L'interpellation de personnalités dans ce qui est présenté par Madrid et Paris comme une opération franco-espagnole contre l'organisation séparatiste basque ETA provoque un imbroglio.
Cinq personnes ont été arrêtées et des armes ainsi que des explosifs saisis vendredi 16 décembre à Louhossoa près de Bayonne dans les Pyrénées-Atlantiques lors d'une opération conjointe de la police française et de la Guardia Civil espagnole.
Parmi les cinq personnes interpellées figurent notamment le dirigeant du mouvement écologiste Bizi!, Jean-Noël Etcheverry, dit Txetx, Michel Berhocoirigoin, ancien président de la Chambre d'agriculture du Pays Basque, Michel Bergougnan, coopérateur viticole dans l'appellation basque Irouléguy, et une journaliste Béatrice Haran-Molle. Contrairement à de premières informations, le président d'honneur de la Ligue des Droits de l'Homme, l'avocat Michel Tubiana, n'a pas été arrêté.
L'opération policière, sur commission rogatoire du Parquet anti-terroriste à Paris, a été menée par des enquêteurs de la police judiciaire française, notamment de la Direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI), de la Brigade recherches et d'intervention (BRI) de Bayonne et des policiers de l'unité d'élite du Raid, assistés de policiers de la Guardia Civil espagnole.
Les cinq personnes ont été interpellées dans la grande maison, isolée. Au cours d'une perquisition, "une importante saisie d'armes, d'explosifs et de munitions" a été réalisée, indique le ministère français de l'Intérieur.
Pour les gouvernements français et espagnols, "l'interpellation de cinq individus en relation avec l'organisation terroriste ETA" est "un nouveau coup dur porté à ETA", comme l'a déclaré le ministre français de l'Intérieur, Bruno Le Roux, dans un communiqué, tout en se félicitant "d'une excellente coopération entre les services et avec les autorités espagnoles".
Un appel à manifester
Toute autre est l'interprétation fournie dans les milieux nationalistes basques. Le site en ligne Mediabask, proche du quotidien basque espagnol Gara qui exprime parfois les positions d'ETA, publie ainsi une lettre que lui ont adressé Michel Tubiana, Txetx et Michel Berhocoirigoin, affirmant qu'ils avaient décidé "d'enclencher le processus de désarmement de l'organisation armée et procéder à la destruction d'un premier stock d'armes". Ce stock "correspond à environ 15 % de l'arsenal d'ETA".
Tous trois justifient leur action par leur volonté de "contribuer à un avenir sans violence et démocratique pour le Pays Basque". Plusieurs mouvements nationalistes considèrent que "les polices française et espagnole ont empêché la destruction des armes" et appellent à une riposte dans une manifestation prévue samedi à 16 heures à Bayonne.
Au nom de sa lutte pour l'indépendance du Pays Basque et de la Navarre, ETA (Euskadi Ta Askatasuna, Pays Basque et Liberté) a mené une campagne d'attentats qui a causé la mort de 829 personnes, selon les autorités espagnoles et françaises, les années 1980 ayant été les plus sanglantes.
En octobre 2011, ETA a renoncé définitivement à la violence, mais elle n'a pas depuis remis ses armes et refuse de se dissoudre. ETA réclame pour cela une négociation avec les États espagnol et français sur le sort de ses quelque 400 membres détenus dans ces deux pays, ce que Madrid et Paris refusent.
Avec AFP et Reuters