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Plus de 20 combattants kurdes ont péri mardi dans des bombardements menés par la Turquie dans sa lutte contre l'organisation État islamique. Washington s'est dit préoccupé par ces frappes conduites sans coordination avec la coalition.

C’est l'une des plus attaques les plus meurtrières menées par la Turquie en Syrie et en Irak. Ankara a mené mardi 25 avril des bombardements qui ont tué plus de vingt combattants de forces kurdes impliquées dans la lutte antijihadistes et soutenues par les États-Unis.

"Nous sommes dans un combat sans merci contre le PKK", a commenté mardi le Premier ministre turc Binali Yildirim, à Ankara, qui considère les YPG comme un allié du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), parti séparatiste turc qualifié de terroriste en Turquie, et le gouvernement "prendra des mesures pour éliminer cette menace, qu'elle vienne d'un pays A ou B", a-t-il insisté.

Inquiétudes de Washington

Les États-Unis, alliés de la Turquie, se sont dit "profondément préoccupés" par ces bombardements qui ont été menés "sans coordination adéquate avec les États-Unis ou la coalition mise en place pour défaire le groupe État islamique" (EI), selon le département d'État.

Cette frappe turque est intervenue au lendemain de l'entrée des Forces démocratiques syriennes (FDS), une alliance arabo-kurde composée en grande partie de membres des YPG, dans la ville de Tabqa, un verrou sur le chemin vers Raqa, capitale de facto de l'EI en Syrie.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), 18 personnes ont péri dans les frappes turques près de la ville d'Al-Malikiyah, proche de la frontière turque. "Quinze combattants des YPG et trois membres d'un centre de médias ont été tués". Redur Khalil, le porte-parole des YPG, a de son côté fait état de 20 membres des YPG tués et de 18 blessés, dont trois dans un état critique, en plus de deux civils également blessés. Les raids nocturnes ont visé "une base qui abrite un centre de communication pour les médias et des installations militaires", selon les YPG.

"Faire cesser les violations turques"

Le journaliste de l'AFP sur place a vu des bâtiments effondrés et des secouristes fouillant les décombres. Un officier arborant un drapeau américain sur son uniforme a été vu, marchant au côté de combattants kurdes sur le lieu de l'attaque.

Dans leur offensive lancée en novembre pour reprendre Raqa, les FDS sont soutenus dans les airs par la coalition internationale dirigée par les États-Unis et au sol par des conseillers militaires américains. "Il est impensable que nous combattions sur un front aussi important que Raqa et qu'au même moment, les avions turcs nous attaquent", a déclaré à l'AFP un commandant de la milice kurde des YPG.

"Nous demandons à la coalition d'intervenir pour faire cesser les violations turques et l'appui indirect de ce pays à Daech [acronyme arabe de l'EI]", a-t-il ajouté, joint par téléphone. Pour sa part, Redur Khalil a affirmé que la coalition devait "assumer ses devoirs de protéger cette zone, car nous sommes partenaires dans la lutte contre l'EI". La Turquie considère les YPG comme un allié du PKK, sa bête noire. Elle affirme vouloir travailler avec ses alliés, mais sans les YPG, à la reconquête de Raqa.

Bavure ?

En Irak voisin, l'armée de l'air turque a ciblé des positions tenues par le PKK et ses alliés locaux, mais au moins six membres des forces de sécurité kurdes irakiennes – rivales du PKK – ont été tués, dans ce qui semble être un accident.

La frappe turque est "inacceptable", ont jugé les peshmergas, et le gouvernement irakien a dénoncé une "violation du droit international et de la souveraineté irakienne". Elle a eu lieu dans la région de Sinjar (nord-ouest) où la minorité kurdophone yazidie avait été persécutée en 2014 par l'EI. L'ONG Fraternité en Irak a jugé ces frappes "extrêmement préoccupantes", car menées à proximité de camps de déplacés yazidis, une "population particulièrement vulnérable".

L'armée turque a annoncé que les raids en Syrie et en Irak visaient à "détruire des repaires de terroristes". Elle a affirmé avoir détruit des abris et des stocks de munitions. Selon elle, 40 membres du PKK en Irak et 30 autres en Syrie ont été "neutralisés".

Avec AFP