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Centrafrique : à Bangui, les rancœurs contre l'ONU de plus en plus exacerbées

Des manifestants ont incendié deux véhicules de l'ONU vendredi à Bangui, l'accusant à tort d'être à l’origine de la mort d'un étudiant. L’incident illustre le fort sentiment de défiance des Centrafricains à l’égard des Nations unies.

Plusieurs dizaines de jeunes Centrafricains sont descendus dans les rues de la capitale Bangui, vendredi 24 novembre, après la mort d’un étudiant, renversé au matin par un véhicule. Les manifestants, qui incriminaient l'ONU et sa mission dans le pays (Minusca), ont incendié deux de ses véhicules.

"Un véhicule des Nations unies qui passait sur les lieux a été pris à partie par une foule en colère et a été incendié, mettant en danger la vie des passagers qui ont été sauvés de justesse. Un véhicule des sapeurs-pompiers envoyé sur place par la Minusca a également été attaqué et endommagé par la foule, qui a aussi blessé un sapeur-pompier", annonce l’ONU dans un communiqué, déplorant des attaques "injustes" à son égard.

La #MINUSCA est en contact permanent avec les autorités centrafricaines et travaille avec la Police et la Gendarmerie #RCA afin de ramener le calme dans la capitale #CARcrisis

  MINUSCA (@UN_CAR) 24 novembre 2017

Le ministre de la Communication et des Médias, Ange Maxime Kazagui, a réagi peu après les évènements pour préciser que le véhicule ayant heurté l’étudiant était conduit par un membre des Forces armées centrafricaines (Faca) et n’appartenait pas à la flotte de l’ONU. Il s’agirait d’une ancienne voiture de l’Unicef, léguée récemment au ministère de la Défense.

"Tout ce qu’il se passe en Centrafrique, dans l’arrière-pays, la Minusca ne fait rien contre. Ils ne font que se pavaner dans Bangui au lieu de se rendre dans les provinces", lance un jeune étudiant en colère au micro de TV5 Monde.

Tension palpable dans la ville

Présente à Bangui au moment des faits, la journaliste de France 24 Brenna Daldorph rapporte une omniprésence inhabituelle de casques bleus et une forte tension dans la capitale, pourtant présentée depuis plus d’un an comme seul "havre de paix" d’un pays ravagé et contrôlé à 80 % par des groupes armés rivaux. Les dernières violences dans la ville remontent au 11 novembre, quand une attaque à la grenade dans un café a fait quatre morts, un incident suivi par des représailles qui ont fait trois victimes supplémentaires. L’évènement était une première depuis plus d’un an.

Vis-à-vis de l'ONU, un premier incident avait déjà éclaté le 18 novembre après qu’une femme est morte dans un accident de moto devant l’ambassade de France. Les passagers d'un véhicule de l’ONU qui passait sur les lieux avaient alors été, là aussi, pris à partie.

"Bangui est une ville de rumeurs, et il y a ici une grande frustration à l’égard de l’ONU", pointe Brenna Daldorph. "À chaque fois qu’un renouvellement du mandat de la Minusca est prévu, il y a des violences."

Le Conseil de sécurité des Nations unies a voté le 15 novembre le renouvellement d’un an du mandat de la mission, composée de 12 500 militaires et policiers. Après plus de trois ans d'activités, troublées par les accusations de violences sexuelles de la part de casques bleus, la Minusca peine toujours à convaincre de son efficacité. En octobre 2016, quatre civils avaient été tués à Bangui lors d’une journée ville morte pour demander le retrait des forces onusiennes.