
Les habitants du plus grand bidonville du Liberia sont menacés par la montée du niveau de la mer. Des milliers d'entre eux ont déjà dû être déplacés. En 2013, un rapport de la Banque mondiale mettait en garde contre les risques liés à ce phénomène.
Ils ne possèdent rien mais le peu qu’ils ont la mer est en train de leur prendre. Des milliers d’habitants du bidonville de West Point, le plus grand du Liberia, situé à l’ouest de la capitale Monrovia, ont déjà dû quitter leur foyer. Ils ont été chassés de chez eux par la montée inexorable du niveau de la mer.
Entre 75 000 et 90 000 personnes vivent dans ce quartier de 4 km² fait de masures, de cabanes, de logements et d’échoppes réalisés à partir de matériaux récupérés. La plupart des habitations ne comportent pas les commodités minimales imposées par les règles de l'urbanisation : branchements individuels aux réseaux de distribution d'eau potable, d'électricité, toilettes, assainissement.
Des déchets humains et des ordures ménagères se retrouvent parfois en plein air, charriées par les eaux peinant à s'écouler après les fortes pluies ou les vagues baladeuses.
Quatre mille habitants privés de leur domicile en avril
Selon les autorités locales, l’océan Atlantique a commencé à s’attaquer aux maisons de West Point en novembre 2014. En raison du réchauffement climatique, à l’origine de la fonte des calottes glacière des pôles et donc de la montée du niveau des océans, ce phénomène n’est pas près de s’arrêter. Au moins 4 000 habitants ont été privés de leur domicile pour le seul mois d'avril et les familles sont en train d'être réinstallées sur des sites provisoires, constitués de baraques de tôle, plus à l'intérieur des terres.
Actuellement, au moins 3 000 habitants sont dans "une situation très grave" et ont besoin d'une aide immédiate, déclare Sampson J. Nyan, préfet chargé du bidonville.
D'après lui, il faudrait 1,5 million de dollars (près de 1,34 million d'euros) pour la construction de logements permanents pour les déplacés de West Point. Une somme énorme pour le maigre budget du Liberia.
Demore Moore, président d'une association de victimes de la montée des eaux, presse les autorités d'accélérer la construction de logements sécurisés car, soutient-il, "la seule solution, c'est la délocalisation, sinon la totalité du quartier sera emportée par la mer".
Vulnérabilité des "citadins pauvres"
Dans un rapport publié en 2013, la Banque mondiale estimait qu’un réchauffement de la terre de 2°C (par rapport à sa température à la fin du XIXe siècle) d’ici 2080 ferait augmenter le niveau des océans de 70 cm. Un réchauffement de 4°C entraînerait, lui, une montée de 100 cm d’ici 2090.
L’organisation désignait également les zones urbaines comme de "nouveaux pôles de vulnérabilité" face au changement climatique : "D’ici 2050, la proportion des populations d’Afrique subsaharienne vivant en ville, qui s’établissait à 36 % en 2010, atteindra 56 %".
En ville, les populations les plus fragiles risquent d’être les premières touchées par les conséquences du réchauffement climatique. Dans un environnement citadin privé de dispositifs d’hygiène de base, comme c’est le cas dans le bidonville de West Point, une augmentation du niveau de la mer pourrait déclencher des épidémies de maladies transmissibles par l’eau telles que le paludisme, la fièvre de la Vallée du Rift ou encore le choléra.
Par ailleurs, la Banque mondiale rappelle que l’agriculture est la principale source de revenus et d’alimentation des populations les moins fortunées en Afrique subsaharienne. Le réchauffement climatique, en provoquant de graves sécheresses et en perturbant le rythme des précipitations, réduit les récoltes et fait grimper les prix des denrées alimentaires.
Dans ce contexte, les "citadins pauvres" sont les personnes les plus vulnérables "aux hausses des prix des aliments" qu’entraînent les aléas climatiques liés au changement climatique.
Plus que jamais, les habitants des bidonvilles, comme celui de West Point, font les frais du mode de vie des pays industrialisés.
Avec AFP