Alors qu'une nouvelle journée de contestation sociale est organisée à Paris, le Premier ministre Manuel Valls a affirmé devant l'Assemblée nationale qu'il allait recourir à l'article 49-3 pour forcer l'adoption du projet de Loi travail.
C’est devant une Assemblée nationale dissipée que Manuel Valls a annoncé le passage en force du projet de Loi travail. Le Premier ministre français a confirmé, mardi 5 juillet, qu'il aurait une nouvelle fois recours à l’article 49-3 de la Constitution pour faire adopter la réforme du Code du travail dès le retour du texte en deuxième lecture.
"C’est un texte de progrès social qui a fait l’objet d’une large concertation, mon gouvernement est déterminé à avancer", a fait savoir le chef du gouvernement devant l’hémicycle. Avant d’ajouter : "En application de l’article 49 alinéa 3 de notre Constitution, j’ai donc décidé, après délibération du Conseil des ministres, d’engager la responsabilité du gouvernement sur le vote."
Une motion de censure peu probable
En clair, si aucune motion de censure n'est déposée dans les 24 heures, le projet de loi sera adopté sans vote. Le groupe Les Républicains (opposition), qui a déjà fait savoir qu'il ne déposerait pas de motion, a quitté ses bancs à l'annonce du 49-3, sans attendre la fin de la brève intervention du Premier ministre. Quant aux opposants de gauche au texte, ils peinent à rassembler les 58 signatures de députés nécessaires à l'enclenchement de la procédure.
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Passée l'étape de mardi au Palais Bourbon, le projet de loi n'aura pas terminé son parcours, puisqu'il y aura une brève navette avec le Sénat avant l'adoption définitive d'ici au 22 juillet par l'Assemblée.
À la tribune, Manuel Valls a défendu les "avancées" obtenues sur un texte "de progrès social", qui a "fait l'objet d'une large concertation" et, comme en première lecture, a fustigé "une alliance des contraires, une alliance des conservatismes et des immobilismes", en visant la droite et les opposants de gauche au projet de loi. "Cette alliance, c'est celle de ceux qui ne veulent rien changer", a-t-il critiqué.
"Brutalité" et "provocations"
Au sein de la classe politique, les réactions se multiplient. La droite parle d’aveu de faiblesse, tandis que les "frondeurs" du Parti socialiste et la gauche de la gauche parlent de déni de démocratie.
"Il y a beaucoup de postures dans ces réactions, parce que la logique voulait que le 49-3 soit de nouveau engagé dès lors qu’il l’avait été en première lecture, rappelle à France 24 Christophe Caresche, député socialiste de Paris. Le gouvernement a essayé durant cette seconde lecture de faire un certain nombre de modifications au texte. Elles ont d’ailleurs été saluées par les syndicats mais cela n’a pas suffi à modifier le comportement d’un certain nombre de députés de la majorité et le gouvernement a logiquement tiré les conclusions."
"Le Premier ministre est sourd aux appels de la société française puisqu’une grande majorité des Français soutient les manifestations, qui durent depuis maintenant plus de trois mois, affirme à France 24 Noël Mamère, député écologiste de Gironde. Un certain nombre d’entre nous considérons qu’il faut que le peuple soit représenté pour montrer que nous ne nous soumettons pas à la brutalité et aux provocations du Premier ministre qui vient de ressortir le 49-3."
C'est le deuxième 49-3 sur le texte, le quatrième depuis le début du quinquennat de François Hollande, en comptant les deux utilisés sur la loi Macron en 2015. "Quand on est dans l’opposition, on considère toujours que c’est un outil anti-démocratique alors qu’il existe dans la Constitution et que beaucoup l’ont utilisé, notamment Michel Rocard", rappelle Roselyne Febvre, journaliste de France 24 spécialiste de politique française.
Moins de manifestants dans les rues
L’annonce de Manuel Valls intervient, alors que les syndicats opposés au texte ont organisé leur douzième journée d'action avec plusieurs défilés, dont un à Paris entre place d'Italie et Bastille. "Le gouvernement fait une grave erreur en pensant court-circuiter la démocratie s'il promulgue une loi de telle importance pendant les congés estivaux", a prévenu la CGT dans un communiqué. "Le mouvement social ne va pas faiblir et d'ores et déjà des initiatives ont été décidées pendant l'été, afin de préparer une rentrée puissante et offensive pour empêcher la mise en place de la loi." Force ouvrière a réagi dans un communiqué en dénonçant "une sortie par le bas" pour le gouvernement "et "un déni de démocratie".
Mais les opposants au projet de loi de travail étaient mardi moins nombreux à défiler dans les rues. Selon la police, quelque 7 000 personnes s'étaient mobilisés à Paris, bien que la CGT et FO estiment ce nombre à 45 000. Il n'a été rapporté aucun incident violent pendant défilé, qui s'est déroulé sous haute surveillance.
Avec AFP et Reuters
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