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Moralisation de la vie publique, tensions avec les médias… Bayrou dans la tourmente

Une idée phare du projet de loi de moralisation de la vie publique du ministre de la Justice a été invalidée, mardi, par le Conseil d'État. Le même jour, des médias ont signé une tribune lui reprochant d'avoir fait pression sur un confrère.

À deux jours de la présentation par François Bayrou de son grand projet de loi de moralisation de la vie publique en Conseil des ministres, le Conseil d’État a demandé au gouvernement de revoir sa copie, a indiqué mercredi 13 juin Le Monde. Le quotidien a pu consulter l’avis que l’assemblée générale du Conseil d’État a validé lundi 12 juin.

Dans cet avis, l’instance purement consultative se montre très critique sur la "Banque de la démocratie", mesure phare portée par le ministre de la Justice. Elle rejette en outre deux propositions sur le financement des partis jugées anticonstitutionnel.

L'idée d'imposer aux partis la séparation de la fonction d'ordonnateur des dépenses de celle du payeur, au-delà d’un certain seuil de fonds publics attribués, pose problème dans la mesure où elle serait contraire à l’article 4 de la Constitution qui garantit aux partis la liberté de s’organiser. Seconde mesure retoquée : la certification des comptes des partis par la Cour des comptes. Le Conseil d’État a estimé qu’elle allait à l’encontre de la liberté d’entreprendre.

Concernant la "Banque de démocratie" chère à François Bayrou, l’instance a estimé que l'étude d'impact du gouvernement sur cette disposition était "beaucoup trop sommaire" et arrivée tardivement.

Lors de sa présentation du texte, le 1er juin, le ministre de la Justice avait expliqué que cette "Banque de la démocratie", adossée à la Caisse des dépôts et consignations, serait chargée "d’accorder des prêts aux partis politiques et aux candidats, selon des critères objectifs de solvabilité", afin que "les banques privées n’aient pas droit de vie et de mort" sur des formations politiques démocratiques et représentatives.

Un débat terni par les affaires de Ferrand et du MoDem

François Bayrou doit présenter mercredi en Conseil des ministres son grand projet de loi sur la moralisation de la vie publique. Un texte dont lui et Emmanuel Macron ont fait un symbole, à la fois de leur alliance et de la promesse de renouvellement de la vie politique sur laquelle le nouveau chef de l'État a été élu le 7 mai.

Ce qui devait être un débat consensuel risque cependant d'être terni par les premières ombres du nouveau quinquennat, dont une enquête ouverte par le parquet de Brest à l’encontre du nouveau ministre de la Cohésion des territoires, Richard Ferrand, et les soupçons d'emplois fictifs financés par des fonds du Parlement européen au MoDem, parti présidé par François Bayrou, relayés par les médias.

Les médias s'indignent des méthodes de l'exécutif

Pour couronner le tout, une vingtaine de sociétés de journalistes se sont alarmées, dans une tribune publiée sur plusieurs sites le 13 juin, de "signaux extrêmement préoccupants" envoyés par le gouvernement en matière d'"indépendance des médias" et de "protection des sources". Directement visé, François Bayrou est cité dans la tribune diffusée par les sociétés des journalistes de ces 23 médias, dont RFI, pour avoir "appelé en personne le directeur de la cellule investigation de Radio France pour se plaindre de prétendues ‘méthodes inquisitrices’, ajoutant qu’il étudiait, avec ses avocats, la possibilité d’une qualification de ‘harcèlement’". Cette conversation s'était tenue quelques heures avant la diffusion d'une enquête sur les emplois d'assistants parlementaires d'eurodéputés du MoDem.

La @sdjrfi signataire de cette tribune collective! https://t.co/wbwxFWaipN

— SDJ de RFI (@sdjrfi) 13 juin 2017

Interrogé à ce sujet par Mediapart, le ministre de la Justice avait répondu à la presse : "Ce n’est pas le ministre de la Justice ni le président du MoDem qui a appelé, c’est le citoyen !". Une réponse "qui laisse pantois" ont estimé les journalistes, qui dénoncent les "tentative de pression", "la répression judiciaire" et les "procès d'intention" du nouvel exécutif.

Avec AFP