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Trois jours après l'attentat de Nice, Nicolas Sarkozy joue la divergence nationale

Alors que la France doit rendre à midi un hommage nationale aux victimes de l’attentat de Nice, les tensions politiques sont plus vives que jamais. Dimanche soir, Nicolas Sarkozy s’est montré particulièrement virulent à l’égard de l’exécutif.

"On ne se déchire pas alors que des victimes n’ont pas encore été enterrées". Nicolas Sarkozy a cru bon de le rappeler. Pourtant, trois jours après l'attentat de Nice qui a fait 84 morts, les tensions politiques sont plus exacerbées que jamais en France et l'ancien chef de l'Etat lui-même ne semble pas concerné par son propre appel à la retenue. Sans attendre la fin du deuil national, il n’a pas hésité à hausser le ton dès dimanche soir, estimant que "tout ce qui aurait dû être fait depuis 18 mois ne l'a pas été".

"Je sais parfaitement que le risque zéro n'existe pas", a affirmé dimanche sur TF1 le président des Républicains, mais "nous sommes en guerre, une guerre totale". "Nos ennemis n'ont pas de tabous, pas de frontières, pas de principes. Donc, je vais employer des mots forts : ça sera eux ou nous", a-t-il lancé, ajoutant qu'une "autre politique est possible".

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Nicolas Sarkozy a ensuite égrené une série de propositions, demandant l’ouverture de centres de déradicalisation, l’expulsion des personnes étrangères fichées S et le placement en centre de rétention ou sous bracelet électronique de celles présentant un risque de radicalisation. "Avec cela, on engage vraiment la guerre", a-t-il souligné. Concernant la décision de François Hollande de faire appel à la réserve militaire opérationnelle, il a en revanche estimé que cela n’allait pas "résoudre le problème du terrorisme".

La réplique

La réplique ne s’est pas faite attendre. "@NicolasSarkozy en général loin du front fait du bruit pour couvrir ses concurrents, passant l'action de la France par pertes et profits", a réagi sur Twitter le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis. Le Premier ministre Manuel Valls et son ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve ont quant à eux assuré, dans un communiqué commun envoyé dans la soirée, qu'"aucun gouvernement n'a fait autant jusqu'à présent pour lutter contre le terrorisme".

"Nous répondons d'abord par une mobilisation totale de nos forces, dont nous rehaussons les effectifs – 9 000 emplois de policiers et de gendarmes recréés sur l'ensemble du quinquennat, dont 1 900 pour renforcer le renseignement intérieur, quand 12 500 avaient été supprimés entre 2007 et 2012", soulignent-ils.

Les deux hommes mettent aussi en avant "l'augmentation de 17 % des crédits de fonctionnement des forces de sécurité intérieure" depuis 2012, "là où ils avaient diminué d'autant lors du précédent quinquennat" de Nicolas Sarkozy. Ils insistent également sur leur "action déterminée pour la prévention de la radicalisation", avec notamment "la création d'un centre de réinsertion et de citoyenneté par région d'ici fin 2017". S'agissant de la rétention administrative, ils rappellent enfin que "notre Constitution garantit les libertés publiques: l'arbitraire n'est pas constitutionnel. Surtout, il n'est ni acceptable, ni efficace".


L’unité nationale mise à mal

Cette réponse détaillée trouvera-t-elle grâce aux yeux de l’opposition ? Rien n’est moins sûr et la droite a la dent dure. Alain Juppé, a notamment jugé que "si tous les moyens avaient été pris" l'attentat "n'aurait pas eu lieu" ; François Fillon a estimé que "quand on est en guerre, on protège le territoire national". Christian Estrosi, le premier adjoint au maire de Nice, a dénoncé le manque de sécurité, estimant sur Twitter que "toutes les missions de sécurité relèvent de l'État et non des collectivités".

Quant à Marine Le Pen (FN), elle a renvoyé dos à dos gauche et droite, responsables de "carences gravissimes de l'État" qui auraient permis ce type d'attentats.

Face à cette absence manifeste d'unité nationale, qui avait prévalu – au moins quelques jours – après les attentats de janvier et novembre 2015, Manuel Valls a tenté de sceller un "esprit du 14 juillet", jugeant qu'"une campagne présidentielle ne mérite pas qu'on divise le pays". Dans un entretien au Journal du Dimanche, le Premier ministre s'en est pris à l'opposition et à "certains politiques irresponsables [qui] disent que cet attentat était évitable", mettant en garde contre "la tentation de remettre en cause l'État de droit".

"La réponse à l'État islamique ne peut pas être la 'trumpisation' des esprits", a-t-il dit, en référence à Donald Trump, candidat républicain à la présidentielle américaine, coutumier des propos provocateurs. Toujours laminé par les sondages, et alors qu'un rebond post-attentat est incertain, François Hollande avait lancé ce week-end un appel à l'unité nationale, prévenant dès vendredi qu'il n'entendait pas s'"abaisser" aux "outrances" et aux "excès". Un appel resté, semblerait-il, lettre morte. 

Avec AFP et Reuters