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Harare voit Londres derrière l'épidémie de choléra

Après avoir affirmé, vendredi, être parvenu à contenir l'épidémie de choléra, le gouvernement zimbabwéen a accusé l'ancienne puissance coloniale britannique d'être responsable d'une "attaque génocidaire" qui a fait près de 800 morts.

AFP - Le Zimbabwe a rejeté vendredi sur l'ancienne puissance coloniale britannique la responsabilité de l'épidémie de choléra, l'accusant de mener une "attaque génocidaire" par le biais de cette maladie qui a fait près de 800 morts dans le pays.

"Le choléra est une attaque raciste et planifiée sur le Zimbabwe par l'ancien colonisateur obstiné qui a enrôlé ses alliés américains et de l'Ouest pour qu'ils puissent envahir le pays", a soutenu devant la presse le ministre de l'Information Sikhanyiso Ndlovu.

"L'épidémie de choléra au Zimbabwe est une force de guerre biologique et chimique, une attaque génocidaire sur le peuple du Zimbabwe par les Britanniques", a-t-il affirmé à Harare.

"C'est un génocide de notre peuple, c'était une guerre calculée qui aurait dû avoir lieu en juin dernier", a-t-il encore dit, s'en prenant une fois de plus à l'Occident qu'il suspecte de planifier une invasion militaire, après les appels de Londres, Washington et Paris réclamant le départ du président Robert Mugabe.

Le régime zimbabwéen accuse régulièrement l'Ouest, et en particulier la Grande-Bretagne, d'être à l'origine de l'effondrement économique du pays en imposant des sanctions, pourtant limitées aux proches du président Mugabe.

Depuis la semaine dernière, le gouvernement a multiplié les déclarations contradictoires sur l'épidémie de choléra.

Il a dans un premier décrété l'"urgence nationale" et appelé à l'aide avant de se rétracter quelques jours plus tard, affirmant que l'épidémie était "sous contrôle" alors que la maladie ne cesse de se propager, selon des organisations internationales.

Nouveau coup d'éclat jeudi: le chef de l'Etat a déclaré la fin de l'épidémie, provoquant un tollé au sein de la communauté internationale.

L'évêque anglican sud-africain de Pretoria, Joe Seoka, en est même venu à qualifier le chef de l'Etat de "Hitler du 21e siècle". "Soit M. Mugabe est méchant, soit il est réellement en dehors de la réalité", a renchéri l'opposition zimbabwéenne.

Vendredi, le porte-parole du président, George Charamba, a fait marche arrière en affirmant que les propos de M. Mugabe relevaient du "sarcasme" et que le Zimbabwe réclamait toujours l'aide extérieure pour lutter contre le choléra.

Car l'épidémie est loin d'être sous contrôle, selon les organisations internationales. Un dernier bilan de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) publié vendredi fait état de 792 morts depuis août et 16.700 cas de choléra.

Médecins sans frontières (MSF) estime même qu'elle pourrait durer encore des mois en pleine saison des pluies, en particulier à Harare où se concentre la moitié des cas.

La maladie, transmise par les eaux usées, se propage également en Afrique du Sud voisine où 11 personnes sont décédées depuis mi-novembre, a précisé l'OMS, estimant que 60.000 personnes pourraient contracter le choléra ces prochaines semaines.

L'ampleur de l'épidémie révèle le délabrement au Zimbabwe du système de santé et des réseaux d'eau et d'assainissement, lié à l'effondrement de l'économie.

Depuis huit ans, l'ancien grenier à céréales de la région s'enfonce dans un marasme économique sans précédent qui se caractérise aujourd'hui par une hyperinflation délirante à 231 millions % et une production au point mort, conduisant des millions de Zimbabwéens au bord de la famine.

Cette crise se double d'une paralysie politique depuis la réélection contestée fin juin de M. Mugabe, à la tête de l'Etat depuis l'indépendance de l'ex-Rhodésie du Sud en 1980. Le régime et l'opposition échouent à s'entendre sur la formation d'un gouvernement d'union, malgré un accord conclu en septembre et de nombreuses tentatives de médiation.

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a demandé vendredi au président Mugabe, 84 ans, "de se tourner vers l'avenir" de son pays et d'honorer ses engagements pour un partage du pouvoir.