forme que ce soit dans notre société, parce que c'est un poison qui divise, au même titre que l'islamophobie ou le racisme d'extrême droite", a insisté Jeremy Corbyn sur la BBC.
Une députée accuse le Labour d'être "institutionnellement antisémite"
Très inhabituelle, l'intervention du grand rabbin a été d'autant plus remarquée qu'elle est survenue le jour du lancement par le Labour de son programme spécial visant à renforcer la lutte contre les discriminations en cas de victoire. Un enjeu de taille alors que le chef du Labour est régulièrement accusé de complaisance envers certains membres de son parti ayant tenu des propos antisémites.
Le chef travailliste avait fini par reconnaître, en août 2018, que le parti connaissait un "réel problème" d'antisémitisme, qu'il avait été "trop lent" à infliger des sanctions disciplinaires dans des cas avérés, affirmant que sa priorité était de "restaurer la confiance" de la communauté juive.
Plusieurs voix se sont jointes à celle du grand rabbin, dont celles de l'archevêque de Canterbury Justin Welby, de la femme rabbin Julia Neuberger ou de la libérale-démocrate Luciana Berger. De confession juive, cette dernière avait claqué la porte du Labour en février, l'accusant d'être "institutionnellement antisémite". "J'ai quitté le @UKLabourcette année parce que je pouvais plus rester dans un parti qui trahit aujourd'hui les valeurs d'égalité et d'antiracisme pour lesquelles je l'avais rejoint hier", a-t-elle twitté.
I left @UKLabour earlier this year because I could no longer remain in a party which today betrays the very values - of equality and antiracism - that led me to join it in the first place.
— Luciana Berger (@lucianaberger) 25 novembre 2019Le vote des juifs britanniques peut faire la différence
À deux semaines des élections anticipées où toutes les voix comptent, cette nouvelle accusation pourrait coûter cher au Labour, qui reste distancé dans les sondages par les conservateurs du Premier ministre, Boris Johnson.
"Ces accusations contre Jeremy Corbyn ne sont pas nouvelles, ça fait trois ans qu’elles durent. Mais en choisissant ce timing, le grand rabbin tire la sonnette l’alarme pour la communauté juive britannique, en leur disant en substance que cet homme ne peut pas être un futur Premier ministre", explique Bénédicte Paviot, correspondante de France 24 à Londres.
"La communauté juive est très anxieuse", ajoute-t-elle. Forte de près de 300 000 personnes entre l’Angleterre et le Pays de Galle, le vote des juifs britanniques peut faire la différence. "Beaucoup disent déjà qu’ils ne voteront pas pour lui car ils estiment qu’il n’a pas agi assez vite pour éradiquer ce problème d’antisémitisme au sein du Labour", poursuit la journaliste de France 24 . À quatre reprises lors de l’interview de Jeremy Corbyn sur la BBC, le journaliste lui a demandé s’il allait présenter ses excuses. À chaque fois, le chef du Labour a refusé.