Plus d’un million de personnes ont manifesté dimanche dans les rues de Hong Kong pour protester contre un projet de loi d’extradition qui faciliterait le transfert de suspects en Chine pour y être jugés.
Pour la police hongkongaise, il s’agirait de la plus grande manifestation dans la ville depuis quinze ans. Selon les organisateurs, plus de un million [1,03 million] de manifestants ont défilé dans les rues de Hong Kong dimanche 9 juin pendant sept heures, pour une manifestation contre le projet de loi qui permettrait de transférer des suspects en Chine continentale pour les traduire devant des tribunaux chinois.
Selon ces chiffres, la mobilisation serait deux fois plus forte que lors du mouvement de 2003 contre un projet de loi anti-subversion qui avait contraint l'exécutif local à reculer. Un demi-million de personnes étaient alors descendues dans les rues.
Un porte-parole de la police , qui traditionnellement donne des chiffres de participation nettement inférieurs à ceux des organisateurs, a contesté ce chiffre, parlant de 240 000 protestataires "au plus fort de la manifestation". La police avait mobilisé plus de 2 000 agents pour encadrer la foule, bon enfant, qui a marché par une température de 32° C.
À 15h, heure locale, plusieurs dizaines de milliers de personnes se sont rassemblées devant le parc Victoria pour se diriger vers le Conseil législatif (LegCo) de Hong Kong, où le projet de loi doit être débattu à partir de mercredi. Les rangs ont grossi au fur et à mesure pour atteindre plusieurs centaines de milliers de manifestants.
Les participants ont scandé "Pas d'extradition vers la Chine, pas de loi maléfique !", et d'autres ont réclamé la démission de Carrie Lam, la dirigeante de l'exécutif hongkongais.
L'opposition au projet de loi rassemble un large front de la société hongkongaise, allant des hommes d'affaires aux avocats en passant par les étudiants, les partisans de la démocratisation et les communautés religieuses. De nombreux manifestants ont dit ne plus croire aux engagements de l'exécutif hongkongais de ne pas envoyer sur le continent les personnes critiques à l'égard du pouvoir chinois.
Un système judiciaire distinct
Les changements en perspective sur la question des extraditions visent à simplifier les procédures permettant d'envoyer des suspects vers des pays ou territoires tiers comme la Chine continentale, Macao et Taïwan, en plus des vingt pays avec lesquels Hong Kong dispose déjà de conventions d'extradition.
Mais c'est la perspective d'extraditions vers la République populaire de Chine qui alarme autant de monde à Hong Kong. L'ancienne colonie britannique a été rétrocédée à la Chine en 1997, mais avec des garanties sur son autonomie et les libertés, notamment celle de disposer d'un système judiciaire distinct.
Selon ses détracteurs, le projet de loi d'extradition, porté par les autorités hongkongaises pro-Pékin, mettrait la population à la merci d'un système judiciaire chinois opaque et politisé. Il a suscité des critiques des juristes, des milieux financiers et de diplomates occidentaux inquiets pour leurs ressortissants qui y résident.
Que ce soit dans le monde des affaires, au sein des communautés religieuses ou dans des organisations de la société civile, on conteste fortement l'équité et la transparence du système judiciaire chinois.
Avec Reuters