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Coup de Maitre en Somalie

, envoyé spéciale à Perpignan – Spécialiste de l’Afrique, Pascal Maitre expose à Perpignan le fruit de six ans de pérégrinations en Somalie : un pays "abandonné de tous", qui se trouve dans un état critique et dont le photographe dresse un portrait multiforme.

Au Festival Visa pour l’Image, Pascal Maitre est en famille. Photographe depuis plus de trente ans, il expose son

travail à Perpignan pour la sixième fois. Touché par l’Afrique dès sa première mission en 1979, pour le magazine 'Jeune Afrique' , il en a parcouru plus de quarante pays. Cette année, il présente "La Somalie : pays abandonné de tous", un projet initié par des commandes de 'Geo Allemagne' et de 'National Geographic' .

Il n’y a pas de fil rouge dans cette exposition, tant il est difficile de construire un récit narratif dans un pays où les restrictions et les dangers sont nombreux. "Là-bas, on travaille sous protection armée, sinon on est enlevé dans les cinq minutes. On ne fait que ce que l’on peut faire", explique-t-il. Le reportage s’est donc construit au fil de différents voyages de quelques jours seulement, effectués entre 2002 et 2008 à Mogadiscio et dans sa région, avec une incursion dans le Somaliland.

Le visiteur est guidé par les couleurs éclatantes des tirages, qui le promènent des ruines de la zone verte de Mogadiscio aux côtes polluées de la Somalie. Conflits, éducation et environnement sont abordés pour décrypter ce pays et ses habitants que Pascal Maitre regrette de "laisser derrière" quand le temps du reportage est fini. Visite guidée avec le maître.


 
"Cette photo a été prise dans la zone verte, ligne de front qui séparait le nord et le sud de Mogadiscio, en partie détruite au début de la guerre en 1991-1992. Cela permet de voir que la capitale était une ville, d’une part importante, mais avec surtout un véritable cachet. Avec cette architecture coloniale italienne et arabe de la côte swahili, c’était magnifique. Maintenant, il ne reste que des ruines. Ce coin est totalement abandonné."



"Nous sommes dans le plus gros hôpital au sud de Mogadiscio, soutenu par la Croix rouge internationale et qui fournit les médicaments et le matériel. Après avoir rencontré le directeur qui m’a laissé y passer une journée pour prendre des photos, je suis tombé sur cet homme en soin. Il a été brûlé en manipulant une bombonne d’essence. Comme il n’y pas de stations service, les accidents domestiques sont réguliers."



"C’est la cathédrale de Mogadiscio, où le cardinal italien Msg Colombo a été tué en 1989. En 2002, elle était très difficile d’accès car il y avait trois ou quatre groupes de miliciens qui tenaient chacun une zone. Pour y aller, il fallait avoir l’autorisation de chaque groupe. Ils s’installaient là et rackettaient un peu les gens. C’était leur territoire. Mais aujourd’hui ça a changé, les trois quarts de la ville sont tenus par des islamistes - les Shebab entre autres. Une petite partie est aux mains du Transitional Federal Government (ou TFG), aidé par l’Occident. Le reste est tenu par les forces africaines qui sécurisent l’aéroport, le port et le quartier Villa Somalia, où vit l'actuel président."



"C’est un groupe de miliciens avec lequel j’ai voyagé sur la route de la côte. Il n’y avait presque plus d’eau… C’est la situation qui fait la photo. C’est surréaliste, cette veste de costume et cette bombonne… Une ONG somalienne m’avait mis en contact avec eux pour m’accompagner sur la route des déchets toxiques - l’une des raisons qui a poussé les pêcheurs à devenir pirates. Au départ, ils ont braqué des chalutiers pour qu’ils arrêtent de piller les fonds marins. Puis, ils ont réalisé que les gens étaient prêts à payer pour récupérer leur bateau. Et la deuxième raison de leur colère a été ces déchets jetés à la mer par des cargos occidentaux."