Moins de 45 % des électeurs irakiens se sont rendus aux urnes, samedi, pour les premières législatives organisées depuis la chute du groupe État islamique. Un désaveu clair pour une classe politique qu'ils jugent corrompue.
Le désaveu est net : les Irakiens ont boudé, samedi 12 mai, les premières législatives organisées depuis la victoire sur le groupe État islamique (EI). Pour ce scrutin qui doit permettre de décider si le Premier ministre Haider al-Abadi, parvenu en 2014 à son poste en vertu d'un accord tacite entre les États-Unis et l'Iran, restera aux manettes, seuls 44,52 % des 25,5 millions d'inscrits se sont rendus aux urnes.
La participation n'a été importante que dans la région autonome du Kurdistan et dans celle de Mossoul, l'ancienne "capitale" de l'EI dans le nord. Les premiers résultats devraient être connus dans les deux jours.
Selon une source à la commission électorale, la liste Alliance de la victoire du Premier ministre irakien Haïdar al-Abadi semble sortir en tête des élections législatives. Selon des résultats préliminaires, le Premier ministre sortant devancerait l'alliance formée par Moqtada al Sadr. Les résultats définitifs sont attendus lundi.
Ces élections interviennent sur fond de tensions régionales aiguës. Washington et Téhéran étant à nouveau à couteaux tirés après la décision du président américain Donald Trump de se retirer de l'accord nucléaire avec la République islamique.
Ce vote, clos sans incidents majeurs, devait aboutir à la désignation des 329 députés qui auront la charge notamment de veiller à la bonne utilisation des 30 milliards de dollars d'engagements internationaux pour la reconstruction de l'Irak, mais la population craint que cet argent ne finisse dans les poches des responsables politiques.
Chasser les "requins de la corruption"
Si plus d'un électeur sur deux n'a pas daigné aller voter, beaucoup de ceux qui se sont rendus dans les bureaux de vote ont affiché leur désir de changement pour remettre sur pied un pays en lambeaux après trois ans de guerre contre l’EI. Quelle que soit leur confession ou leur province, nombre d'Irakiens affirmaient voter pour chasser les "requins de la corruption", car la principale tâche du nouveau Parlement sera de superviser la reconstruction de l'Irak.
"J'ai voté pour un candidat qui ne s'est jamais présenté, j'espère que ces nouveaux répondront aux souhaits des Irakiens qui souffrent de la corruption depuis quinze ans", explique Mohammed Jaafar, 80 ans, dans la province de Diwaniyah, au sud de Bagdad. À Mossoul, Omar Abed Mohammed, un chômeur de 32 ans, a également voté "pour changer les visages de ceux qui ont conduit à la destruction du pays". À Qaraqosh, une ville chrétienne proche de Mossoul, les électeurs veulent la "stabilité [pour] faire cesser l'exode [des chrétiens]" dans une cité où seule une petite partie des 50 000 habitants est revenue après trois années d'occupation jihadiste.
À Bagdad, Sami Wadi, un retraité de 74 ans, a dit voter "pour sauver le pays du confessionnalisme et de la corruption".
Avec AFP