Depuis 25 ans, Hillary Clinton est sur le devant de la scène politique américaine. D'abord Première dame puis secrétaire d'État et candidate démocrate à la présidentielle, elle est prête à investir la plus haute fonction des États-Unis.
Hillary Clinton pourrait entrer dans l'Histoire ce soir. Lancée dans la course présidentielle il y a 18 mois, elle a d'abord battu le sénateur du Vermont, Bernie Sanders, à la primaire démocrate de juillet. Puis, elle est partie vent debout en campagne contre le républicain, Donald Trump. Alors que l'homme d'affaires new-yorkais s'enorgueillit d'être un outsider, Hillary peut elle, à presque 69 ans, se prévaloir d'une carrière accomplie dans les plus hautes sphères de l'État. Dix-sept ans après s'être fait connaître comme Première dame, elle pourrait franchir à nouveau le seuil de la Maison Blanche pour y occuper, cette fois, la première place et devenir la première femme présidente des États-Unis.
Hillary Rodham a grandi près du lac Michigan, dans la banlieue de Chicago. Son père, ancien combattant de la Seconde Guerre mondiale et ardent républicain, possède à l'époque une petite entreprise de vente de tissus.
"She is still the best darn changemaker I have ever known.” —Bill Clinton
Une photo publiée par Hillary Clinton (@hillaryclinton) le 27 Juil. 2016 à 10h20 PDT
Une Première dame engagée
Leur diplôme en poche et après un court passage à Washington, les Clinton retournent dans l'Arkansas natal de Bill à la fin des années 1970. Hillary y enseigne le droit et commence à s'investir en politique, militant pour l'amélioration des soins et l'éducation des personnes handicapées. Lorsque Bill Clinton est élu gouverneur de l'État, en 1978, elle devient une Première dame impliquée et le reste pendant les 12 années de mandat de son époux.
Quand Bill Clinton devient, en 1992, le 42e président des États-Unis, elle est aussi prête que lui à poser ses valises au 1600 Pennsylvania Avenue. Pendant huit ans, Hillary joue un rôle politique actif, se distinguant des Premières dames qui l'ont discrètement précédée. Elle fait ses armes et apprend à encaisser les coups : en s'exposant, elle devient la cible privilégiée des républicains du Capitole. Ses premières années à la Maison Blanche sont marquées par son investissement croissant dans la défense des droits des femmes comme par son échec à réformer le système de santé du pays. Un coup à peine plus dur à encaisser que "l'affaire Lewinsky".
La "trahison" de Bill
Le scandale éclate en 1998 : Bill Clinton est accusé d'avoir eu une relation sexuelle avec la jeune stagiaire de la Maison Blanche, Monica Lewinsky. Des faits que le président nie dans un premier temps avant d'admettre, dans une déclaration télévisée, avoir eu une relation "inappropriée". Accusé de parjure et d'entrave à la justice, Bill Clinton fait, en décembre 1998, l'objet d'une procédure de destitution. Il sera finalement acquitté par le Sénat en février 1999.
Pendant cette épreuve, Hillary fait bonne figure. Elle soutient invariablement son mari, parlant d’une "vaste conspiration de droite", même après les aveux publics. Mais en 2003, dans son autobiographie intitulée "Mon histoire", elle revient sur la "trahison" de son mari. "Ce furent des moments terribles pour nous tous, écrit-elle. Je ne savais pas si notre mariage pourrait - ou devrait - survivre à une trahison si cuisante, mais je savais que je devais surmonter mes sentiments, à mon propre rythme".
Dans la tourmente du 11-Septembre
En 2000, les Clinton déménagent à Chappaqua dans l'État de New York, et il est désormais temps pour Hillary de sortir des rôles secondaires. Apres une campagne réussie, elle est élue sénatrice de l'État du nord-est, le plus peuplé des États-Unis. Aux premières lignes lors des attaques du 11 septembre, elle lève des fonds pour la reconstruction du sud de Manhattan et payer les soins de ceux qui ont aidé sur le site de Ground Zero.
