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Memorial ferme son bureau après le meurtre de Natalia Estemirova

Memorial, une ONG russe de défense des droits de l'Homme, accuse le dirigeant tchétchène Ramzan Kadyrov d'être derrière l'assassinat de sa collaboratrice Natalia Estemirova. Elle suspend jusqu'à nouvel ordre ses activités en Tchétchénie.

AFP - L'ONG de défense des droits de l'Homme russe Memorial a décidé de suspendre ses activités en Tchétchénie à la suite de l'assassinat mercredi de sa collaboratrice Natalia Estemirova, a déclaré samedi à l'AFP l'un des responsables de l'organisation, Alexandre Tcherkassov.

"Cet assassinat a montré que le travail en Tchétchénie est mortellement dangereux et nous ne pouvons pas risquer la vie de nos collègues même s'ils sont prêts à poursuivre leur travail", a déclaré M. Tcherkassov.

"Nous suspendons les activités de notre bureau en Tchétchénie", a-t-il poursuivi sans préciser pour combien de temps.

Natalia Estemirova a été enlevée mercredi à Grozny, capitale tchétchène, et retrouvée morte de deux balles dans la tête et la poitrine, quelques heures plus tard en Ingouchie voisine.

Un des responsables de Memorial, Oleg Orlov, a accusé le dirigeant tchétchène Ramzan Kadyrov d'être derrière le meurtre de Natalia Estemirova.

M. Kadyrov a annoncé vendredi via son avocat qu'il portait plainte contre Oleg Orlov.

Avant de l'attaquer en justice, M. Kadyrov lui a téléphoné pour lui donner une leçon sur la présomption d'innocence.

"Vous n'êtes ni procureur, ni juge et vos affirmations sur ma culpabilité ne sont pas éthiques mais bizarres, c'est le moins qu'on puisse dire", lui a lancé M. Kadyrov.

"Je suis non seulement président de Tchétchénie mais aussi père de sept enfants et fils d'une femme qui a perdu son mari dans la lutte contre les terroristes et les wahhabites", a-t-il ajouté dans une allusion à son père, Akhmad Kadyrov, président tchétchène tué dans un attentat en 2004.

Des défenseurs des droits de l'Homme et des journalistes écrivant sur la Tchétchénie ont mis en garde après l'assassinat d'Estemirova sur le fait qu'il serait désormais très difficile d'obtenir des informations indépendantes sur la situation dans cette république dirigée d'une main de fer par M. Kadyrov.

Natalia Estemirova continuait de dénoncer les exactions sommaires en Tchétchénie, où le Kremlin a levé en avril "l'opération antiterroriste" déclenchée en 1999, ouvrant la voie au retrait des forces militaires déployées sur place ces dernières années.

Le meurtre a suscité une vague d'indignation en Occident rappelant l'assassinat en octobre 2006 de la journaliste Anna Politkovskaïa qui dénonçait aussi les atteintes aux droits de l'Homme en Tchétchénie et avait travaillé avec Natalia Estemirova.