
Le sénateur démocrate Edward "Ted" Kennedy est décédé, mercredi, des suites d'un cancer à l'âge de 77 ans. Troisième des frères Kennedy à s'être illustré dans la politique, il sera enterré au cimetière d'Arlington comme ses frères.
Neuf mandats consécutifs au Sénat américain et une lutte de 15 mois contre un cancer du cerveau n’ont pas suffit à entamer l’énergie politique d’Edward Moore "Ted" Kennedy.
Avant de succomber à la maladie dans la nuit de mardi à mercredi, la dernière icône du clan Kennedy n’avait pas hésité à lancer ses dernières forces dans la bataille législative en cours pour la réforme du régime d’assurance santé aux États-Unis.
Nul doute que Barack Obama était sincère ce matin quand il a déclaré avoir eu “le cœur brisé” à l’annonce du décès du petit frère de "JFK". Ted Kennedy était, en effet, le défenseur acharné de l'une des mesures phares du candidat Obama à la présidentielle – l’adoption d’un plan d’assurance santé universelle –, aujourd’hui sous le feu des critiques de l’opposition.
Alors qu’il subissait de longues séances de chimiothérapie à l’hôpital général du Massachusetts, l’homme politique de 77 ans continuait à écrire des articles en faveur de cette loi. “C’est la cause de ma vie", affirmait-il encore dans Newsweek en juillet dernier, un mois avant d’être emporté par le cancer qui le rongeait depuis que les médecins lui avaient détecté une tumeur cérébrale, en mai 2008.
Du fait de sa maladie, le sénateur pouvait se prévaloir de son expérience personnelle du système de santé américain dans le débat pour sa réforme. Il reconnaissait avoir reçu des soins d’une qualité exceptionnelle, tout en témoignant de "la frustration et de la colère" d’Américains privés de soins, faute d’assurance santé.
“Chaque Américain devrait avoir accès aux soins auxquels les sénateurs ont droit", a écrit Ted Kennedy, qui appellait à la mise en place d'une assurance maladie universelle aux États-Unis depuis la fin des années 1960.
Lion du Sénat et patriarche des démocrates
Depuis son élection au poste de sénateur en 1962, Ted Kennedy s’est impliqué dans des réformes législatives portant sur des questions aussi diverses que la santé, l’immigration, les droits de la personne ou l’éducation. Avant sa mort, il était notamment président de la Commission sénatoriale sur la santé, l’éducation, le travail et la retraite.
Son extraordinaire longévité politique lui a valu le surnom flatteur de "Lion du Sénat", mais le vétéran n’avait pas besoin de rugir pour être entendu. Il était, au contraire, reconnu comme un orateur brillant, capable de s’entendre avec les élus républicains et de faire émerger des consensus entre factions opposées.
La femme de feu Ronald "Ronnie" Reagan, l'ex-président américain qui fut un temps l'icône de la droite conservatrice, ne s’y est pas trompée. Dans un communiqué, elle a salué la mémoire d’un homme de dialogue.
"Ronnie et Ted trouvaient toujours un terrain d’entente. Ils avaient un immense respect l’un pour l’autre", affirme la veuve de l’ancien président.
Au fil des années, Ted Kennedy s’est naturellement imposé comme le patriarche du Parti démocrate. Son rôle de parrain politique au sein de sa formation n'a cessé de s'amplifier avec le temps, malgré l’échec de sa candidature à la candidature démocrate à l’élection présidentielle de 1980.
Rattrapé par un scandale lié à un accident de voiture dans lequel sa passagère avait été tuée en 1969, son unique tentative de partir à la conquête de la Maison Blanche s’était soldée par un échec retentissant.
Le vieux lion a de nouveau prouvé son influence sur son camp politique lors de la convention du Parti démocrate à Denver, en août 2008. Le discours de soutien à Obama qu'il avait alors prononcé avait galvanisé le public présent.
“Si vous demandez aux personnes qui entourent aujourd’hui le président quels furent les moments clefs de la campagne électorale d’Obama, ils vous parleront tous du soutien que lui a apporté Ted Kennedy, parce qu’il lui a apporté son aura de star, ainsi que la crédibilité et l’histoire de sa grande famille", explique Ed O’Keefe, du Washington Post, à FRANCE 24.
La dernière icône d’une dynastie politique ?
La mort de Ted Kennedy dans sa paisible bourgade de Hyannis Port, dans l’État du Massachusetts, tranche avec la mythologie familiale du clan Kennedy, marquée par des morts violentes.
Les brillantes carrières politiques de ses deux plus célèbres frères, le sénateur Robert F. Kennedy et le président John F. Kennedy, furent interrompues par des assassinats. Quant à la mort du fils de ce dernier, JFK junior, dans un accident d’avion en 1999, elle avait relancé le mythe d’une famille moderne et glamour à la destinée tragique.
La disparition de Ted Kennedy laisse le camp démocrate sans leader historique, même si certains analystes politiques voient en Barack Obama le "nouveau Kennedy".