Accusé d'agressions sexuelles sur de jeunes scouts de la région lyonnaise avant 1991, le père Bernard Preynat, à l'origine de l'affaire Barbarin, a été condamné, jeudi, à un "renvoi de l'état clérical", par un tribunal ecclésiastique.
C'est la peine la plus lourde que peut infliger l'Église. Le père Bernard Preynat ne fait plus partie du clergé catholique. Le prêtre, dont les abus sexuels sur de jeunes scouts ont par effet de ricochet déclenché l'affaire du cardinal Barbarin, a été défroqué, jeudi 4 juillet, par un tribunal ecclésiastique.
"Le tribunal a décidé de lui appliquer la peine maximale prévue par le droit de l'Église dans un tel cas, à savoir le renvoi de l'état clérical", précise la juridiction ecclésiastique dans un communiqué. La Conférence des évêques de France a fait savoir, de son côté, qu'elle "tenait à ce que cet acte judiciaire de l'Église soit largement connu", sans pour autant le commenter.
Bernard Preynat dispose désormais d'un mois pour interjeter un appel qui serait suspensif.
"Son statut de prêtre a participé à la manipulation des victimes"
Pour François Devaux, cofondateur de l'association de victimes La parole libérée, l'Église a été "contrainte d'arriver à la décision qu'ils auraient toujours dû prendre pour Preynat comme pour beaucoup d'autres".
À Lyon, l'évêque auxiliaire Emmanuel Gobilliard fait remarquer à l'AFP que "c'est la première fois qu'un tribunal déclare Bernard Preynat coupable sur les faits".
"Le tribunal a certainement pris en compte les circonstances aggravantes de Bernard Preynat, mettant en lumière le fait que son statut de prêtre ait participé à la manipulation des victimes, et que ce statut a un impact dans les corps, les cœurs et l'esprit des victimes de ces faits", a-t-il ajouté.
Le père Preynat, 74 ans, a été interdit de tout ministère pastoral en 2015 mais il pouvait encore célébrer des messes en privé. Capacité qui lui a été retirée en mars 2018 par l'archevêché de Lyon. Son cas est aux sources de la retentissante affaire qui a éclaboussé l'Église de France et conduit à libérer la parole sur les affaires de pédophilie.
Quid de l'indemnisation des victimes?
Tout a commencé fin 2015, avec des plaintes déposées par d'anciens scouts contre Bernard Preynat. Rapidement des victimes se sont regroupées dans une association, La parole libérée, qui a contribué à "briser l'omerta".
Début 2016, Bernard Preynat, qui a reconnu les faits, a été mis en examen pour agressions sexuelles sur plusieurs jeunes scouts mais de nombreux cas sont prescrits.
Très vite, l'affaire Preynat est devenue l'affaire Barbarin. Fragilisé pour ne pas avoir informé la justice et pour avoir maintenu le prêtre au sein du diocèse de Lyon jusqu'en 2015, l'emblématique cardinal de Lyon a été poursuivi et condamné en mars à six mois de prison avec sursis.
Tout en clamant son innocence, le cardinal Philippe Barbarin a présenté sa démission au pape, qui l'a refusée en attendant son procès en appel, prévu le 28 novembre.
Face à ce scandale, le Vatican comme l'Église de France ont pris une série de mesures pour lutter contre la pédophilie.
La culpabilité du père Preynat étant reconnue par l'Église, le tribunal ecclésiastique a indiqué qu'il pourrait "désormais se consacrer plus entièrement à l'étude de chacune des demandes de réparation financière" déjà émises par une vingtaine de victimes.
Le procès canonique du père Preynat, initialement conduit sous procédure "administrative" avait été commué en septembre en procès canonique "judiciaire", afin de permettre d'éventuelles réparations.
Faisant un comparatif avec des précédents en Suisse, François Devaux estime que les demandes pourraient s'élever à "20 000 euros" par victime, en moyenne. Les sources au diocèse contactées par l'AFP n'étaient pas en mesure de préciser qui paierait la facture.
Avec AFP