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Alors que le Grenelle des violences conjugales s'est achevé, le gouvernement compte améliorer l’accueil et la prise en charge des victimes par les services de police. Si des formations basées sur le volontariat existent déjà, elles sont parfois complétées par des ateliers obligatoires. Exemple dans les Yvelines. 

Près de deux mois après son lancement, le Grenelle des violences conjugales touchera à sa fin, lundi 25 novembre, jour de la journée mondiale contre les violences faites aux femmes.

Dans le cadre de ce grand dispositif de consultation, le gouvernement avait notamment prévu de réaliser un audit sur les "dysfonctionnements" en matière de recueil des plaintes dans les commissariats et gendarmeries. Une initiative soutenue par les associations féministes, à l’image du collectif féministe #Noustoutes.

Septembre : elle dépose une main courante contre son conjoint.
Octobre : elle porte plainte pour violences.
Novembre : son conjoint la tue. 131e féminicide.@CCastaner, @NBelloubet, des femmes meurent. L’État ne les protège pas. Réagissez.
Source : @feminicidesfr pic.twitter.com/T3l6LTIEUK

— Caroline De Haas (@carolinedehaas) November 11, 2019

Les agents de police pointés du doigt

Pour le collectif, la formation de tous les professionnels au contact des victimes fait partie des mesures “indispensables et urgentes” à mettre en place. En effet, face à ces appels à l’aide de victimes de violences conjugales, les forces de l'ordre sont régulièrement accusées de pécher par manque de moyens, de formation et d'information.

Malgré cette réputation, des formations sont mises en place pour que les victimes soient mieux reçues par les officiers de police généralistes. Dans le département des Yvelines (78), par exemple, les policiers peuvent participer à une formation sur la base du volontariat. Pendant six heures, des connaissances théoriques sur les violences faites aux femmes leur sont délivrées, notamment sur l’emprise mentale du conjoint et le stress post-traumatique. Cet atelier, qui existe depuis une dizaine d’années partout en France, complète ce que les policiers ont appris sur le sujet à l’École de police.

Depuis deux semaines, les policiers des Yvelines peuvent bénéficier d’une formation complémentaire, cette fois-ci obligatoire. Mise en place par le département, elle est centrée, d’après Fabienne Boulard, major de police et chef de la formation générale pour la police des Yvelines, jointe par France 24, sur la “sensibilisation à l'accueil et la prise en charge des victimes de violences”. Cette formation théorique de trois heures s’adresse seulement à trois types de policiers : les agents officiant à l’accueil, les policiers en police-secours et ceux qui recueillent les plaintes.

“Maladresse et oublis”

Fabienne Boulard, qui se déplace dans les commissariats des Yvelines pour animer ces ateliers, estime que cette formation est fondamentale. “On s’est rendus compte que des collègues commettent des maladresses et des oublis à l’accueil”, admet-elle. “Quand une personne vient déposer plainte, le policier doit recueillir des éléments. Il ne peut pas les connaître s’il ne pose pas les bonnes questions.”

Lorsqu’elles sont posées, elles le sont parfois de manière trop indélicate ou abrupte. “Si le policier pose ses questions simplement pour étayer le dossier, la victime peut le prendre mal compte tenu de son vécu et de sa situation”, explique Fabienne Boulard, qui explique ces comportements par “de la maladresse et non par une volonté de ne pas faire d’efforts pour comprendre les victimes”. Il s’agit alors de rappeler “les fondamentaux de la communication”, résume la policière qui cite par exemple le respect de la confidentialité et de la bonne foi de la victime.

Cet atelier passe aussi par des conseils pratiques donnés par Fabienne Boulard, devenue formatrice sur les violences conjugales “par conviction”, il y a plus de deux ans. “Il peut arriver qu’un policier à l’accueil du commissariat ne se sente pas bien, pour des raisons personnelles ou familiales. Si on ne se sent pas en capacité d’écoute, je conseille de passer le relais à un collègue”, précise-t-elle.

S’il est encore trop tôt pour établir un bilan, Fabienne Boulard constate que cette formation est bien accueillie par les policiers. “Même s’ils traînent parfois des pieds au début, ils sont contents quand ils sortent parce qu’ils en apprennent plus sur le sujet”, détaille-t-elle, en s’estimant “agréablement surprise”.

Pour mieux former les policiers à l’échelle nationale, Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur et Marlène Schiappa, secrétaire d'État chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes ont présenté vendredi 22 novembre une nouvelle grille de 23 questions destinée aux forces de l'ordre, afin qu'elles évaluent mieux les signaux d'alerte des victimes de violences conjugales lorsqu'elles viennent au commissariat ou en gendarmerie.

En France, selon un décompte de l’AFP, au moins 116 femmes ont été tuées par leurs conjoints ou ex depuis le début de l'année.