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Primaire de la gauche : les jeunes socialistes jugent les candidats

Les jeunes socialistes ont fait passer un grand oral samedi, à Paris, aux candidats à la primaire de la gauche. L’occasion de sonder une jeunesse souvent tiraillée entre plusieurs candidats et parfois tentée d’aller voir ailleurs qu’au PS.

Une demi-heure chacun, et pas une minute de plus. Tout au long de la journée du samedi 14 janvier, les candidats à la primaire de la gauche se sont succédés sur la scène de la Bellevilloise, à Paris, pour présenter, devant 200 jeunes socialistes, leur idées pour la jeunesse. Le tutoiement était de rigueur pour ce rendez-vous intitulé "Les jeunes font la primaire". Sur les sept candidats à la primaire, seule Sylvia Pinel n’est finalement pas venue.

Premier à ouvrir le bal : Manuel Valls. Très formel, l’ancien Premier ministre a semblé peu à l’aise devant les jeunes socialistes… qui l’ont d’ailleurs bien moins applaudi que ses concurrents. Il faut dire qu’entre l’affaire Leonarda et la Loi travail, ses relations avec le MJS (Mouvement des Jeunes Socialistes), plus marqué à gauche que le PS, ont été houleuses lorsqu’il dirigeait le gouvernement.

Mais il avait quelques soutiens dans la salle… comme Arnaud, 25 ans. Militant au MJS depuis quatre ans, il estime qu’ils sont 20 à 25 % au sein du mouvement, à soutenir, comme lui, l’ancien Premier ministre.

S’il concède quelques "désaccords ponctuels" sur l’ensemble du quinquennat, même la Loi travail, si décriée à gauche, trouve grâce à ses yeux - "enfin, dans sa deuxième version"-, précise-t-il. S’il envisage également de voter pour Vincent Peillon, il est plus critique à l’égard des autres candidats. Arnaud Montebourg ? "Au niveau européen, son programme pêche, et sur l’écologie, c’est le néant total". Benoît Hamon ? "Son idée de revenu universel est intéressante mais ce n’est pas d’actu pour 2017". Surtout, il reproche à ce dernier d’avoir cherché à "barrer la route au gouvernement".

Fan de Michel Rocard

Mais si Manuel Valls semble être, pour lui, le choix de la raison, celui qui l’enflamme vraiment- "pour son charisme, son sens du dialogue social, son ouverture sur le plan des mœurs" - n’est pas candidat. Et pour cause, il s’agit de… Michel Rocard. Arnaud porte d’ailleurs un tee-shirt à l’effigie de celui qui a incarné "la nouvelle gauche", décédé en juillet 2016 . Quand on lui fait remarquer qu’Emmanuel Macron revendique, en partie, l’héritage de Michel Rocard, Arnaud botte en touche : "tous les candidats le font un peu".

Plus détendu, et aussi plus applaudi, Vincent Peillon a parlé laïcité et éducation, non sans égratigner, sans les nommer, Manuel Valls – "nous nous sommes laissés gagnés par les thèses identitaires" - et Benoît Hamon et sa taxe sur les robots. C’est à lui que William, 22 ans, compte donner sa voix lors des deux tours de la primaire. Ce sympathisant de gauche venu d’Amiens avec deux amis plus militants voit en lui "un entre-deux" qui lui convient. Il juge en revanche Manuel Valls "trop autoritaire"et.Benoît Hamon "trop utopiste". "Son idée de revenu universel n’est pas réaliste", tranche-t-il.

"Arnaud, président !"

Du haut de ses 19 ans, Océane se dit de gauche "depuis toujours". Elle agite son drapeau rose et blanc "Jeunes socialistes, le mouvement" à la fin des interventions de chaque candidat. Adhérente au mouvement depuis deux ans, elle est venue de Perpignan pour "entendre les arguments de chacun". "Au MJS, beaucoup sont partis  chez Macron et au FN", déplore-t-elle. À son niveau, en relayant les positions des candidats socialistes, elle espère contribuer à détourner certains citoyens du vote FN.

Lorsqu’Arnaud Montebourg succède sur scène à François de Rugy, l’ambiance monte d’un cran. Des "Arnaud, président ! " fusent. Après avoir longuement parlé de la sixième république, il dit croire en une victoire de la gauche à la présidentielle… à condition de "donner un coup d’épaule à l’Histoire". Comme tout un petit groupe qui restera debout tout au long de son intervention, Adrien, 23 ans, n’est venu que pour lui. "C’est le seul qui parle aux classes populaires et aux classes moyennes", juge-t-il. Et Benoît Hamon ? "Il est moins présidentiel", lâche-t-il en emboîtant le pas au cortège Montebourg.

"Hamonistes" à 80 %

Voilà Benoît Hamon justement, accueilli par une ovation. Celui qui a commencé sa carrière au MJS en 1993 est ici en terrain conquis : les jeunes socialistes sont "hamonistes" à 80 %. La connivence avec son auditoire est évidente. Il y a de nombreux "Jeunes avec Hamon" dans l’assemblée.

C’est le cas d’Anaïs, 20 ans. Pour elle, Benoît Hamon est celui qui a "le meilleur diagnostic sur l’état de la société" et qui propose "les solutions les plus modernes". Elle qui travaille 25 heures par semaine pour financer ses études, est particulièrement séduite par son projet de revenu universel. Un autre candidat la convainc sur les questions d’éducation : Vincent Peillon. Et si ni Benoît Hamon, ni Vincent Peillon ne remportait la primaire de la gauche ? "Alors je penserais à voter Mélenchon".

Accueilli avec un enthousiasme très second degré, Jean-Luc Bennahmias conclut la journée en parlant légalisation du cannabis. La salle rit de bon cœur à ses traits d’humour… Pas sûr que cela lui suffise pour rallier des voix le 22 janvier prochain.