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Blatter suspendu, le Camerounais Hayatou prend les rênes de la Fifa

Suspendu pour 90 jours, Sepp Blatter n’est juridiquement plus en mesure de représenter la Fifa. C’est le Camerounais Issa Hayatou, président de la Confédération africaine de football (CAF), qui assurera l’intérim.

Depuis 1988, il était le grand patron du football africain. Ce jeudi 8 octobre 2015, Issa Hayatou a pris la tête de la Fifa pour la première fois de sa longue carrière politique dans les instances du football. Pour le Camerounais, qui s’était présenté face à Blatter en 2002 avant de devenir l’un de ses plus proches alliés, cette nomination constitue une étape marquante.

Hayatou était le plus ancien vice-président de la Fifa. Et c’est presque mécaniquement qu’il a été désigné pour assurer l’intérim de Sepp Blatter, suspendu 90 jours par le comité d’éthique. "Pour une durée de 90 jours, Joseph Blatter n'a pas le droit de représenter la Fifa de quelque manière que ce soit ni d'agir en son nom", a expliqué l'instance suprême du football mondial, précisant que Blatter avait de fait été "relevé de ses fonctions" dans la foulée de cette sanction. Selon les statuts de la Fifa, le président de la Confédération africaine de football (CAF) étant le "plus ancien vice-président du Comité exécutif en poste", il a hérité de la charge.

Le leader historique de la CAF n’envisage toutefois pas de prolonger l’expérience à la tête de la Fifa. "Je ne présiderai que lors de cet intérim. Un nouveau président sera choisi lors du Congrès extraordinaire du 26 février 2016. Je ne serai pas candidat pour briguer ce mandat", a-t-il déclaré dans un communiqué publié dans la foulée de l’annonce de la suspension de Blatter.

Hayatou ne craint pas la justice...

Interrogé quelques heures plus tard sur la radio RFI, Issa Hayatou est revenu sur cette désignation : "Statutairement, je suis bien obligé d’assumer cette fonction. […] Après, à titre personnel, je suis content et je ferai tout pour être à la hauteur, a-t-il reconnu. Il y a une commission à pied d’œuvre, en train de travailler sur le changement. Nous n’expédierons pas uniquement les affaires courantes mais également tout le processus de réforme engagé."

Il s’est également prononcé sur la situation de Michel Platini, lui aussi suspendu 90 jours par la Commission d’éthique de la Fifa. Le nouveau président de la Fifa estime que le Français est loin d’avoir été mis hors jeu : "Bien sûr [qu’il peut devenir président de la Fifa, NDLR], mais il doit se défendre. D’autres instances peuvent le blanchir, c’est surtout une question de justice désormais. Platini peut très bien gérer la Fifa demain, si la justice prouve son innocence."

Sur son cas personnel, Hayatou s’est montré tout aussi serein : "Pourquoi craindrais-je la justice ? Il faut avoir fait une faute, et je n’ai rien fait. En dépit de ce que tout que la presse raconte, je n’ai jamais été trempé dans ces histoires, jamais. Nous sommes quand même dans des pays de droit."
 

... malgré les affaires

À 69 ans, Issa Hayatou est incontestablement rodé aux arcanes du pouvoir. Et son parcours, débuté en 1974 au secrétariat général de la Fédération camerounaise de football, est celui d’un fin politicien qui a su grimper les échelons progressivement. Sa trajectoire n’est pas pour autant exempte de tout reproche.

En 2011, Hayatou s’est retrouvé dans l’œil du cyclone dans l’affaire des pots-de-vin ISL, un ancien partenaire commercial de la Fifa. Le président de la CAF a reconnu qu’il avait perçu 100 000 francs français (15 245 euros environ) en liquide de la part d’ISL, selon lui pour financer les festivités du 40e anniversaire de la confédération.

Le Comité international olympique (CIO), dont Hayatou est membre, avait finalement décidé de lui infliger un blâme, estimant qu’il y avait eu conflit d’intérêt.

Le nouveau président de la Fifa n’est pas non plus passé totalement au travers du scandale autour de l’attribution des Mondiaux 2018 (Russie) et 2022 (Qatar). En juin 2015, dans un entretien accordé au magazine "Jeune Afrique", il avait reconnu qu’un versement de 1,8 million de dollars (environ 1,6 million d’euros) avait été effectué par le Qatar à la CAF "pour pouvoir exposer leur projet (de candidature au Mondial-2022) lors du congrès" de Luanda en janvier 2010. La capitale angolaise, qui accueillait les principaux matches de la CAN-2010, réunissait alors tout le gratin du football continental.