Bourses européennes stables, livre sterling en hausse : les marchés financiers ont réagi avec sérénité au lendemain de la défaite historique au Parlement de la Première ministre britannique Theresa May. Étonnant ? Pas tant que ça.
Le malheur des uns fait l'indifférence, voire le bonheur des autres. La défaite historique de la Première ministre Theresa May devant le Parlement au sujet de son accord sur le Brexit n'a pas ému les marchés financiers européens, mercredi 16 janvier.
Une telle débâcle, qui jette le flou sur l'avenir du processus de sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, aurait pourtant de quoi déstabiliser n'importe quelle Bourse. Mais de Paris à Francfort ou Londres, les principaux indices étaient stables. Le CAC 40 enregistrait même une légère progression. Comme si de rien n'était.
Un Brexit "plus soft" à la clef ?
"Il faut croire que le résultat du vote était dans une très large mesure attendu", a expliqué Stéphane Déo, stratège à la Banque postale, interrogé par Reuters. Les investisseurs ayant anticipé le rejet du texte par les députés britanniques, ils ont pu arbitrer en amont sans être pris au dépourvu, ce qui expliquerait qu'il n'y pas de coup de chaud boursier.
Plus étonnant peut-être reste la bonne tenue de la livre sterling. "Généralement, la monnaie est le premier instrument financier à pâtir en cas de trouble politique et la plupart des analystes avaient prédit que la défaite [de Theresa May] serait un coup dur pour la livre sterling", explique la chaîne de télévision britannique.
Raté : la monnaie britannique ne pointait pas seulement à la hausse par rapport aux autres principales devises, elle était, mercredi à la mi-journée, à son plus haut niveau face à l'euro depuis novembre dernier, note la BBC.
En réalité, l'issue du vote semble avoir été interprétée comme une bonne nouvelle par les investisseurs sur le marché des devises. "Ce qui devient de plus en plus clair à l'issue de ce vote, c'est que le risque d'un Brexit sans accord diminue rapidement. Il existe un large consensus sur le fait que ce scénario doit être évité à tout prix", explique Charles Saint-Arnaud, investisseur pour le groupe bancaire Lombard Odier, interrogé par Reuters.
Du Big Short au Brexit
Ces optimistes jugent que la prochaine étape pour le Royaume-Uni consiste dorénavant à obtenir de l'Union européenne un report de la date de sortie. Ils voient ainsi le risque d'une sortie désordonnée et sans accord s'éloigner et espèrent qu'un tel répit offrent aux divers protagonistes du Brexit le temps d'arriver à un texte plus satisfaisant pour tous.
Mais tous les financiers ne partagent pas cette foi dans la capacité des politiques à débloquer la situation. L'un des plus célèbres d'entre eux, Steve Eisman, a décidé de parier sur la chute des cours de plusieurs banques britanniques. L'homme, interprété par l'acteur Steve Carell dans le film sur la crise des subprimes The Big Short, est connu pour avoir été l'un des rares à avoir anticipé la crise de 2008. "Mon analyse est que les gens sous-estime généralement le risque des événements lorsqu'ils sont trop catastrophiques", a-t-il affirmé à la chaîne BBC. Et pour lui, le Brexit entre dans cette catégorie quel que soit le dénouement.
La prudence des marchés témoigne pour l'instant d'une certaine résignation face au flou entourant le Brexit et à l'impossibilité de privilégier tel ou tel scénario.