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Les pays du continent américain se réunissent vendredi et samedi à Lima pour le Sommet des Amériques. Scandales de corruption, crise politique au Venezuela et absence remarquée de Donald Trump… Les sujets de discussion ne manqueront pas.

Le choix du Pérou comme pays-hôte du Sommet des Amériques, vendredi 13 et samedi 14 avril, n'est pas dépourvu de symboles. Ce pays est directement concerné par les deux problèmes qui seront au centre des discussions lors de cette rencontre diplomatique réunissant les chefs d'État de toute l'Amérique : l'omniprésence de la corruption sur tout le continent et la crise politique et économique persistante au Venezuela. Mais malgré sa promptitude à agir sur ce dernier dossier, Donald Trump n'a pas fait le déplacement, une première pour un président des États-Unis depuis la création du sommet.

Le Pérou est directement concerné par la corruption. Récemment, son président, Pedro Pablo Kuczynski, a démissionné en raison de ses liens avec le géant de la construction Odebrecht, qui avait tissé un réseau de corruption dans toute la région.

Le Pérou a également été en première ligne sur le dossier vénézuélien. C'est ici qu'est né le groupe de Lima, alliance de 14 pays d'Amérique qui fait pression depuis plusieurs mois sur Caracas pour dénoncer les dérives autoritaires du gouvernement de Nicolas Maduro, tout comme le fait Donald Trump.

La capitale péruvienne aurait pu permettre une rencontre inédite entre les deux dirigeants, qui ne cessent de s'invectiver à distance depuis des mois, mais celle-ci n'aura pas lieu : Nicolas Maduro s'est vu retirer son invitation et Donald Trump a finalement choisi de rester à Washington "pour superviser la réponse américaine à la Syrie", selon la Maison Blanche.

Manifestations pro et anti-Muduro à Lima

Le Venezuela devrait toutefois rester au cœur des discussions à Lima, ce que souhaite l'opposition : "La crise vénézuélienne doit être à l'agenda du Sommet des Amériques", a plaidé l'un de ses dirigeants, l'ex-maire de Caracas Antonio Ledezma, qui a fui en Espagne alors qu'il était assigné à résidence dans son pays. "Ce n'est pas une faveur que nous demandons pour le Venezuela, il s'agit d'un problème du continent" dans son ensemble, a-t-il argumenté face à la communauté vénézuélienne à Lima.

Deux manifestations, l'une pour Nicolas Maduro, l'autre contre lui, ont eu lieu jeudi 12 avril dans la capitale péruvienne. Un millier de personnes se sont rassemblées dans le centre de Lima pour exprimer leur soutien au président Maduro. À un kilomètre de là, quelque 3 000 Vénézuéliens résidant au Pérou, menés par Antonio Ledezma, manifestaient contre lui. "À bas Maduro", "Maduro dictateur", déclaraient des pancartes brandies par des participants.

Activistas por DDHH convocados por Amnistía Internacional protestaron frente a embajada de Venezuela en Lima solicitando al gobierno de Nicolás Maduro el acceso a las medicinas. https://t.co/VKnRMk7Pbp pic.twitter.com/7oQtyf9o2C

  Luis Olavarrieta (@LuisOlavarrieta) 13 avril 2018

Lassés de la violente crise politique, économique et sociale qui secoue le pays, de nombreux habitants ont préféré l'exode : selon les services migratoires péruviens, en janvier, ils étaient 100 000 à avoir choisi de s'installer au Pérou.

Dans une région qui a viré à droite ces dernières années, un front commun contre Nicolas Maduro pourrait voir le jour afin, notamment, de ne pas reconnaître le résultat du scrutin présidentiel anticipé du 20 mai prochain.

La corruption, un thème officiel de discussion

Autre sujet d'inquiétude dans la région et thème officiel du sommet : la corruption, au moment où les scandales éclaboussent plusieurs dirigeants, outre Pedro Pablo Kuczynski. L'ex-président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, condamné à 12 ans de réclusion, est ainsi en prison depuis samedi, et l'ancien vice-président équatorien Jorge Glas est derrière les barreaux dans ce même dossier Odebrecht.

Au pouvoir depuis seulement trois semaines, le président péruvien Martin Vizcarra a appelé jeudi, lors d'une réunion de chefs d'entreprises en amont du sommet, à "faire face de manière décisive au problème de la corruption, en promouvant une culture d'intégrité dans notre région". "La croissance économique durable ne peut survenir sans cadre institutionnel", a-t-il prévenu, exigeant la fin du versement de pots-de-vin et de "l'attribution de chantiers publics aux candidats inadéquats".

Ivanka Trump et Mike Pence pour représenter les États-Unis

À Lima, Donald Trump sera représenté par le vice-président américain Mike Pence ainsi que par sa fille et conseillère Ivanka, qui présentera une initiative pour donner plus de pouvoir économique aux femmes latino-américaines.

L'absence de Donald Trump est vécue comme un camouflet en Amérique latine, longtemps vue comme l'arrière-cour des États-Unis. "Pour Trump, l'Amérique latine, sauf éventuellement le Mexique, est au niveau de son vice-président", observe Kevin Casas, ancien vice-président du Costa Rica, désormais directeur de la société de consultants Analitica Consultores. "C'est un message que nous soupçonnions tous plus ou moins, maintenant ça ne peut pas être plus clair et c'est comme ça que va le voir la région. Et la Chine aussi."

Symbole de l'influence grandissante de l'Asie dans cette partie du monde : la signature en mars par 11 pays des deux rives du Pacifique de l'accord de libre-échange transpacifique (TPP), donné pour mort il y a un an après le retrait des États-Unis.

Pendant ce temps, les tensions entre Donald Trump et l'Amérique latine, où il ne s'est toujours pas rendu depuis son arrivée au pouvoir en janvier 2017, sont croissantes, notamment avec le Mexique, dont il critique l'afflux migratoire et l'accord de libre-échange (Alena, avec aussi le Canada) en vigueur depuis 1994.

Avec AFP