logo

La "menace fan-drone" : comment les drones civils sèment parfois le chaos dans le trafic aérien

Alors que nous sommes de plus en plus nombreux chaque année à investir dans des drones, les incidents qu'ils entraînent avec des avions ne cessent également de se multiplier. Au point, parfois, de créer l'anarchie aux abords des aéroports.

Le 2 juillet 2017, plusieurs témoins affirment avoir vu un drone voler aux alentours de l’aéroport de Gatwick, à Londres. Ni une ni deux, le trafic aérien se retrouve suspendu durant plus de 30 minutes, forçant les avions près à atterrir à patienter en plein vol. Après un retour à la normale, l'engin est à nouveau repéré et oblige dans la même demi-journée les aiguilleurs du ciel à fermer une fois de plus les couloirs aériens durant 30 minutes.

Le drone aura entraîné de très nombreux retards sur les vols de la soirée, ainsi qu’un sacré bazar général, Gatewick étant un aéroport très fréquenté et privilégié pour les correspondances. Ce type de problème n’est pourtant pas si rare aujourd’hui : pour la seule année 2016, l’Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) a dénombré plus de 1 400 incidents causés par des drones, contre 606 sur une période allant 2011 à 2015. Sur ces 1 400 cas recensés, 15 d’entre eux ont été catégorisés comme des "accidents" aériens, même si aucun d’entre eux n’a fait de victime.

Unconfirmed reports of a drone sighting led to runway suspension for a total of 14 mins. Operations fully resumed and police investigating.

— Gatwick Airport LGW (@Gatwick_Airport) 2 juillet 2017

En mars 2016, un Airbus A320 d’Air France en provenance de Barcelone a évité de justesse un drone alors qu’il s’apprêtait à se poser à Roissy-Charles de Gaulle. D’après le rapport des pilotes, celui-ci serait passé à environ 5 mètres sous l’aile de l’appareil qui volait à plus de 400 kilomètres/heure. Plus récemment, une collision entre l’un de ces petits engins volants et un appareil d'Air Canada a été également évitée de justesse. De fait, on imagine aisément qu'un choc pourrait avoir de dramatiques conséquences s'il survenait au niveau des moteurs ou du pare-brise.

Cette animation, réalisée par la NATS à partir d'images radar réelles, montre le désordre créé par le drone solitaire repéré au-dessus de l'aéroport Gatwick, le 2 juillet 2017.

Encore trop d'inconnues

En mai 2016, l’AESA a d’ailleurs créé un groupe de travail pour évaluer plus précisément les risques auxquels les drones exposent véritablement les avions de ligne. Depuis plus d’un an, ce dernier compile ainsi tous les incidents concernant un drone localisé à proximité d’un appareil et survenus dans l’Union européenne. Parallèlement, l'équipe tente de déterminer, en s’appuyant sur des études et des cas réels, la nature de potentielles vulnérabilités au niveau du pare-brise, des moteurs ou encore du fuselage, en fonction des différentes catégories d’aéronefs.

Nous recevons beaucoup d'informations de pilotes faisant état de drones à des endroits inattendus, en particulier autour d'aéroports

Pour l’Association internationale du transport aérien (IATA), les drones pourraient également mettre en péril les avions avec les interférences de fréquences radio – sur lesquelles ils s’appuient pour être utilisés – qu’ils occasionnent. "Nous recevons beaucoup d'informations de pilotes faisant état de drones à des endroits inattendus, en particulier à basse altitude autour d'aéroports. Il est indéniable que cela pose un problème réel et croissant pour la sécurité", s’inquiétait Tony Tyler, le directeur de l’IATA, lors d’une conférence organisé à Singapour en 2016.

Bientôt un peu d'ordre dans tout ça

De son côté, l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) a lancé en mai dernier une consultation publique pour concevoir un système international de suivi en temps réel des drones civils. Celui-ci permettrait d’identifier le propriétaire et le type du drone aperçu, ainsi que son altitude, sa trajectoire et même la position précise de sa télécommande. Avant que ce dispositif ne soit réellement mis en place, les 191 États membres devront néanmoins s’accorder entre eux sur de nombreux points, notamment législatifs.

Il s’agit là d’une toute première tentative d’harmonisation des réglementations nationales sur les drones civils, dont le nombre ne cesse d’augmenter d’année en année. Aujourd’hui, seulement 63 pays de l’OACI (dont la France) sur 191 imposent d’ailleurs des règles à leurs citoyens. En France, la législation évoluera à l’été 2018, et contraindra désormais les drones dépassant les 800 grammes à être équipés de signaux lumineux et sonores. Ces futures réglementations sont consultables ici.

Quelles sont les missions de la commission de la navigation aérienne à l'@icao ? Rencontre avec notre commissaire https://t.co/eto3GnSZvV pic.twitter.com/6O93ShNg1w

— dgac (@DGAC) 30 octobre 2017

L'"incident" du 2 juillet 2017 à Gatwick a fini par faire l’objet d’une animation qui parle d’elle-même (visible au milieu de l'article), réalisée par la NATS, le principal prestataire de services de la circulation aérienne au Royaume-Uni. Constituées d’images réelles des écrans radars des contrôleurs au moment de l’intrusion, on y aperçoit à quel point un simple petit drone a pu perturber le trafic. Plusieurs avions ont ainsi dû être déviés vers plusieurs "zones d’attente", le temps de pouvoir se poser sans danger sur le tarmac de Gatwick.

Alors la prochaine fois que vous ferez prendre l'air à votre drone, n'oubliez pas de veiller à ne pas reproduire ce chaos multicolore.

Quelque chose à ajouter ? Dites-le en commentaire.