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Amende avec sursis pour le Britannique qui a tenté de faire passer une Afghane en Angleterre

Le Britannique Robert Lawrie a bénéficié de la clémence du tribunal correctionnel de Boulogne-sur-Mer. Il a écopé d'une amende de 1 000 euros avec sursis pour avoir tenté de faire passer une fillette Afghane de Calais à Leeds.

Soulagement général au tribunal correctionnel de Boulogne-sur-Mer. Robert Lawrie, ex-militaire britannique de 49 ans qui comparaissait jeudi 14 janvier pour avoir tenté de faire passer clandestinement une fillette afghane de sa connaissance en Angleterre, a bénéficié de la clémence du juge. 

Poursuivi pour "aide à l’immigration illégale", le Britannique a finalement été condamné à une amende de 1 000 euros avec sursis pour "mise en danger de la vie d'autrui". "Parce que la fin ne justifie pas les moyens. Ce n'est pas parce qu'on veut aider une enfant qu'on peut mettre sa vie en danger", a expliqué le procureur Jean-Pierre Valensi durant son réquisitoire, ajoutant que Lawrie "aurait pu aider autrement qu'en commettant une infraction, par exemple en aidant à un dépôt de demande d'asile".

Rob Lawrie, très ému tout au long de l'audience, a accueilli la nouvelle par des larmes et des remerciements. "La France est un pays humain. Merci la France, la compassion a gagné", a-t-il clamé, selon le journaliste de France TV Yann Thomson. Pendant le procès, il s'est excusé à plusieurs reprises. "C'était irrationnel, je n'ai pas bien réfléchi. J'ai essayé de faire en sorte qu'elle puisse rejoindre sa famille qui habitait à seulement huit miles de Leeds, où j'habite", a-t-il déclaré. "Ce que j'ai fait était stupide, j'étais émotionnellement épuisé. Je suis désolé", a-t-il ajouté.

Passeur ou grand cœur ?

Que s’est-il passé pour que ce chef d'entreprise, ancien soldat et père de quatre enfants, puisse devenir - aux yeux de la loi - un "passeur" ? Une prise de conscience brutale qui remonte au 5 septembre 2015. Ce soir-là, Robert Lawrie découvre sur l’écran de son ordinateur la photo du petit Aylan Kurdi, mort noyé sur une plage de Bodrum, en Turquie. Un électrochoc qui le pousse à tout laisser tomber.

Une semaine plus tard, il arrive dans les camps de migrants Grande-Synthe et de Calais, de l'autre côté de la Manche, au volant d'un fourgon rempli de dons récoltés grâce à un appel lancé sur Facebook. Il distribue tentes, sacs de couchage, chaussures et plusieurs kilos de nourriture. Pendant plusieurs mois, Rob multiplie ainsi les allers et retours entre sa ville de Leeds et Calais, délaissant son entreprise, aujourd’hui en faillite, et sa femme, qui a fini par le quitter. Rob passe ses journées dans la "jungle" à construire des abris de bois et de bâche aux côtés des migrants.

C’est à Calais, où vivent plusieurs milliers de migrants qui caressent l'espoir de rejoindre l'Angleterre, qu’il fait la rencontre de Reza Ahmadi et de sa fille Bahar, 4 ans. Il la surnomme "Bru". Sur une vidéo postée sur son compte Facebook, on voit Rob jouer à colin-maillard avec la petite qui lui dépose un baiser sur la joue dans un éclat de rire. Rob s’attache. le 24 octobre au soir, lorsque Reza le supplie une fois de plus d’emmener la petite à Leeds avec lui pour qu’elle y rejoigne de la famille, Rob craque.

"Il ne me semblait tout simplement pas juste de la laisser là, sous une tente, dans la jungle de Calais", a-t-il expliqué dans d'un entretien à l'AFP diffusé en novembre. Vers minuit, il prend la petite fille qui s’est endormie sur ses genoux et la cache dans son camion. Mais lorsqu’il est contrôlé à la frontière de Calais, les chiens de la police découvrent deux Érythréens adultes présents à l'arrière de sa camionnette, cachés selon lui à son insu. Bob est menotté, placé dans une cellule et menacé d'une longue garde à vue. Il alerte alors la police de la présence de l'enfant.

"Trouvons la bonne voie"

La petite Bahar a ensuite été renvoyée à son père dans la "jungle" de Calais. Alors que le thermomètre flirte cet hiver avec le zéro degré, ils y vivraient toujours, dans une caravane donnée par une association. Selon une information de Libération, les Ahmadi n'avaient pas rejoint, lundi dernier, les conteneurs chauffés du nouveau camp d'accueil de migrants qui a ouvert le 11 janvier et qui doit héberger 1 500 personnes. 

Placé en liberté sous caution, Rob Lawrie s'est de son côté retrouvé extrêmement fragilisé psychologiquement et n'a pas pu, depuis, remettre les pieds dans la "jungle".  Mais il a pu compter sur de nombreux soutiens. Deux pétitions, mises en ligne après son arrestation pour demander sa relaxe, ont recueilli plus de 120 600 signatures en France et plus de 54 000 au Royaume-Uni.

S'il regrette, il continue de défendre la justesse de son acte, comme il l'avait déclaré à la BBC : "Pas besoin de me dire que je suis un idiot, je le sais déjà. J’ai fait une erreur, je n’ai aucun doute là-dessus. Je ne dis pas : 'Hé, regardez-moi, je suis un héros', je dis : 'J’ai pris la mauvaise voie, trouvons la bonne.'”

Avec AFP