
Le gouvernement algérien a annoncé que depuis la guerre civile en 1990, 54 457 personnes avaient été poursuivies pour terrorisme. Une volonté de transparence mais aussi de montrer l'exemple aux voisins européens.
Exactement 54 457. C’est le nombre de personnes poursuivies en justice en Algérie pour des affaires de terrorisme depuis le début des années 90. Pour la première fois depuis le début des années 2000, le ministère de la Justice a communiqué un chiffre global sur le terrorisme tiré d’une base créée en 2014.
Le ministre de la Justice, Tayeb Louh, a expliqué, lundi 26 décembre, devant les sénateurs que son ministère avait établi "une base de données centralisée (...) pour les individus poursuivis pour crimes terroristes". "Le nombre global d'individus poursuivis pour crimes terroristes et inscrits sur la base de données (...) s'élevait au 21 décembre à 54 457 personnes", a-t-il indiqué devant le Conseil de la nation (Sénat).
Ce chiffre englobe des personnes qui n'ont pas encore été jugées, qui ont été condamnées par contumace ou non, ou encore qui ont été amnistiées dans le cadre de la politique de réconciliation nationale mise en œuvre par le président Abdelaziz Bouteflika. Certaines de ces personnes peuvent aussi avoir été tuées par les forces de sécurité. Tayeb Louh n'a pas fourni de détails sur les différents cas. La justice algérienne a prononcé des centaines de peines capitales. Mais aucun condamné n'a été exécuté depuis 1993.
Pour Faycal Metaoui, journaliste au quotidien El Watan interrogé par France 24, les autorités sont dans une démarche de transparence. "Des questions ont souvent été posées par les médias, l’opposition et des organisations de défense des droits de l’Homme pendant le processus de réconciliation nationale, pour savoir le nombre de personnes impliquées dans des crimes terroristes. La charte de 2005 proposait de les faire juger. Cela manque néanmoins de précision. On ne sait pas si ces personne ont déjà été jugées, si elles ont été impliquées physiquement dans des actes terroristes, dans la logistique et ou la préparation", regrette le journaliste.
Plus de 200 000 morts lors de la décennie noire
Après le premier tour des élections législatives en 1991, marqué par une large avance du Front islamique du salut (FIS), les autorités ont décidé d’arrêter le processus électoral puis de dissoudre le parti. Très vite, l’Algérie bascule dans la guerre civile, aussi appelée décennie noire. Cette période a fait 200 000 morts et depuis 1999, près de 15 000 islamistes ont déposé les armes, selon les données officielles.
En janvier 2000, la loi de réconciliation nationale, décrétée par le président Abdelaziz Bouteflika pour réconcilier les Algériens après cette décennie de guerre civile, a conduit à l’amnistie de 6 000 combattants de l’Armée islamique du salut (AIS, la branche militaire du FIS).
Aujourd’hui, cette lutte passe aussi par la surveillance des frontières. Depuis le début de l’année 2016, l’armée algérienne dit ainsi avoir "neutralisé" plus de 350 terroristes. Il s’agit des jihadistes toujours retranchés dans le maquis mais aussi les groupes armés concentrés près de la Libye, mais aussi du Mali et du Niger. "C’est assez difficile car il s’agit de contrôler les frontières. Des militaires sont déployés sur les 900 km de frontière avec la Libye, vers le Mali et le Niger, en plus des opérations menées dans le nord du pays. L’armée, qui ne communiquait pas par le passé, donne des informations sur les armes retrouvées près des frontières libyennes et dans certains massifs de l’est algérien".
Pour Faycal Metaoui, Alger veut donc aussi "communiquer avec l’opinion publique internationale pour dire que l’Algérie est un exemple en matière de lutte contre le terrorisme".