
Les Gabonais attendent toujours la proclamation des résultats de la présidentielle opposant le sortant Ali Bongo et son rival Jean Ping. La commission électorale a entamé ses travaux avec près de 12 heures de retard.
Les Gabonais attendaient toujours, mercredi 31 août, de connaître le nom de leur président après une longue nuit de vains conciliabules à la Commission électorale nationale (Cénap), qui s'est réunie pour désigner le vainqueur du scrutin de samedi entre le chef de l'État sortant, Ali Bongo Ondimba, ou son rival, Jean Ping.
"Pourquoi s'amuse-t-on à se faire peur ? Il faut qu'on en finisse avec le suspense", écrivait mercredi matin L'Union, journal proche du pouvoir. Le quotidien reproduit en une l'appel à la retenue lancé la veille par le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, aux deux candidats qui revendiquent tous deux la victoire.
Vie au ralenti
Redoutant des troubles, les Gabonais vivent au ralenti dans l'attente de la proclamation du résultat final par le ministre de l'Intérieur, prévue à l'issue d'une réunion plénière de la Cénap. Dans le centre de Libreville, le dispositif policier et militaire reste important, et des barrages ont été réinstallés autour du siège de la présidence sur le front de mer, a constaté une journaliste de l'AFP.
Les habitants sortent timidement, à pied le plus souvent, faute de taxis généralement très nombreux. Les commerces ouvrent leur rideau sans exclure de finir la journée plus tôt que prévu, comme la veille. Habitués à la paix, les Gabonais se souviennent des troubles post-électoraux de 2009 dans la capitale économique Port-Gentil (morts, pillages, consulat de France incendié...).
Les délégués d’Ali Bongo et de Jean Ping ont veillé toute la nuit au siège de la commission électorale, qui centralise les procès-verbaux d'une élection à un tour avec un peu plus de 628 000 inscrits. Une centaine de partisans de Jean Ping ont dormi au siège de campagne de leur candidat en attendant les résultats officiels.
12 heures de retard
L'assemblée plénière, décisive pour désigner le vainqueur de l'élection, a commencé avec près de 12 heures de retard et en l'absence des observateurs de l'Union européenne (UE), qui n'ont pas été autorisés à y assister. Depuis mardi soir, les débats au sein de cette commission qui collectent les résultats butent sur une seule des neuf provinces : le Haut-Ogooué, fief de l'ethnie Téké du président Bongo.
D'après les procès verbaux, le président sortant obtiendrait dans cette province 95,46 % des suffrages, avec une participation de 99,93 % pour 71 714 inscrits. Les délégués de l'opposition au sein de la Cénap ont prévenu qu'ils n'accepteraient pas ces résultats : "On va se battre. On veut recompter bureau par bureau" dans le Haut-Ogooué, a expliqué l'un d'eux.
Le président de la Cénap, René Aboghe Ella, a précisé que la loi n'autorise pas une proclamation bureau par bureau pour la présidentielle, comme l'avait également demandé lundi la chef de la mission des observateurs européens, Maryia Gabriel, afin d'"assurer la confiance dans l'intégrité des résultats finaux et garantir qu'il reflète la volonté populaire".
"Fraude" et "ingérences"
Mardi, Jean Ping, 73 ans, a répété qu'il se considérait vainqueur de cette élection. L'entourage du président Bongo évoquait également depuis samedi une "avance" qui lui garantirait la victoire. Malgré l'appel du secrétaire des Nations unies, les invectives n'ont pas cessé.
Le porte-parole du gouvernement, Alain-Claude Bilie-By-Nze, a dénoncé mardi "des ingérences multiples" au bénéfice de Jean Ping, visant la France et un présumé proche du président ivoirien Alassane Ouattara, qui a été congédié par le pouvoir à Abidjan.
Ex-baron du régime du président Omar Bongo, opposant tardif après l'élection de son fils Ali en 2009, Jean Ping prétend renverser la famille au pouvoir depuis 1967. Ali Bongo, 57 ans, a défendu son bilan avec des "investissements sans précédent" et la diversification de l'économie, en promettant "l'égalité des chances" et de faire mieux pour le logement.