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Paris exige la libération de la jeune Française détenue à Téhéran

Accusée d'espionnage, Clotilde Reiss, une universitaire française de 23 ans, a été emprisonnée le 1er juillet à Téhéran. Persuadé de son innocence, le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, exige sa libération.

Poursuivie pour espionnage et pour avoir participé aux manifestations qui ont suivi la réélection de Mahmoud Ahmadinejad à la présidence, la jeune universitaire française Clotilde Reiss attend de connaître son sort dans la prison d’Evine, à Téhéran. "L’accusation d’espionnage est un prétexte, Clotilde n’est pas impliquée dans quoi que ce soit, affirme l'un de ses proches qui travaille également dans le milieu universitaire. C’est un faux-procès."

Clotilde Reiss a été arrêtée à l'aéroport de Téhéran alors qu'elle était sur le chemin du retour, via Beyrouth, a expliqué lundi soir le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner, après cinq jours de tractations avec les autorités iraniennes. "Nous souhaitons que toute la lumière soit faite, que cette jeune femme soit libérée. Il n'y a aucune raison que Clotilde soit retenue", a-t-il dit lors d’une interview diffusée sur France 3, avant de répéter: "Nous exigeons cette libération."

L’ambassade de France à Téhéran et l’Institut français de recherche en Iran (Ifri) - où Clotilde Reiss a été étudiante -  ont refusé de commenter l’arrestation de la jeune femme.

 "Extrêmement timide"

Un proche de Clotilde Reiss, qui a préféré garder l’anonymat, assure qu’il est peu probable que la jeune femme ait provoqué les autorités. Malgré son jeune âge, Clotilde Reiss parlait couramment le farsi, était prudente et connaissait bien son pays d’accueil. “Clotilde est extrêmement timide, sérieuse et travailleuse, affirme un proche dans une interview avec FRANCE 24. Elle n’est pas une forte tête et ne faisait pas de vagues."



Clotilde Reiss enseignait le français à Ispahan, au centre du pays, depuis cinq mois après avoir terminé un master sur l’enseignement primaire en Iran. Selon une source diplomatique proche du dossier, c’est à Ispahan que Clotilde Reiss aurait participé à des manifestations après la réélection contestée du président Mahmoud Ahmadinejad et pris des photos qu'elle aurait envoyé par mail à un ami à Téhéran.

"Si nous comprenons bien, cette jeune femme a été accusée d'espionnage. Il s'agit d'envoi de photos prises par un téléphone portable. Je crois qu'il s'agit de ça, ça n'est pas de l'espionnage, ça ne peut pas l'être, cette accusation est absurde", a affirmé Bernard Kouchner lundi. "C’est une jeune enseignante tout à fait classique qui faisait son travail, qui a été témoin de manifestations comme des millions d'Iraniens" et n'était "pas active dans ces manifestations", a-t-il précisé.

Œil pour œil ?

L’annonce de l’arrestation de la jeune femme intervient alors que les relations entre l’Iran et l’Union européenne se sont fortement dégradées. Neuf employés locaux de l'ambassade britannique ont également été arrêtés le 28 juin, et il en reste encore un en détention, selon Londres.

Le Premier ministre britannique, Gordon Brown, qui participait lundi à un sommet franco-britannique à Evian, a lancé un avertissement à l'Iran, affirmant que les Européens étaient prêts à prendre des mesures "ensemble", en réponse à des mesures prises contre l'ambassade de Grande-Bretagne à Téhéran.

Selon le proche de Clotilde Reiss, l’Iran aurait arrêté la jeune femme en représailles à une prise de position trop forte de la France vis-à-vis des manifestations. “Clotilde a été arrêté pour des raisons qui la dépassent, explique-t-il. C’était plus facile pour les autorités de s’attaquer à une jeune fille seule et isolée."

Un instrument de politique étrangère

Le 16 juin, le président Nicolas Sarkozy a condamné "l’ampleur de la fraude" en Iran lors d’une visite à Libreville au Congo, estimant proportionnelle la "violence de la réaction" lors des manifestations. Plus critique que le président américain Barack Obama, les dirigeants ont condamné la répression des manifestations à plusieurs reprises et demandé un recompte des voix. En réaction, l’armée iranienne a accusé l’Union européenne d’interférer dans la situation politique en Iran et a exigé des excuses le 1er juillet avant de relancer les discussions concernant le programme nucléaire iranien.

Ce n’est pas la première fois qu’une étrangère est arrêtée et détenue en Iran. Pour les militants des droits de l’Homme, la méthode est en passe de devenir un instrument de politique étrangère. En janvier 2009, la journaliste américano-iranienne Roxana Saberi avait été arrêtée et emprisonnée pour espionnage avant d’être libérée en mai.