Une grande manifestation est prévue mercredi à Quito où le président équatorien Lenin Moreno a ordonné un couvre-feu nocturne autour des lieux de pouvoir, tandis que le gouvernement a été délocalisé sur fond de violences.
Sur ordre du président de l’Équateur Lenin Moreno, la liberté de circulation a été restreinte mardi 8 octobre entre 20 h et 5 h locales (entre 1 h et 10 h GMT le lendemain) autour des lieux de pouvoir à Quito. Ce couvre-feu fait suite à de nouveaux incidents au sixième jour de manifestations contre la hausse massive du prix de l’essence.
Lenin Moreno, qui avait déplacé lundi le siège du gouvernement à la capitale économique du petit pays sud-américain, Guayaquil (sud-ouest), avait déjà proclamé l'état d'urgence pendant 60 jours afin que les forces armées puissent rétablir l'ordre. Ce couvre-feu aura la même durée.
Des milliers de manifestants autochtones ont fait irruption dans la capitale, certains d'entre eux parvenant mardi après-midi à déjouer les dispositifs de sécurité pour pénétrer brièvement dans l'Assemblée nationale, agitant des drapeaux et scandant "Nous sommes le peuple !". À d'autres endroits de Quito, des manifestants équipés de masques et de bâtons se sont opposés aux forces de l'ordre, qui ont répliqué aux jets de pierres par des tirs de gaz lacrymogène.
Grande manifestation mercredi
De leur côté, des milliers d'indigènes et de paysans continuaient d'affluer vers Quito pour participer mercredi à une grande manifestation aux côtés des syndicats.
Lenin Moreno, libéral de 66 ans, a tendu la main aux indigènes en les invitant à dialoguer. Sa ministre de l'Intérieur, Maria Paula Romo, a ensuite annoncé que le gouvernement acceptait "une médiation des Nations unies et de la Conférence épiscopale" (Église catholique), déjà à pied d'œuvre auprès de leaders de la contestation.
Ce petit pays andin est secoué depuis début octobre par un mouvement social inédit depuis 2007, marqué par des blocages de routes et de puits pétroliers en Amazonie, des manifestations parfois violentes et des grèves. Les pertes de production de l'entreprise d'État Petroamazonas s'élevaient mardi à 165 000 barils par jour, soit 31 % des chiffres habituels.
Correa et Maduro accusés
Près de 600 personnes ont été arrêtées, ont indiqué les autorités, dont un parlementaire proche du prédécesseur de Moreno à la tête de l'État, le dirigeant socialiste Rafael Correa. Moreno a accusé Rafael Correa, son ancien mentor exilé de lui-même en Belgique, de chercher à fomenter un putsch avec l'aide du président vénézuélien Nicolas Maduro. Rafael Correa, interrogé par Reuters, a rejeté ces accusations, de même que Maduro lors d'une allocution télévisée depuis Caracas.
De son côté, la Confédération des nationalités indigènes de l'Équateur (Conaie), principale organe représentatif des peuples autochtones du pays, a pris ses distances avec l'ancien chef de l'État et les violences de lundi. La Conaie "prend ses distances avec la plateforme putschiste du corréisme (courant de l'ex-président), nous luttons pour la sortie de l'Équateur du FMI (Fonds monétaire international). Nous ne permettrons pas que ceux qui nous ont criminalisés durant 10 ans récupèrent notre lutte et celle du peuple équatorien", a écrit cet organisme sur Twitter. "Les actes de vandalisme signalés à proximité du (siège du) Contrôleur général et du Parlement n'ont rien à voir avec nos militants, notre lutte ne sera pas délégitimée", a ajouté la Conaie.
Le Brésil, l'Argentine, la Colombie et quatre autres pays latino-américains ont fait part mardi de leur "ferme soutien" au président Moreno. L'Organisation des États américains (OEA), l'Union européenne, les États-Unis et l'Espagne ont condamné les violences et appelé au dialogue.
Avec AFP et Reuters