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Au Soudan, les discussions sur le transfert du pouvoir vont se poursuivre

Après la destitution du président el-Béchir par l’armée, un chef de l’Alliance pour la liberté et le changement a annoncé que les discussions entre les dirigeants militaires et les leaders de la contestation au Soudan allaient se poursuivre.

Dix jours après la destitution du président Omar el-Béchir par l’armée, les discussions entre les dirigeants militaires et les leaders de la contestation au Soudan sur un transfert du pouvoir à une autorité civile vont se poursuivre. C’est ce qu’a annoncé, samedi 20   avril, Siddiq Youssef, un chef de l'Alliance pour la liberté et le changement (ALC).

"Nous avons clarifié notre demande principale, qui est le transfert du pouvoir à des autorités civiles", a-t-il expliqué à la télévision publique, à l'issue d'une rencontre avec le Conseil militaire de transition au pouvoir.

Pour un transfert pacifique

Le transfert du pouvoir à des autorités civiles est la principale revendication du mouvement populaire, a expliqué Siddiq Youssef. "Nous avons convenu de poursuivre les négociations pour parvenir à une solution qui satisfasse les deux parties, de façon que le transfert du pouvoir se déroule de façon pacifique." L'ALC regroupe en effet plusieurs partis politiques et groupes de la société civile qui mènent la contestation.

La rencontre du samedi 20 avril a eu lieu à la veille de l'annonce, prévue par le mouvement de contestation, de la formation d'un "Conseil civil chargé des affaires du pays". Celui-ci aurait pour but de remplacer le Conseil militaire de transition, au pouvoir depuis le renversement, le 11 avril , du président Omar el-Béchir sous la pression de la rue.

Cinq représentants de l'Alliance et des membres du Conseil militaire se sont réunis "pour discuter du transfert de pouvoir à une autorité civile", a précisé Ahmed al-Rabia, un responsable de l'Association des professionnels soudanais (SPA), groupe en première ligne de la contestation qui secoue le Soudan depuis le 19 décembre.

Les leaders de la contestation ne laisseront passer aucune résistance. Si les dirigeants militaires refusent de remettre le pouvoir, les manifestants annonceront dimanche un "Conseil civil souverain", a-t-il expliqué avant la réunion, ajoutant que, "s'ils souhaitent négocier, l'annonce prévue pour demain pourrait être alors reportée."

Un calendrier pour le transfert

Afin que "les choses ne traînent pas", l'Association des professionnels soudanais (et plus largement, les leaders de la contestation) déclarent réclamer [au Conseil] "un calendrier pour le transfert du pouvoir", a répété Ahmed al-Rabia. Ce dernier a en outre révélé que depuis le renversement du président el-Béchir, le Conseil militaire avait tenu deux séries de discussions avec les leaders de la contestation.

"Durant ces pourparlers, nous avons senti que le Conseil militaire ne souhaitait pas remettre le pouvoir", a-t-il expliqué, ajoutant que la pression croissante de la rue et de la communauté internationale devrait pousser le Conseil militaire à remettre le pouvoir d'ici à "deux ou trois semaines".

Un pouvoir "débarrassé du pouvoir militaire"

Vendredi, la SPA avait annoncé que "les noms des membres d'un Conseil civil chargé des affaires du pays seraient annoncés lors d'une conférence de presse dimanche à 19h" devant le QG de l'armée, dans le centre de la capitale Khartoum.

Selon des responsables, ce Conseil civil sera chargé de former un gouvernement de transition dont le mandat durera quatre ans et sera suivi d'élections.

"Tout ce que nous espérons c'est que le pays soit gouverné par des civils et qu'il soit débarrassé du pouvoir militaire", affirmait samedi un manifestant devant le QG de l'armée où de nombreux Soudanais campent, en dansant et en chantant des airs révolutionnaires

Une tâche "difficile"

Galvanisés par les concessions obtenues avec le départ de Béchir et d'autres responsables militaires, les protestataires apparaissent plus déterminés que jamais et maintiennent la pression sur le Conseil militaire de transition.

Sur la constitution d'un Conseil civil, en revanche, les dirigeants de la contestation sont confrontés à une tâche "difficile", souligne le journaliste soudanais Khalid Tijani.

Sur le plan judiciaire, le nouveau Procureur général soudanais a levé, samedi 20 avril, l'immunité de plusieurs membres des services de sécurité soupçonnés d'être impliqués dans la mort d'un détenu, arrêté en raison de ses liens avec les manifestations qui secouent le pays depuis quatre mois.

Les États-Unis, qui maintiennent le Soudan sur leur liste noire des "États soutenant le terrorisme", ont appelé les dirigeants militaires à une transition répondant aux vœux des Soudanais. La responsable du département d'État chargée de l'Afrique de l'Est, Makila James, "se rendra au Soudan ce week-end", a annoncé jeudi un haut responsable américain.

Arrivé au pouvoir par un coup d'État soutenu par les islamistes le 30 juin 1989, Omar el-Béchir a dirigé d'une main de fer un pays en proie à des rébellions dans plusieurs régions et est accusé de violations des droits humains.

Renversé le 11 avril par l'armée, il a été arrêté, et est actuellement détenu dans une prison de Khartoum.