
Emmanuel Macron est arrivé lundi à Belgrade pour "renouer des liens distendus" avec la Serbie. Dans un discours prononcé en partie dans la langue nationale, il a appelé les Serbes à "chercher le bon compromis" avec le Kosovo.
C’est la première visite d'un président français en Serbie depuis celle de Jacques Chirac en 2001, dans des Balkans où la France est restée peu présente. Emmanuel Macron est en visite lundi 15 et mardi 16 juillet à Belgrade avec l'objectif, selon Paris, de "renouer des liens distendus" avec la Serbie, après plusieurs accrocs ces dernières années.
Le président français a débuté cette opération séduction en prononçant en partie dans leur langue un discours devant des milliers de Serbes, dans le parc Kalemegdan, devant un monument dédié à l'amitié franco-serbe, fondée sur le Front d'Orient pendant la Première Guerre mondiale. Un corps expéditionnaire français était allé au secours de l'armée serbe et Français et Serbes avaient combattu ensemble.
Cette amitié a été récemment mise à mal, avec notamment un impair du protocole français, qui avait placé le président serbe Aleksandar Vucic dans une tribune secondaire au cours des cérémonies du centenaire de l'Armistice, le 11 novembre 2018. Hashim Thaçi, le président du Kosovo, une ex-province serbe dont Belgrade ne reconnaît pas l'indépendance, avait été placé dans la tribune principale, avec Emmanuel Macron, Donald Trump ou encore Vladimir Poutine. Ceci avait provoqué la colère de très nombreux Serbes et le monument à l'amitié franco-serbe avait été vandalisé.
"Merci de votre exceptionnel accueil"
"Merci de votre exceptionnel accueil", a dit en serbe le président français, devant une foule surprise et ravie, de laquelle s'élevaient épisodiquement des "Vive la France !" "Vous montrez ainsi que le message écrit sur ce monument, 'Aimons la France comme elle nous a aimés', vit toujours, 100 ans plus tard", a-t-il poursuivi. "C'est à mon tour de vous dire au nom de mon pays : la France vous aime comme vous l'avez aimée", a-t-il dit sous le regard d'Aleksandar Vucic.
L'un des thèmes principaux devrait être celui des relations avec le Kosovo, ex-province serbe à majorité albanaise devenue indépendante en 2008, sans que Belgrade ni Moscou ne reconnaissent cette souveraineté. Les tensions se sont accrues avec l'application par le Kosovo fin 2018 de droits de douanes de 100 % sur les produits serbes.
Le dialogue sur la normalisation des relations Serbie-Kosovo, mené sous l'égide de l'Union européenne, est ainsi bloqué depuis des mois.
La possibilité de tenter de régler le conflit par un échange de territoires reste en suspens. Paris y est ouvert, au contraire de Berlin qui craint de rouvrir la boîte de Pandore des nationalismes.
Il faut "être courageux" et "chercher le bon compromis" avec les Kosovars albanais, a lancé à la foule Emmanuel Macron, en français cette fois.

Loupé du protocole français
Autre sujet délicat, la demande d'adhésion de la Serbie à l'UE, sur laquelle Paris reste prudent. "Le président de la République soutient la perspective européenne des Balkans, mais a dit également que cette adhésion aurait lieu quand l'UE se sera préalablement reformée, ce qui est très bien compris par les Serbes", selon l'Élysée, pour qui l'UE, ralentie par son difficile fonctionnement à 28, n'est actuellement pas en capacité d'absorber un nouvel élargissement.
Autre différend, le refus opposé en avril 2017 par la justice française de livrer Ramush Haradinaj, actuel Premier ministre du Kosovo, réclamé par la justice serbe qui l'accuse de crimes de guerre durant le conflit du Kosovo.
Présence chinoise
Ce désamour s'accompagne d'une faiblesse des liens économiques, même si Vinci a récemment remporté la concession de l'aéroport de Belgrade et qu'Alstom reste en lice pour le projet de métro de Belgrade. Mais le groupe français, dont les dirigeants feront partie de la délégation française, est désormais en concurrence avec un consortium chinois.
Les Balkans sont une pièce importante des "Nouvelles routes de la Soie", méga-projet de la Chine pour développer sa puissance économique mondiale. Depuis six ans, les Chinois se montrent actifs, proposant des prêts à faible taux d'intérêt et rivalisant avec les entreprises européennes. Entre 2007 et 2017, Pékin a annoncé un total de 12 milliards d'euros de prêts dans les pays de la région, dont un tiers pour la Serbie.
Avec AFP