
Depuis le début de la campagne présidentielle, le sport est aux abonnés absents dans les débats et les discours des principaux candidats. À une semaine du second tour, Macron comme Le Pen restent discrets sur la question.
Rarement au cœur des préoccupations des électeurs en période d’élection présidentielle, le sport a déserté ou presque les discours des candidats à la magistrature suprême en 2017. Bien sûr, on sait désormais qu’Emmanuel Macron, chef de file du mouvement En Marche ! et vainqueur du 1er tour, est fan de l’Olympique de Marseille "depuis [son] adolescence" et qu’il pratique le tennis ou la course à pied, "même en pleine campagne présidentielle".
On trouve également assez facilement trace de la passion de la candidate du Front national Marine Le Pen pour la voile et l’équitation, même si elle confie "avoir une admiration pour les sportifs qui dépassent leurs limites mentales", à l’image des "cyclistes, ces forçats de la route", ou des "coureurs à pied".
Paris-2024, un consensus presque total
Reste qu’à l’heure de la dernière ligne droite, alors que les deux derniers candidats en lice se démènent sur le terrain pour faire basculer le vote du 7 mai en leur faveur, il faut se pencher en détails sur leurs programmes pour trouver trace de mesures – plus ou moins – concrètes touchant au "divertissement" préféré des Français. Elles existent, mais force est de constater que la révolution dans le sport français n’est pas tout à fait en marche.
Autour du projet Paris-2024, le consensus entre les deux candidats est total ou presque. À un peu moins de cinq mois de la décision du CIO sur l’identité de la ville-hôte des Jeux de la XXXIIIe olympiade, Macron et Le Pen sont tous les deux pour, même si le Front national émet toutefois une réserve…. sur le slogan de l’événement. Sans surprise, le "Made for sharing" concocté par le comité d’organisation de la candidature parisienne n’a pas trouvé grâce aux oreilles du parti d’extrême droite : "Ce slogan ne sera jamais le mien. Honte à vous", s'est emporté sur Twitter Florian Philippot, vice-président du FN.
Macron souhaite promouvoir le "sport-santé"
Si l’on referme le dossier Paris-2024, il faut se pencher en détails sur les professions de foi des deux candidats pour trouver quelques mesures ayant trait au sport. Du côté d’Emmanuel Macron, l’accent est mis principalement sur le sport comme vecteur de promotion de la France : "Nous devons tous nous rassembler derrière un même objectif : faire réussir nos sportifs car ils sont des exemples pour notre Nation !". Dans la foulée, il est question de "revisiter la gouvernance du sport héritée d’après-guerre et mieux coordonner le travail des nombreux acteurs qui financent le sport sans se concerter : État, CNOSF, fédérations, clubs, collectivités, entreprises…".
Si le programme de l’ancien ministre de l’Économie évoque un soutien sans faille à l’organisation de grands événements (Paris-2024, mais aussi la Coupe du monde de rugby 2023 ou les Gay Games de 2018), il est assez peu fait mention de mesures concernant directement le sport professionnel. Emmanuel Macron annonce tout de même un objectif : "D’ici la fin du quinquennat, l’ensemble des sportifs de haut niveau [sera] en formation ou en contrat avec une entreprise." Aucune mesure, en revanche, pour la lutte contre le dopage ou encore la gestion des débordements dont fait régulièrement objet le sport professionnel depuis quelques années.
Le contenu du projet défendu par le candidat d’En Marche ! est en revanche un peu plus développé sur le sport amateur : augmenter de 3 millions (+10 %) la base de sportifs réguliers en France, faciliter la pratique du sport dans les entreprises par le biais de la signature d’un accord national interprofessionnel, ou encore créer des "maisons du sport-santé" pour accompagner les personnes désireuses d’améliorer leurs conditions de vie par la pratique sportive.
Le Pen veut "renforcer les actions contre la violence"
À l’inverse de son adversaire au second tour de la présidentielle, Marine Le Pen fait l’impasse sur le sport-santé et aborde la question d’une manière plus traditionnelle. Un contenu toutefois peu étoffé, puisque sur les 144 engagements présidentiels qu’elle formule dans son programme, seuls deux sont dédiés au sport (116 et 117). Dans le premier, elle évoque la création d’un "contrat sportif de haut niveau" d’une durée de trois ans renouvelable, afin de permettre aux sportifs amateurs qui représentent la France dans les grandes compétitions de pouvoir se consacrer entièrement à leur discipline et de "vivre dignement".
Le second, quant à lui, propose de "soutenir les petits clubs afin de permettre la présence d’un maximum de joueurs français dans les clubs professionnels et lutter contre la financiarisation du sport professionnel." Cet engagement est complété par une autre proposition qui touche à une thématique récurrente dans la campagne de la candidate frontiste : la sécurité. Il y est question de "renforcer les actions contre la violence dans le sport amateur et imposer le respect strict de la laïcité et de la neutralité dans tous les clubs sportifs".
Sur cette même ligne, Marine Le Pen a d’ailleurs profité d’un déplacement en Corse, début avril, pour annoncer qu’il n’y aurait "plus de match de football le 5 mai, nulle part en France, en mémoire de l'épouvantable drame de Furiani". Une référence à la catastrophe qui avait coûté la vie à 18 personnes, le 5 mai 1992, lors de l’effondrement d’une tribune du stade Armand-Cesari. Et c’est à peu près tout en matière de sport.
Habitué aux oubliettes
D’un côté comme de l’autre, la question sportive reste donc aux oubliettes d’une campagne largement dominée par les débats sur l’Europe, l’économie et la sécurité. À l’exception de quelques prises de position très ponctuelles du candidat PS Benoît Hamon et du livret plutôt fourni – mais publié tardivement – du mouvement La France insoumise mené par Jean-Luc Mélenchon, la majeure partie des candidats qualifiés pour le 1er tour du scrutin a tout bonnement fait le choix de reléguer le sport aux tréfonds de leurs programmes politiques.
Une tradition désormais ancrée, qui n’avait connu qu’une seule entorse en 2012, lorsque le candidat Hollande avait mis le feu au microcosme du football professionnel en proposant une taxation à 75% des salaires supérieurs à 1 million d’euros. Cinq ans plus tard, le sport n’aura même pas le privilège d’une petite polémique pour exister véritablement lors du débat de l’entre-deux tours, prévu le 3 mai prochain. Et les mordus devront se contenter d’un "coup de zapette" pour noyer leur désarroi devant AS Monaco - Juventus Turin, en demi-finale de la Ligue des champions.