À l'appel du leader kurde emprisonné Abdullah Öcalan, des milliers de prisonniers kurdes ont mis fin, dimanche, à la grève de la faim qu'ils menaient pour protester contre les conditions de détention du cofondateur du PKK.
Des prisonniers en Turquie ont annoncé dimanche avoir mis un terme à une grève de la faim suivie par plusieurs milliers d'entre eux pour protester contre les conditions de détention du leader kurde Abdullah Öcalan, après un appel de ce dernier en ce sens.
Des avocats d'Abdullah Öcalan, l'un des fondateurs du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), une organisation classée "terroriste" par Ankara et ses alliés occidentaux, avaient transmis un peu plus tôt dimanche un message de leur client appelant à la fin du mouvement, dont "l'objectif (...) a été atteint".
L'interdiction faite à Abdullah Öcalan de voir ses avocats depuis 2011 a en effet été levée la semaine dernière, et il a pu s'entretenir avec eux deux fois ce mois-ci.
"Votre objectif en ce qui me concerne a été atteint et je voudrais vous présenter toute mon affection et ma gratitude", a déclaré le leader kurde selon un texte lu à Istanbul par son avocate, Nevroz Uysal.
Selon le parti prokurde HDP, quelque 3 000 prisonniers ont rejoint ces derniers mois le mouvement initié par la députée prokurde Leyla Güven, qui refusait de s'alimenter depuis novembre dernier pour protester contre l'isolement imposé à Abdullah Öcalan.
Leur représentant, Deniz Kaya, a annoncé dans un communiqué la fin de leur mouvement "à l'appel" d'Abdullah Öcalan. Leyla Güven a suivi peu après.
"Si seulement on avait gagné sans subir de pertes", a-t-elle toutefois déploré, faisant allusion aux huit prisonniers qui se sont suicidés depuis le début du mouvement.
Parlant à des journalistes à Diyarbakir (sud-est), avant d'être amenée à l'hôpital pour un contrôle, elle a salué "une victoire de la démocratie turque", jugeant "très important pour la démocratisation de la Turquie et la paix au Moyen-Orient que la voix de M. Öcalan" puisse être entendue.
Malgré son isolement, Abdullah Öcalan reste en effet une figure essentielle pour la rébellion kurde en Turquie, où le conflit entre l'État et le PKK a fait plus de 40 000 morts depuis 1984, mais aussi dans la région.
"Rôle positif" en Syrie
Deux de ses avocats ont pu rendre visite à Abdullah Öcalan une première fois le 2 mai sur l'île-prison d'Imrali où il est détenu dans la mer de Marmara, puis une nouvelle fois mercredi après la levée formelle de l'interdiction la semaine dernière.
Selon Me Uysal, le leader kurde a souligné que la levée de l'interdiction de voir ses avocats ne signifiait pas pour autant le lancement d'un "processus de négociations" avec le gouvernement, comme celui entamé en 2013 mais qui s'est effondré en 2015.
Estimant que "la Turquie a fondamentalement besoin (...) de négociations démocratiques et d'une paix honorable", Abdullah Öcalan a dit que la réaction des autorités serait claire "dans 30 ou 40 jours", a poursuivi son avocate, sans plus de détails.
Lors de la visite de ses avocats le 2 mai, M. Öcalan avait également appelé à "prendre en considération" les "sensibilités" de la Turquie en Syrie, où une milice kurde syrienne liée au PKK contrôle de vastes territoires dans le nord du pays, au grand dam d'Ankara qui se dit déterminé à l'en chasser pour éviter la création d'une entité kurde à ses frontières.
Me Uysal a affirmé que lors de leur rencontre cette semaine, M. Öcalan a réitéré sa position sur le sujet et déclaré que "si l'opportunité lui est donnée, il jouerait un rôle positif" en Syrie.
L'autorisation accordée aux avocats de rendre visite à M. Öcalan survient également au moment où le parti au pouvoir, l'AKP, s'efforce de séduire les électeurs à Istanbul en vue de l'élection municipale prévue le 23 juin, après l'annulation du scrutin remporté par l'opposition fin mars.
Or de nombreux observateurs avaient estimé que le vote des Kurdes y avait été déterminant, le HDP ayant préféré soutenir le principal candidat de l'opposition, Ekrem Imamoglu, plutôt que de présenter son propre candidat.
Avec AFP