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Quarante-sept personnes exécutées en Arabie saoudite, dont un haut dignitaire chiite

Condamnées pour terrorisme, 47 personnes, dont le dignitaire chiite Nimr Baqer al-Nimr, figure de la contestation contre le régime saoudien, ont été exécutées en Arabie saoudite, a annoncé le royaume samedi. L'Iran promet de réagir fermement.

Quarante-sept personnes dont un imam chiite, Nimr Baqer al Nimr, accusées de terrorisme, ont été exécutées, a annoncé, samedi 2 janvier, le ministère de l’Intérieur de l'Arabie saoudite dans un communiqué.

La plupart des suppliciés étaient impliqués dans une série d’attaques organisées par Al-Qaïda entre 2003 et 2006. Le grand moufti saoudien Abdoulaziz Al al-Cheikh est apparu à la télévision pour expliquer que ces mises à mort étaient justes.

>> À lire sur France 24 : "Ali Mohammed al-Nimr, 19 ans, condamné à mort par Riyad"

Le haut dignitaire religieux chiite, le cheikh Nimr Baqer al-Nimr, était un fervent défenseur de la cause chiite et l'une des bêtes noires du régime. Virulent critique de la dynastie sunnite des Saoud, Nimr avait prêché pendant des manifestations en 2011 en faveur d'une sécession de l'est de l'Arabie et de sa fusion avec le royaume proche de Bahreïn.

Mohammed al-Nimr, frère du religieux saoudien, a indiqué que sa famille était bouleversée par l'annonce de cette exécution et a dit espérer que les réactions à sa mort seraient pacifiques. "Nous espérons que la voix de la modération et un règlement politique prévaudront", a-t-il déclaré par téléphone à Reuters. "Le cheikh Nimr était tenu en haute estime dans sa communauté et dans la société musulmane en général et il ne fait pas de doute qu'il y aura des réactions", a-t-il ajouté.

Dans la région de Qatif, à l'est du pays, des chiites sont descendus dans les rues pour protester contre cette exécution capitale.

L'Iran fulmine

Nimr Baqer al-Nimr avait été condamné à mort en 2014 pour "sédition", "désobéissance au souverain" et "port d'armes" par un tribunal de Riyad spécialisé dans les affaires de "terrorisme". L’Iran, puissance chiite rivale du royaume sunnite, avait prévenu que son exécution "coûterait cher à l’Arabie saoudite".

"Je ne doute pas que ce sang pur tachera la Maison [de la famille] Saoud et qu'ils seront balayés des pages de l'histoire", a déclaré le leader religieux iranien Ahmad Khatami, cité par l'agence iranienne Mehr.

"Le gouvernement saoudien soutient les terroristes et les extrémistes takfiri (sunnites radicaux) tout en exécutant et supprimant ceux qui le critiquent dans le pays", a déclaré de son côté Hossein Jaber Ansari, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, cité par l'agence de presse Irna.

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Le Hezbollah libanais, soutenue par l’Iran, dénonce de son côté un "assassinat", et estime que le cheikh Nimr a été exécuté parce qu'il militait "pour les droits du peuple opprimé".
Le Conseil islamique suprême du Liban, un organe chiite, parle quant à lui d'une "grave erreur". "L'exécution du cheikh Nimr est la mise à mort de la raison, de la modération et du dialogue", dit le cheikh Abdel Amir Kabalan, vice-président du conseil, dans un communiqué.

"Embraser la région"

En Irak, le député Mohammed al Sayhoud, membre de la coalition au pouvoir à Bagdad, a déclaré que cette "mesure prise par la famille régnante vise à embraser à nouveau la région, à provoquer des affrontements entre sunnites et chiites".

L'influent imam chiite Moktada al-Sadr a, quant à lui, invité les chiites d'Arabie et du Golfe à se mobiliser pacifiquement contre "les injustices et le terrorisme gouvernemental".

"J'appelle à des manifestations de colère devant les sites et les intérêts saoudiens et j'exhorte le gouvernement à renoncer à l'ouverture de l'ambassade saoudienne", ajoute-t-il sur son site internet. La représentation saoudienne, fermée depuis 1990, a rouvert cette semaine.

Le royaume saoudien a procédé l'an passé à 157 exécutions, la plupart par décapitation publique, et à 90 en 2014. Certains observateurs estiment que l'exécution de quatre chiites était un moyen pour le pouvoir de prouver qu'il ne fait pas de distinction communautaire quand il s'agit de punir les responsables de violences politiques.

Les mouvements de défense des droits de l'Homme dénoncent régulièrement le fonctionnement arbitraire du système judiciaire saoudien et notamment le recours à la torture pour obtenir des aveux.

Avec Reuters et AFP