logo

Attaques d’Ankara : quel impact sur les législatives du 1er novembre ?

Les législatives anticipées convoquées pour le 1er novembre en Turquie sont maintenues malgré le double attentat meurtrier perpétré à Ankara, a assuré lundi le Premier ministre. Un drame qui pourrait avoir une conséquence sur le résultat du scrutin.

Malgré les attaques meurtrières qui ont fait 97 morts et plus de 500 blessées en plein cœur d’Ankara, les élections législatives anticipées auront bien lieu comme prévu le 1er novembre, a tenu à assurer,  lundi 12 octobre, le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu.

"Quelles que soient les circonstances, les élections auront lieu", a déclaré Ahmet Davutoglu lors d'un entretien accordé à la chaîne d'information NTV. "Nous allons tenir ces élections", a insisté M. Davutoglu, qui dirige un gouvernement intérimaire jusqu'au scrutin du mois prochain.

La question se posait en effet alors que la Turquie était déjà fragilisée par un contexte politique tendu. Ces élections sont décisives pour le président Recep Tayyip Erdogan qui les a convoquées après la défaite du Parti de la justice et du développement (AKP) aux législatives du 7 juin. Après avoir perdu sa majorité absolue, l'AKP, qui règne sans partage depuis 2002, avait cherché en vain un partenaire pour gouverner, mais ses négociations avec les sociaux-démocrates (CHP) d'une part, les nationalistes (MHP) d'autre part, n'ont pas permis la formation d'un gouvernement de coalition.

it

Quel impact sur les élections ?

Quel peut être l’impact de ce double attentat meurtrier sur le résultat des élections ? Selon Jerôme Bastion, correspondant de RFI en Turquie, "cet attentat va créer et attiser les dissensions en Turquie".

L'opposition accuse le président Erdogan d'être responsable de l’attentat, le troisième à frapper en quatre mois le principal parti pro-kurde de Turquie, le HDP (Parti démocratique des peuples). Selon elle, le président cherche à mettre de l'huile sur le feu du conflit kurde, avec l'espoir d'attirer à lui l'électorat nationaliste. De son côté, Recep Tayyip Erdogan dénonce avec virulence le parti pro-kurde, accusé de "complicité" avec les "terroristes" du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).

"La stratégie d’Erdogan consiste à galvaniser le nationalisme pour trouver un support électoral de ce côté là. Mais des analystes prédisent qu’avec les attentats, il peut perdre des voix du côté de la droite en raison de l’incapacité du gouvernement d’assurer la sécurité de ses citoyens", explique Virginie Herz, chroniqueuse internationale de France 24

L’AKP fragilisé, Erdogan silencieux

Cette nouvelle attaque sanglante révèle un gouvernement AKP de plus en plus affaibli et isolé. "À trois semaines du vote, l'AKP est crédité dans les sondages de 38 à 40 % des voix", précise Virgnie Herz, soit un peu moins qu'aux législatives de juin (où il avait remporté 40,7 % des suffrages)

Le Premier ministre Ahmet Davutoglu a reçu, dimanche, le chef de l'opposition, appelant à faire front commun contre le terrorisme. Mais seul le leader du Parti social-démocrate CHP a répondu à l’invitation pour l'exhorter à faire face à ses responsabilités.

"Je lui ai dit que le ministre de l'Intérieur, qui est la cause de ce drame, doit absolument démissionner et s'il ne le fait pas, il doit être limogé, a déclaré Kemal Kiliçdaroglu, le leader du Parti social-démocrate CHP. Le ministre de la Justice, alors que le peuple vit un profond traumatisme, se permet de sourire devant les caméras. Ce ministre ne peut pas rester à son poste. Ces deux ministres, s'ils respectent la population, doivent quitter leurs fonctions."

Dans ce contexte politique chauffé à blanc, Recep Tayyip Erdogan, chef de l'État, est pour le moment resté silencieux. Rentré dimanche soir d'un déplacement au Japon, le président devait rencontrer dans la journée de lundi le ministre turc de l’Intérieur, le chef de l’état-major et le chef des renseignements. Une déclaration du chef de l'État est attendue dans la foulée.