En 2002, elle vote en faveur de l'intervention américaine en Irak. Une décision que ses rivaux politiques, le président Barack Obama inclus, n'ont pas manqué de lui reprocher. "Je me suis trompé. C'est clair et simple", admettra plus tard Hillary Clinton dans ses Mémoires "Le Temps des décisions'', reconnaissant avoir longtemps évité le mea culpa de peur que cela ne soit perçu comme un signe de faiblesse.
Barack Obama : le rival devenu allié
La candidature d'Hillary à la présidentielle n'en reste pas moins évidente en 2008, mais elle se fait ravir la place par Barack Obama. Malgré la campagne cinglante qui a opposé les deux démocrates lors de la course à la primaire, Hillary rallie les rangs de son ancien rival et se rend rapidement incontournable. Après l'élection d'Obama à la présidence des États-Unis, Hillary Clinton est nommée secrétaire d'État.
À la tête de la diplomatie américaine, Clinton assoit sa stature de femme d'État. "Son mandat de chef de la diplomatie américaine lui a conféré une image de femme d’État extrêmement travailleuse, combattante et efficace, expliquait en 2014 à France 24 Vincent Michelot, professeur d’histoire politique américaine à l’IEP de Lyon. Elle a défendu la lutte contre les discriminations raciales, religieuses et sexuelles, qui demeurent des causes importantes dans l’opinion publique américaine." Même le camp républicain ne peut nier ses qualités. L'ancien secrétaire d'État Henry Kissinger admet bien volontiers qu'elle "a dirigé le Département d'État de la manière la plus efficace [qu'il n'a] jamais vue".
En 2011, elle n'hésite pas à convaincre le président Obama de lancer le raid sur le présumé repaire d'Oussama Ben Laden à Abbottabad, au Pakistan. Selon elle, le vice-président Joe Biden était en revanche plus "sceptique" sur l'opération. L'histoire a finalement donné raison à la secrétaire d'État : le leader d'Al-Qaïda, accusé d'être derrière les attentats du 11-Septembre, est tué lors de cette opération 2 mai 2011. Son bilan est néanmoins terni par l'attaque du consulat américain de Benghazi, en Libye, qui a coûté la vie à l'ambassadeur Christopher Stevens et à trois autres Américains en 2012.
Une campagne électorale sans pitié
La salve de critiques qui s'en suit ne la détourne pas pour autant de son objectif suprême : la Maison Blanche. Hillary Clinton quitte le Département d'État en 2012 pour annoncer officiellement, en avril 2015, sa candidature à la présidence des États-Unis. Comme en 2008, c'est une évidence. Et comme en 2008, ses adversaires ne tardent pas à déclencher les hostilités.
Hillary est rapidement rattrapée par "l'affaire des e-mails" : de 2009 à 2013, alors qu'elle était secrétaire d'État, elle a utilisé une adresse e-mail personnelle pour ses activités professionnelles, ce qui est interdit par la loi fédérale. L'affaire pourrit la campagne pendant des mois, la presse ne se lasse pas de lui demander des comptes et ses adversaires républicains ne manquent pas une occasion de l'attaquer à ce propos. "Les enjeux de cette élection sont trop élevés pour confier la Maison Blanche à quelqu'un qui manque de jugement et qui méprise la loi comme Hillary Clinton", a dénoncé le président du Parti républicain, Reince Priebus.
Mais Hillary Clinton ne se laisse pas abattre. En juillet, elle s'impose face à Bernie Sander et devient la première femme candidate d'un parti politique majeur à la présidentielle américaine. Elle est aussitôt adoubée par le président sortant. "Il n'y a jamais eu un homme ou une femme plus qualifiée pour ce poste que Hillary Clinton", déclare Barack Obama lors d'un meeting de campagne en juillet.
Depuis, les déclarations tumultueuses et controversées de Donald Trump ont plutôt joué en la défaveur de ce dernier, régulièrement donné perdant par les sondages. Mais le candidat républicain – qui joue la carte de l'outsider prêt à réformer un système "truqué" - n'en reste pas moins populaire et il réussit à se maintenir dans la course, toujours serrée dans les États-clés.