
Médecins sans frontières et l’Organisation mondiale de la santé ont chacun dénoncé les attaques du régime syrien qui ciblent le personnel ou l’équipement médical, notamment dans la Ghouta orientale. MSF a déclaré l’état de "catastrophe médicale".
Vendredi 9 mars, 13 camions chargés d’aide humanitaire sont entrés dans la Ghouta orientale, en Syrie, selon le Comité international de la Croix-Rouge. Une fois les quelques tonnes de nourriture livrées, le convoi a fait demi-tour et… a quitté l’enclave. Si la chose n’a l’air de rien, la réussite de cet aller-retour entre le territoire contrôlé par le régime et celui tenu par les rebelles était loin d’être garantie. De fait, l’envoi de matériel médical, réclamé à cor et à cris par Médecins sans frontières (MSF) et envisagé pour la semaine prochaine, pourrait ne pas avoir lieu tant l’opération est périlleuse, comme l'a averti le coordinateur humanitaire de l'ONU en Syrie, Ali al-Zaatari.
MSF, qui dénonce rien de moins qu’une "terrible catastrophe médicale" dans la Ghouta orientale, réclame l'entrée sans entraves de matériel médical dans l'enclave rebelle. L’urgence est là : depuis le 18 février, début de la campagne de bombardements tous azimuts par le régime syrien, déjà 948 civils sont morts, dont 195 enfants, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH). La Ghouta compte ses blessés, qui sont plus de 4 320, selon les derniers chiffres disponibles.
"Impact dévastateur"
Or les capacités médicales sont compromises. L’OMS s’est inquiétée le 6 mars du "niveau alarmant" des attaques contre les installations médicales. Sur les deux premiers mois de 2018, les installations de santé et les personnels médicaux ont subi 67 attaques ayant pu être corroborées, soit près de 60 % de toutes les attaques subies par ces mêmes personnels sur l’ensemble de l’année 2017, au nombre de 112.
"Comme toujours, l’impact est dévastateur : pour le mois de février, nous pouvons estimer que ces attaques ont empêché 15 000 consultations médicales de patients ayant désespérément besoin d’aide et près de 1 500 opérations chirurgicales, dont beaucoup auraient pu sauver des vies", explique le porte-parole de l’organisation, Christian Lindmeier. "L’OMS appelle toutes les parties à arrêter immédiatement toutes attaques visant le personnel médical et humanitaire, leurs moyens de transport et leur équipement, ainsi que les hôpitaux et autres structures médicales."
"Le personnel médical est à bout de force"
MSF ne dit pas autre chose : "Le matériel médical (dans l’enclave de la Ghouta) est extrêmement limité, les infrastructures médicales ont été frappées par des bombardements et des tirs d'artillerie et le personnel médical est à bout de force."
En effet, 15 des 20 hôpitaux et cliniques soutenus par l'ONG dans la zone rebelle ont été touchés par les bombardements, "réduisant encore plus leur capacité à prodiguer des soins médicaux", selon elle. "La nécessité d'un réapprovisionnement médical massif devient de plus en plus urgente."
La détermination du régime à liquider cette embarrassante poche rebelle à quelques kilomètres de sa capitale, en plein dans le "verger de Damas", semble sans faille. Les forces loyalistes ont déjà repris la moitié du territoire rebelle, selon l’OSDH. Une reconquête à marche forcée peu soucieuse de l’intégrité des personnels médicaux, dont l’OMS rappelle pourtant qu’ils bénéficient d’une "protection spéciale du droit international humanitaire". "Cela doit cesser", insiste l’instance internationale. Un mantra qui ne sera probablement pas écouté par les belligérants.