![À Cologne, les agressions du Nouvel An ont "nui à l'image des réfugiés syriens" À Cologne, les agressions du Nouvel An ont "nui à l'image des réfugiés syriens"](/data/posts/2022/07/21/1658379343_A-Cologne-les-agressions-du-Nouvel-An-ont-nui-a-l-image-des-refugies-syriens.jpg)
Chady, Hassan et Mohammed sont arrivés à Cologne il y a moins d’un an. Malgré des conditions de vie précaires, ces réfugiés syriens s’y sentent bien et condamnent fermement les agressions du 31 décembre. Reportage.
Ils avaient jusqu’à présent préféré faire profil bas, essayant avant tout de s’adapter à leur nouvelle vie à Cologne. Arrivés il y a dix mois en Allemagne, Chady, Mohammed et Hassan ont décidé après les événements tragiques de la nuit du 31 décembre à la gare centrale d’exprimer publiquement leur solidarité avec les victimes des vols et agressions sexuelles. C'est justement sur le lieu des agressions que les trois réfugiés ont distribué, lundi 11 et mardi 12 janvier, des tracts condamnant les violences, au nom des “hommes syriens”. Dans le texte, ils regrettent que ces “actes" aient nuit "à l’image de notre groupe, celui des Syriens et des réfugiés en général”.
En Syrie, Chady était mécanicien, Hassan avait la double casquette d’avocat et de designer de mode et Mohammed travaillait pour une société de télécommunication. Depuis plusieurs mois, ils habitent ensemble dans le même hôtel, réquisitionné par la municipalité l’an dernier pour l’accueil des demandeurs d’asile dans un quartier excentré au nord-est de Cologne.
Confort rudimentaire
Environ 25 réfugiés, uniquement des hommes, y vivent. Ce sont essentiellement des Syriens, mais il y a aussi quelques Pakistanais, des Irakiens et des Afghans. Les résidents y sont regroupés par origine et les interactions sont rares entre les différentes communautés. Justement, ce soir-là se déroule la première “soirée commune dans la salle principale à écouter de la musique allemande”, se réjouit Mohammed.
Par trois ou quatre, ils repartent ensuite dans leurs chambres. Environ 13 m² au confort rudimentaire : un coin cuisine, des lits superposés, une table, quelques chaises, une armoire de type Ikea et des cartons pour ranger les vêtements. Mais Mohammed et Chady ne se plaignent pas. Auparavant, ils étaient “dans un autre centre où on ne pouvait pas cuisiner soi-même, et si on avait le malheur d’être à l’extérieur - pour les cours ou des démarches administratives - aux heures pour manger, on ratait le repas”, raconte Chady. Et il n’y avait que des salles d’eau commune.
Dans sa chambre, les murs sont désormais recouverts de feuilles de papier. De longues listes de mots en allemand et leur traduction en Arabe sont griffonées dessus. “Apprendre la langue est ce qu’il y a de plus important, pour pouvoir ensuite travailler et apporter quelque chose à l’Allemagne”, assure Chady, qui reconnaît avoir encore du mal avec toutes les finesses grammaticales de la langue de Goethe. Le travail est l’une des principales priorités pour ces Syriens qui touchent entre 330 et 400 euros (selon qu’ils ont déjà obtenu le droit d’asile ou non) d’aide sociale par mois.
Précieux sésame pour travailler
Mais pour repartir du bon pied professionnel en Allemagne, encore faut-il que la demande d’asile politique soit approuvée. Chady a obtenu ce précieux sésame il y a un mois. Désormais, il a hâte de trouver un “job, même pour quelques heures par semaine”. Mohammed, qui avait repris des études d’informatique, ne peut prétendre qu’à un poste d’apprenti, faute d’avoir les papiers définitifs.
Quant à Hassan, il attend et ne sait pas très bien pourquoi. “Je suis arrivé en même temps que les autres, j’ai les même documents et un parcours similaire, mais dans mon cas, on me dit toujours de patienter sans jamais m’expliquer ce qui prend autant de temps”, regrette-t-il. Malgré cela, il affiche un sourire plein d’espoir. Après tout, comme ces deux compatriotes, Hassan a choisi l’Allemagne plutôt qu’un autre pays d’Europe en raison de sa bonne santé économique.
“Un peu inquiet” de la réaction des Allemands
L’autre raison qui les a amenés ici est que "l’Allemagne, c’est l’Allemagne !", résume Mohammed. "Les gens ici sont plus accueillants qu’ailleurs", veut croire Chady. Les trois hommes se raccrochent à l’image d’un pays aux bras grands ouverts, comme l'a une fois de plus promis aux réfugiés la chancelière Angela Merkel lors de ses vœux pour la nouvelle année.
Mais depuis les grands discours de l’été 2015, 1,1 million de migrants sont arrivés en Allemagne faisant ressortir des crispations que les violences de Cologne n’ont fait qu’exacerber. Chady reconnait qu’après ce drame et les premières informations sur la possible présence de personnes “avec un parcours de migrants” parmi les agresseurs, il a été “un peu inquiet de la réaction” des Allemands. Mais les trois Syriens se disent aujourd’hui rassurés car dans “l’immense majorité, les gens se sont montrés amicaux lorsqu’on leur a donné les tracts et certains nous ont même félicité pour ce qu’on faisait”, raconte Mohammed.
Le changement de ton de la chancelière, qui appelle dorénavant à une politique migratoire plus stricte, n’entame pas non plus leur optimisme. Ils préfèrent se concentrer sur les habitants de Cologne qui, à de rares exceptions près, n’auraient pas changé d’attitude à leur égard. Et si ces exceptions étaient amenées à se faire moins rares ? Habitués à vivre au jour le jour, Mohammed, Chady et Hassan ne veulent pas se projeter dans ce futur. Jusqu’ici tout va bien.