Le Conseil de sécurité de l'ONU a décidé de déployer 228 policiers onusiens au Burundi. La situation s'envenime au point de faire craindre à la communauté internationale un génocide comparable à celui qu'a vécu le Rwanda en 1994.
Vendredi, le Conseil de sécurité a pris la décision de déployer progressivement 228 policiers de l'ONU au Burundi, pour tenter de ramener le calme dans ce pays en proie à de vives tensions depuis plus d'un an. Aux termes d'une résolution proposée par la France et adoptée par le Conseil par 11 voix pour et quatre abstentions (Chine, Angola, Égypte, Venezuela), ces policiers seront envoyés à Bujumbura et dans tout le Burundi "pour une période initiale d'un an". Si la situation s’aggrave, leur mission pourra être prolongée ou modifiée.
Marge de manœuvre incertaine
Les 228 hommes seront chargés de "surveiller la situation en matière de sécurité" ainsi que le respect des droits de l'Homme, en coordination avec quelques dizaines d'observateurs et d'experts militaires de l'Union africaine déjà déployés. Leur efficacité dépendra cependant largement de la marge de manœuvre que leur laisseront les autorités burundaises. Celles-ci n'ont pour l'instant accepté d'accueillir que 50 policiers.
Lors des deux semaines de négociations, plusieurs membres du Conseil (Égypte, Russie, Chine, Angola, Venezuela) ont insisté sur la nécessité d'obtenir préalablement un accord du gouvernement burundais. La résolution rappelle l'accord de Bujumbura pour 50 policiers et demande au gouvernement burundais de "coopérer pleinement" avec la force de police onusienne. Le gouvernement burundais a accepté en principe le déploiement de 100 observateurs et 100 experts militaires envoyés par l'Union africaine, mais seuls 32 observateurs et 14 experts sont effectivement sur le terrain.
Le Conseil "demande instamment" à Bujumbura "d'assurer le déploiement complet" et effectif des experts de l'Union africaine. Il exhorte aussi le gouvernement burundais à dialoguer "d'urgence, de manière active et constructive" avec tous les groupes d'opposition, y compris ceux qui se trouvent "hors du pays", pour mettre fin à la crise.
Ce dialogue est pour l'instant dans l'impasse, le gouvernement refusant de s'asseoir aux côtés d'opposants en exil qu'il accuse d'avoir fomenté une tentative de coup d'Etat en mai 2015. Une cérémonie d'ouverture du dialogue inter-burundais prévue le 12 juillet en Tanzanie avait ainsi été annulée.
Un "acte fort de diplomatie préventive"
Depuis plus d'un an, le Burundi est plongé dans une profonde crise à la suite de la décision du président Pierre Nkurunziza de briguer un troisième mandat. Cette crise a déjà fait plus de 500 morts et poussé plus de 270 000 burundais à l'exil. Ces violences font craindre un génocide, comme celui qui a frappé le Rwanda voisin en 1994.
L'ambassadeur français François Delattre a salué, après le vote du Conseil, un "acte fort de diplomatie préventive". Se référant au génocide rwandais, il a estimé que le Conseil "tire les leçons du passé". La résolution exige de toutes les parties qu'elles "rejettent toute forme de violence" et demande au gouvernement burundais de respecter les droits de l'Homme et les libertés fondamentales.
L'ONG Human Rights Watch (HRW) a accusé des policiers et des jeunes miliciens proches du pouvoir de se livrer à des viols collectifs sur des femmes considérées comme proches de l'opposition depuis le début de cette crise.
Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon avait initialement proposé plusieurs options pour la force de police, allant de quelques dizaines à 3 000 hommes. Il avait estimé qu'une force de 228 policiers pourrait empêcher une effusion de sang majeure mais serait insuffisante pour protéger les civils.
Avec AFP