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RDC : Manifestations contre Kabila après le report du vote dans des régions touchées par Ebola

Mécontents du report de l'élection présidentielle de dimanche dans certaines parties de la République démocratique du Congo touchées par Ebola, des centaines de personnes ont manifesté contre le président Joseph Kabila.

À 48 heures des élections, des manifestations ont à nouveau éclaté vendredi 28 décembre à Beni, en République démocratique du Congo. Des centaines de personnes ont réclamé le droit de voter dimanche avec le reste du pays. La police a tiré en l'air pour disperser les foules à Butembo, dans l'Est du pays. À Goma, chef-lieu du Nord-Kivu, des échauffourées ont éclaté entre des jeunes et la police qui a tiré des gaz lacrymogènes dans le quartier populaire de Majengo.

Ces manifestants répondaient à l'appel de l'opposition pour protester contre le repport du scrutin présidentiel à Beni, Butembo et Yumbi. Le président congolais, Joseph Kabila, au pouvoir depuis 18 ans, impute au virus Ebola la décision du report du vote. "Nous n'avons pas peur d'Ebola", a déclaré Claude Vianney, l'un des manifestants.

Partout ailleurs, le mot d'ordre de grève générale d'une partie de l'opposition a été un échec. La veille, la coalition autour du candidat Martin Fayulu avait appelé à une journée "ville morte" contre le nouveau report à mars des élections présidentielle, législatives et provinciales à Beni et Butembo. Le reste du pays choisira le successeur de Joseph Kabila dimanche 30 décembre.

Dans la capitale Kinshasa et la deuxième ville du pays, Lubumbashi, l'activité commerciale et la circulation étaient normales. L'activité était également normale à Kikwit dans le Bandundu, région d'origine de Martin Fayulu.

Joseph Kabila contredit l'OMS

Dans une interview accordée à Associated Press jeudi soir, Joseph Kabila a affirmé que l'utilisation des machines à voter, qui nécessitent de toucher l'écran tactile pour sélectionner les candidats, pourrait propager le virus Ebola. Un bureau de vote pourrait avoir de 500 à 600 électeurs et "cela suppose que beaucoup de personnes seront contaminées", a-t-il déclaré.

Le président sortant contredit ainsi ses propres responsables de la santé et des experts de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), qui ont affirmé que des précautions avaient été prises en collaboration avec les autorités électorales afin que les citoyens puissent voter sans risques. Le ministère de la Santé a d'ailleurs appelé les électeurs à se désinfecter les mains avant et après le vote. Dans cette optique, il a prévu des tonnes de désinfectant pour les mains et le dépistage de tous les électeurs entrant dans les bureaux de vote.

L'épidémie d'Ebola a fait 350 morts depuis sa déclaration le 1er août. Jusqu'à cette semaine, le virus avait été un défi mais pas un obstacle à l'élection. Si le vote est retardé dans les villes de Beni et Butembo, il est toutefois maintenu dans d'autres régions touchées par Ebola.

La lutte contre Ebola "gravement perturbée"

Le tollé suscité par le retard des élections, reportées trois fois, a "gravement perturbé" le travail de lutte contre le virus Ebola à Beni et Butembo, a annoncé le ministère congolais de la Santé. Les équipes de santé pouvaient à peine se déployer jeudi et aucune vaccination contre Ebola n'a pu être effectuée, a-t-il ajouté.

L'organisation humanitaire Oxfam a déclaré qu'elle avait été contrainte de suspendre ses activités de lutte contre le virus. Le directeur de programme Provinces Ouest à Oxfam, Raphael Mbuyi, a qualifié la situation d""extrêmement préoccupante" car les suspensions antérieures ont conduit à une flambée du nombre de nouveaux cas.

Celui-ci a toutefois ajouté "qu'il n'est pas surprenant que les personnes qui se sont vues retirer leur vote à la dernière minute soient frustrées et descendent dans la rue. Elles méritent également de s'exprimer."

Avec AP