logo

Ouverture d'un nouveau procès dans l'affaire du meurtre de Politkovskaïa

Après les acquittements des accusés du meurtre de la journaliste Anna Politkovskaïa en première instance, un nouveau procès s'ouvre ce mercredi à Moscou. La famille de la victime réclame l'ouverture d'une nouvelle enquête.

AFP - Un nouveau procès pour élucider l'assassinat de la journaliste russe Anna Politkovskaïa doit s'ouvrir mercredi, après l'acquittement des accusés en première instance, alors que les meurtres de journalistes et défenseurs de droits de l'Homme se poursuivent en Russie.

Ce procès intervient suite à l'annulation le 25 juin par la Cour suprême des acquittements des trois complices présumés de l'assassinat, au terme d'un procès de trois mois qui n'a pas permis d'identifier le commanditaire, tandis que le tireur présumé n'a jamais été arrêté.

"La première séance commence mercredi à 11H00 (07H00 GMT) et elle sera ouverte au public", a indiqué à l'AFP le porte-parole du tribunal militaire de Moscou, Alexandre Mintchanovski.

Si les enfants de la journaliste, Vera Politkovskaïa et Ilia Politkovski estiment que les personnes acquittées le 19 février sont impliquées dans le meurtre, ils jugent surtout qu'une nouvelle enquête doit être menée avant que l'affaire ne soit renvoyée devant les juges.

"Nous insisterons mercredi sur un renvoi de l'affaire au Parquet", a indiqué à l'AFP Ilia. "Les accusés étaient impliqués dans l'assassinat: ils étaient sur les lieux du crime et n'ont jamais pu expliquer pourquoi", a-t-il ajouté.

Trois prévenus doivent comparaître mercredi. Deux frères tchétchènes, Djabraïl et Ibraguim Makhmoudov, sont soupçonnés d'avoir surveillé la victime et d'avoir amené sur les lieux du crime le tueur présumé, leur frère Roustam, toujours en fuite.

Le troisième suspect, l'ancien policier Sergueï Khadjikourbanov est lui accusé d'avoir mis au point la logistique de l'assassinat.

La rédaction du tri-hebdomadaire Novaïa Gazeta, où travaillait Anna Politkovskaïa, réclame elle aussi une nouvelle enquête.

"Des jurés (du premier procès) m'ont dit que l'enquête était incomplète et qu'il manquait de preuves pour prononcer un verdict de culpabilité", a expliqué à l'AFP le rédacteur en chef adjoint du journal, Sergueï Sokolov.

Les parties civiles et la défense réclament par ailleurs que les audiences soient ouvertes au public, alors que lors du premier procès plusieurs séances s'étaient déroulées à huis clos sur décision du juge.

Ce dernier avait dans un premier temps tenté de fermer tous les débats au public pour protéger les jurés, mais ceux-ci s'étaient élevés contre cette décision.

Alors que l'acte d'accusation désigne, selon la défense, un homme politique russe non identifié comme le commanditaire du crime, cet assassinat n'a jamais été résolu, comme la plupart des affaires de ce type en Russie.

"L'assassinat toujours non-élucidé de Politkovskaïa s'inscrit sur une liste de 40 autres noms de journalistes tués depuis 1993 en Russie pour leurs activités professionnelles", a indiqué à l'AFP Oleg Panfilov, président du Centre du journalisme dans les situations extrêmes.

"Aucun des commanditaires de ces quarante meurtres n'a jamais été identifié", résume-t-il.

M. Panfilov cite ainsi l'exemple du journaliste Magomed Evloïev, qui dirigeait le site ingushetiya.ru, tué par un policier en Ingouchie en septembre 2008.

Un enquête pour "meurtre par imprudence" a été ouverte, mais le procès n'a toujours pas eu lieu, alors que les proches de la victime accusent les autorités de cette république du Caucase nord d'avoir commandité l'assassinat.

Et l'enquête sur l'enlèvement et l'assassinat, le 15 juillet dernier, de la militante russe des droits de l'Homme en Tchétchénie, Natalia Estemirova, connaîtra le même sort, malgré les promesses du président russe Dmitri Medvedev, estime encore l'expert.

Anna Politkovaskaïa, qui s'était notamment illustrée en dénonçant les exactions russes en Tchétchénie, avait été tuée par balles en octobre 2006 dans son immeuble à Moscou.